Au commencement, le commerce équitable avait une dimension Sud-Nord. Puis un commerce équitable Sud-Sud a vu le jour. Plusieurs facteurs favorisent ce mouvement. D’une part, certains groupes de producteur·rices désirent prendre plus d’indépendance vis-à-vis des organisations de commerce équitable du Nord pour réduire les contraintes de l’exportation et compléter les débouchés de leurs produits par une vente locale, et pour éviter les transports de longue distance en raison des nuisances écologiques. Par ailleurs, une classe moyenne, avec un meilleur pouvoir d’achat, émerge dans certaines régions et devient plus exigeante sur la qualité technique, sociale et environnementale des produits qu’elle achète. Les touristes, dans les zones concernées, sont également sensibles aux produits locaux socialement et écologiquement certifiés.
C’est ainsi que plusieurs pays ont développé un commerce équitable local : Mexique, Brésil, Afrique du Sud, Kenya, Inde. Comercio Justo est né au Mexique, le Brésil avait promulgué une loi dans ce sens mais la politique actuelle ne favorise pas son développement. Le projet Équité, mené conjointement par Commerce équitable France, Vétérinaires sans Frontières et Fairtrade Africa dans quatre pays d’Afrique de l’Ouest depuis plusieurs années, cherche à développer une synergie locale de développement du commerce équitable. On observe des résultats suffisamment prometteurs pour que l’expérience soit reconduite et élargie à six pays d’Afrique de l’Ouest.
Bien d’autres pays du Sud évoluent vers l’instauration d’un commerce équitable local. Des plateformes régionales ou nationales se constituent pour consolider ce type de commerce et accroître les débouchés locaux, tels les forums régionaux de WFTO, organisation mondiale du commerce équitable, IFAT-LA (International Federation of Alternative Trade – Latin America) pour l’Amérique latine, COFTA (Cooperation for Fair Trade in Africa) pour l’Afrique et AFTF (Asia Fair Trade Forum) pour l’Asie.
Désormais, le commerce équitable local s’instaure également en Europe. Depuis quelques années, faisant face à la crise agricole, des petit·es producteur·rices français·es en extrême difficulté ou ayant fait le choix d’une production non productiviste, adhèrent au mouvement équitable. Des logos comme Faire France, Paysans d’ici, Biopartenaire… permettent d’identifier ces produits. Et les consommateur·rices répondent favorablement à ce type de produits distribués en circuit court. Il suffit de voir l’intérêt provoqué par les AMAP (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne), les Jardins de Cocagne et les ventes directes effectuées par le·la producteur·rice sur les marchés.
L’engagement des collectivités locales
Des collectivités locales se sont engagées à développer le commerce équitable sur leur territoire. En tant que bailleurs de fonds, elles peuvent appuyer les associations dans leurs efforts d’éducation et de sensibilisation au commerce équitable. Elles sont également acheteuses de produits issus du commerce équitable dans le cadre des cantines scolaires ou de l’organisation de fêtes et événements. Le code des marchés publics, en 2014, a introduit la notion de durabilité dans les procédures de passation de marché. Les labels de développement durable privés sont reconnus comme conformes aux exigences sociales et environnementales. La prise en compte des critères du commerce équitable est donc devenue juridiquement possible lors de commandes publiques, dont celles de la restauration collective. Et un décret d’application de la loi Agriculture et Alimentation (Egalim, 2018) impose plus de produits bio, équitables et locaux dans la restauration collective.
Pour renforcer cette opportunité, le mouvement équitable a lancé depuis 2012 une campagne internationale Fair Trade Towns, déclinée en France sous le nom de Territoires de commerce équitable, qui attribue ce label aux collectivités, quelle que soit leur taille, qui remplissent un certain nombre de conditions. Ce label participe à la « transformation de la consommation des habitants d’un territoire en mobilisant des actions de sensibilisation du grand public, des entreprises et des commerçants ».
Cette campagne est un succès et des rencontres internationales sont organisées chaque année. Avec le label Territoire de commerce équitable, les collectivités affichent et partagent ainsi concrètement leurs choix en matière d’achats responsables, tout en contribuant au développement et à l’autonomisation des petit·es producteur·rices des pays du Sud. Elles s’inscrivent dans un réseau international de 2 000 collectivités dans 37 pays dans le monde, qui imaginent et développent de nouvelles formes de collaborations, aussi bien sur leurs territoires que dans les zones de production. En France, 27 collectivités territoriales sont d’ores et déjà labellisées « Territoire de commerce équitable » (dont Paris, Lyon, Nantes…) et plus d’une centaine sont actuellement en attente de l’être.