Le 23 mars 2020, pour faire face à la pandémie de la Covid-19, le gouvernement français déclare, pour la première fois, l’état d’urgence sanitaire. Suivront deux périodes de confinement, une seconde période d’état d’urgence sanitaire et deux régimes transitoires de sortie (le second étant actuellement en vigueur jusqu’au 15 novembre 2021). Dans ce laps de temps où la gouvernance par ordonnances, décrets et arrêtés a prévalu, la gestion verticale et parfois chaotique de la pandémie par l’exécutif français a engendré de nombreuses atteintes aux libertés et droits fondamentaux marquant un net recul de l’État de droit constatent les observateurs et défenseurs des droits.
Ce rapport fait aussi l’état des lieux de la mobilisation des défenseurs des droits dans cette période inédite, des obstacles rencontrés et des méthodes employées pour défendre les libertés des citoyen·ne·s et alerter sur les risques de dérive. Les associations et citoyen·ne·s solidaires ont également fait preuve d’une mobilisation remarquable depuis le début de cette période, s’organisant pour accompagner les personnes les plus vulnérables face à cette situation (personnes sans abri, exilé·e·s, détenu·e·s, etc), souvent pour pallier aux manquements de l’État.
Les acteur·ice·s de la société civile ont su mobiliser le droit de manière victorieuse pour lutter contre les mesures excessives décidées par le gouvernement. Le Conseil d’État a par exemple censuré les mesures prises concernant le droit de manifester sur la voie publique en juillet 2020 et des dispositions permettant la prolongation automatique des détentions provisoires et le recours à des moyens de télécommunication lors des audiences.
Les constats présentés dans ce rapport laissent craindre que ces « mesures d’exception » prises dans un contexte sanitaire particulier soient transposées dans le droit commun à l’instar du précédent état d’urgence, décidé après les attaques terroristes de novembre 2015. Les spécialistes du droit s’alarment de voir que l’exécutif s’octroie des pouvoirs exorbitants, tandis que les mécanismes de contrôles parlementaire et juridictionnel ont échoué à maintenir un juste équilibre entre gestion de la crise et protection de l’État de droit.
La pandémie du Covid19, tout comme l’état d’urgence sanitaire, ne sont pas terminés ; une nouvelle loi est en préparation pour prolonger certaines dispositions au-delà du 15 novembre 2021.
La société civile compte maintenir sa vigilance quant à leurs impacts sur les libertés et droits fondamentaux. Sur la période 2019-2021, l’inflation législative sécuritaire (loi « sécurité globale », loi « séparatisme », loi sur le renseignement et le terrorisme) a participé à la fois d’un renforcement de l’exécutif et d’une réduction de l’espace démocratique français dont se sont alarmés avant l’été 2021 plusieurs prix Nobel et personnalités internationales.