Mexique : Plus de 20 morts et des centaines de déplacés à Chicomuselo (Chiapas)

, par DIAL , MARISCAL Ángeles

Si le Chiapas a été associé ces dernières semaines aux déclarations et rassemblements organisés par l’Armée zapatiste de libération nationale à l’occasion de son trentième anniversaire, d’autres événements, beaucoup moins réjouissants, ont aussi eu lieu dans la zone montagneuse de l’État. Article d’Ángeles Mariscal publié dans Chiapas paralelo le 8 janvier 2024.

Des policiers colombiens fouillent un homme, à la recherche de drogue.
Crédit : Mussi Katz (CC0 1.0)

Le 4 janvier dernier, aux environs de 11 h 30 du matin, se sont affrontés des membres du cartel de Jalisco Nueva Generación (CJNG) et de celui de Sinaloa (CDS), dans l’ejido de Nueva Morelia, situé dans la commune de Chicomuselo, dans la zone montagneuse du Chiapas. Selon les témoignages des populations qui ont dû fuir pour sauver leur vie, plus de 20 personnes sont mortes, deux d’entre elles habitaient cette communauté et n’avaient aucun rapport avec les groupes criminels.

Chicomuselo a été, depuis plus de deux ans, une des zones que se disputent les deux cartels de la drogue, qui se disputent aussi le trafic des personnes et, au cours des derniers mois, l’extraction illégale de minéraux, réalisée par le biais du travail forcé, dans l’ejido de Nueva Morelia.

Des habitants de cette région ont dénoncé cette situation par l’intermédiaire d’organisations sociales, et exigé l’intervention de l’armée et de membres de la Garde nationale installés dans la caserne inaugurée dans cette commune en 2018 par le général Salvador Cienfuegos.

Pourtant le harcèlement, le recrutement forcé, les déplacements et les disparitions que subissent les populations n’ont cessé d’augmenter.

« Nous voulons que cela cesse une fois pour toutes, de nombreux innocents sont en train de mourir. Les gens ont fui se cacher dans les montagnes, dans ces montagnes il fait froid […] ; Les échanges de tirs ont eu lieu à trois endroits, il y a de nombreux morts. La situation a empiré car ils veulent que les gens se rassemblent à des endroits donnés, c’est pour ça que les gens ont préféré se réfugier dans les montagnes », ont dénoncé des habitants le 4 janvier.

Depuis le matin de ce jour-là des centaines de familles ont abandonné leur domicile. Certaines d’entre elles ont filmé, cachées dans des fourrés, les tirs ininterrompus des derniers jours. Les personnes qui sont parvenues à rejoindre des communautés où elles se sont senties plus en sécurité ont dénoncé à nouveau la situation qu’elles vivent, comme elles le font depuis plus de deux ans.

Elles ont expliqué que l’affrontement du 4 janvier a duré plus de sept heures, « la population affolée, paniquée, s’est protégée comme elle a pu pour rester en vie, alors que les balles traversaient les cloisons de bois de nombreuses maisons », ont-elles expliqué dans des messages diffusés par l’intermédiaire d’organisations sociales.

« Il y a eu plus de 20 personnes tuées, dont deux civils assassinés ; les familles n’ont pas pu recueillir les corps car les communautés sont séquestrées et personne n’ose sortir de peur d’être accusé de faire partie des groupes criminels », ont-il expliqué.

Dans un communiqué diffusé par des organisations sociales la nuit du dimanche 7 janvier, trois jours après les affrontements, les familles ont pu rejoindre les communautés où elles ont fait appel à des organisations humanitaires pour les aider.

Elles ont expliqué que des militaires qui se trouvaient sur la zone se sont retirés de la région quand les affrontements ont commencé. « En tant que société civile, nous constatons que l’armée comme la Garde nationale et la police de l’État ne remplissent pas leur fonction de garantir la paix et la sécurité du peuple qui l’a tant de fois exigé. Le CJNG séquestre toujours le bourg principal avec des barrages, des camions renversés qui obstruent les routes, des installations de guérites de surveillance et de contrôle de la population ».

« En tant que citoyens nous nous interrogeons : pourquoi l’armée, la Garde nationale, et la police de l’État n’agissent-elles pas ? Qu’attendent-elles pour démanteler et désarmer ces groupes criminels qui utilisent les gens comme barrière humaine ? »

Elles ont demandé que les autorités « viennent voir ce qui se passe dans notre village, pour qu’elles puissent vivre ce que nous vivons, la peur, la terreur, l’indignation et l’impuissance face à tant de violence […] ; nous vivons dans l’angoisse, nous vivons sous la menace de ce qu’à tout moment ils pénètrent dans nos communautés et dans le bourg principal pour s’affronter ».

La population de la zone a lancé un appel à la solidarité internationale pour faire connaître ce qui se passe au Chiapas, « on nous tue, on nous force à quitter nos foyers et d’autres sont obligés de rejoindre leurs rangs », ont-ils expliqué.

Ils racontent que la communauté Nueva Morelia est maintenant à moitié vide. Peu de personnes ont choisi de rester. C’est la même chose dans les communautés voisines du 20 de Noviembre et Galicia.

Chicomuselo est une commune voisine de Frontera Comalpa, qui vit la même situation, tout comme La Grandeza, Bellavista, Siltepec, Maravilla, Tenejapa, entre autres.

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