Commerce équitable : une démarche durable

Des consommateur·rices sympathisant·es… mais des achats faibles

, par CDTM de Paris

En 2018, en France, les ventes totales de produits équitables (filières internationales et filières françaises) ont progressé de 22 % par rapport à l’année précédente avec un chiffre d’affaires global de 1,276 milliard d’euros [1]. Les produits issus des filières françaises ont fortement augmenté et représentent désormais le tiers des ventes totales. Les produits équitables se vendent en grandes et moyennes surfaces (49 %), en magasins bio et de commerce équitable (25 %), en consommation hors domicile (24 %), en vente en ligne, boulangerie (2 %)...

Cependant le panier moyen de produits équitables, même s’il a triplé depuis 2013, reste faible, inférieur à 20 € par consommateur·rice et par an. Les consommateur·rices ont encore à traduire leur sympathie en actes d’achat.

Une mutation rapide des consommateur·rices

Depuis quelques années, de plus en plus de consommateur·rices ont pris conscience de l’importance de leur choix d’achat. Ils et elles ne veulent plus adhérer à un système qui lamine les producteur·trices et abîme la planète. Ils et elles prennent conscience de leur poids pour faire évoluer l’économie. Ils et elles souhaitent être acteur·rices de leur consommation et acheter en toute connaissance des produits aux qualités éthiques. D’après le sondage de Max Havelaar [2] auprès des Français·es, 91 % des Français·es sont d’accord avec l’idée selon laquelle une meilleure rémunération des producteur·rices et agriculteur·rices conduit à plus de durabilité.

Ce sondage montre aussi que les préoccupations des acheteur·ses se tournent désormais vers le bio, les produits responsables, le local, la restriction des emballages et du gaspillage. Les produits locaux sont les plus plébiscités. Deux tiers des Français·es consomment un produit bio ou responsable ou local au moins une fois par semaine. Il faut aussi remarquer que le soutien aux agriculteur·rices est une préoccupation qui devance légèrement la santé des consommateur·rices. 86 % des Français·es pensent qu’il est possible de concilier le respect des agriculteur·rices et un modèle économique rentable. Le prix des produits responsables constitue le frein principal à l’achat, devant la méfiance quant au respect des engagements et l’indisponibilité sur les lieux de vente de certains produits en gammes responsables.

Le prix, un frein à l’achat des produits responsables

Le consentement à payer un produit plus cher est d’autant plus difficile que, depuis des dizaines d’années, les prix bas ont structuré toute la consommation. Or la réalité est que des prix bas créent une spirale infernale qui dérègle le marché et entraîne surconsommation et gaspillage. Pour maintenir les prix bas, les industriel·les et les distributeur·rices ont mis en place des stratégies néfastes en reportant les coûts « cachés » (pauvreté des producteur·rices, dégradation environnementale) sur l’ensemble de la société. Il faut mettre alors en place des aides sociales pour compenser les revenus trop faibles, il faut réparer, à grands frais, les dégâts environnementaux, il faut gérer les migrations… Tous ces coûts « cachés » sont payés par les impôts, la sécurité sociale, les aides sociales…

Accès à une alimentation à haute valeur éthique pour tou·tes

Les consommateur·rices au pouvoir d’achat faible ne peuvent privilégier les produits équitables plus chers que les produits ordinaires de consommation courante. Mais on vend à bas prix des produits de mauvaise qualité et dont les impacts sont néfastes et coûtent cher. Alors pourquoi ne pas soutenir une alimentation à haute valeur sociale et environnementale et démocratiser l’accès aux produits équitables ? Des solutions pourraient être trouvées : une TVA à taux réduit, l’interdiction de sur-marges de la distribution pour ces produits, la montée en gamme de produits de qualité dans les restaurations collectives…

Changer d’échelle

Pour que les ventes de produits équitables changent d’échelle, il est indispensable de mettre en place une pédagogie active auprès des consommateur·rices, partout où ils et elles se trouvent, pour qu’ils et elles intègrent l’importance du choix de produits « bons pour les gens, bons pour la planète ». Il s’agit d’un changement radical dans la façon de consommer.
Nous ne sommes qu’au début de cette transformation dans les pratiques d’achat. À eux·elles seul·es, les consommateur·rices ne suffiront pas pour changer la situation. Il faut une implication collective de tous les acteur·rices : entreprises et pouvoirs publics.

Des outils pour décrypter les étiquettes

Pour faciliter le choix des consommateur·rices, des sites Internet et des applications mobiles indiquent les qualités sociales, environnementales, nutritives d’un produit à partir de son code barre. On peut citer MyLabel qui appuie ses évaluations sur des sources associatives, non gouvernementales et institutionnelles. MyLabel a le statut d’Économie sociale et solidaire et l’agrément d’Entreprise solidaire d’utilité sociale (ESUS) « pour le bien commun ». Ces applications sont très utiles pour accompagner les consommateur·rices dans leurs achats mais aussi pour les entreprises qui y sont attentives pour faire évoluer les produits qu’elles mettent en vente.