Impact des nouvelles technologies sur les migrant·es
La technologie numérique joue un rôle de plus en plus important tout au long du parcours de migration, elle peut se révéler une aide précieuse pour obtenir des informations et des conseils en temps réel. Un téléphone avec ses applications (WhatsApp, Viber, Skype, un GPS… ) est devenu un bien essentiel sur les routes de l’exil. Il existe aussi des applications qui facilitent l’intégration dans le pays d’arrivée ou qui permettent de maintenir des liens sociaux et financiers avec la famille restée au pays.
Mais ces applications présentent des inconvénients… elles peuvent être des outils d’extraction de données qui seront utilisées pour la surveillance et le contrôle tout au long du parcours par les garde-frontières, la police, les autorités chargées de l’asile et de plus en plus par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) ou l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).
À noter une autre conséquence des technologies numériques qui, si elles ont largement modifié l’accès à l’information et les possibilités d’expression, permettent aussi de manipuler l’information et de coordonner des campagnes néfastes. On constate une montée en flèche des activités de l’extrême droite qui présente les « réfugié·es » en termes xénophobes et prétend qu’iels constituent une menace pour la sécurité, l’économie et la culture de l’Europe.
Les avancées technologiques, telles que l’intelligence artificielle ou la reconnaissance faciale supposées protéger les personnes en exil ou renforcer leur autonomie, se révèlent aussi être un moyen de traçage et de contrôle des frontières. La mission « analyse des risques » de Frontex qui a pour objectif de renforcer la surveillance et de comprendre les stratégies de passage de frontières est fondée sur ces renseignements. À leur arrivée en Europe, les migrant·es sont immédiatement enregistré·es dans des fichiers tels que Eurodac, le Système d’information Schengen et le Système d’informations des visas. Leurs données biométriques sont fichées et tous leurs déplacements au sein de l’Europe peuvent alors être surveillés.
Cette « frontière intelligente » permet ainsi de tester des techniques de maintien de l’ordre mais aussi d’expérimenter des technologies de pointe : radars en tous genres, détecteurs sensoriels, détecteurs sismiques, détecteurs de CO2, détecteurs de battements de cœur, caméras, drones aériens... Tous ces matériels sophistiqués viennent s’ajouter aux équipements militaires de Frontex.
Depuis quelques années, les frontières deviennent un marché florissant, offrant d’amples opportunités de profits pour le secteur privé.
Le budget de l’agence de protection des frontières européennes a atteint le record de 5,6 milliards d’euros pour la période 2021-2027. Une large partie de cette manne passe dans des contrats de fourniture d’équipements et de prestations avec des industriels, majoritairement du secteur de la défense et de la sécurité.
Migration due au changement climatique
Depuis toujours, la migration est un moyen pour s’adapter aux dérèglements du climat. Mais ces dernières décennies, les effets de l’activité humaine ont provoqué la multiplication d’événements climatiques extrêmes qui ont forcé des millions de personnes à tout laisser derrière elles. D’après le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), depuis 2008, une moyenne de 21,5 millions de personnes ont été déplacées chaque année à cause de catastrophes telles que des inondations, des tempêtes, des incendies ou des fortes températures. Il s’agit essentiellement de déplacements internes ou régionaux qui touchent en priorité les populations les plus pauvres et contribuent à l’urbanisation galopante.
Le statut de « réfugié·e climatique » : un vide juridique
À ces menaces soudaines, responsables de déplacements immédiats mais aussi de famines, de conflits ou de violences, viennent s’ajouter des menaces d’effets à long terme aux conséquences tout aussi catastrophiques telles que sécheresse, désertification ou montée du niveau de la mer.
Toutes les prévisions indiquent qu’en l’absence d’action urgente en faveur du climat la situation risque d’empirer fortement et le nombre de « réfugié·es climatiques » pourrait atteindre 260 millions de personnes en 2030. Pourtant le statut de réfugié·e climatique n’existe dans aucun accord international. La convention de Genève accorde le droit à la protection à toute personne en danger du fait de sa « race », de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques mais les déplacements liés aux dérèglements climatiques ne sont pas pris en compte.
Il existe cependant des initiatives régionales comme la Convention de Kampala, adoptée par l’Union africaine en 2009 qui intègre le cas des déplacé·es internes à la suite de catastrophes liées aux changements climatiques. Quant au Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières (PMMSOR), adopté le 19 décembre 2018 par l’Assemblée générale des Nations unies, il propose des recommandations sur les moyens de pallier le manque de protection juridique des personnes déplacées en raison des changements climatiques, mais il se limite à un accord non contraignant pour les États et n’instaure aucun droit reconnu.