Mariages blancs ou gris : une vision bien trop noire
Un mariage blanc, aussi appelé mariage de complaisance, est un mariage contracté dans d’autres buts que la vie commune, notamment dans l’objectif d’obtenir un permis de séjour ou la nationalité française. L’expression de « mariage gris », utilisée depuis une dizaine d’années, désigne la situation où le(a) futur(e) époux(se) séduit son partenaire uniquement dans le but d’obtenir des papiers. Dans ce cas, le partenaire, de bonne foi dans sa démarche d’engagement, est abusé par son conjoint(e) et cela se termine souvent par une annulation de mariage ou un divorce précoce.
Les fraudes existent mais elles sont tout à fait minimes, les mariages frauduleux annulés ne représentant que 0,45 % du total des mariages mixtes [1]. Il existe déjà un arsenal répressif pour ce type de fraudes : ceux qui contractent des mariages blancs risquent 5 ans de prison et 15 000 euros d’amende.
Se marier ne rime pas d’emblée avec « papiers » !
Dans ce contexte de suspicion vis-à-vis des fraudes aux mariages, les couples mixtes qui souhaitent se marier entament un vrai parcours du combattant. Soumis à des contrôles de plus en plus stricts, ils doivent répondre à des questionnaires très détaillés qui testent la connaissance mutuelle du couple. S’ils obtiennent de bonnes réponses, un « certificat de capacité à mariage » leur est délivré. Des interrogatoires sont également menés auprès de leurs voisin, de leurs employeurs, des commerçants du quartier. Les maires ont également droit d’auditionner les futurs époux et peuvent refuser de célébrer le mariage s’ils soupçonnent un mariage blanc. Si l’union est célébrée à l’étranger, le consul peut lui aussi demander une enquête. La demande de transcription dans les registres de l’État civil peut encore être l’occasion d’un contrôle et de délais interminables (jusqu’à un an et demi).
Mais la suspicion ne s’arrête pas là : pendant les quatre premières années de leur mariage, les couples mixtes peuvent encore faire l’objet d’enquêtes administratives ou policières pour vérifier la réalité de leur vie commune. En cas de divorce ou en cas de décès du conjoint français, la carte de résident est retirée au conjoint étranger.
Le droit de vivre ensemble menacé
Par ailleurs, les étrangers conjoints de Français ont beaucoup de mal à obtenir un titre de séjour. Depuis 2006, ils n’ont plus droit automatiquement à une carte de résident. Après trois ans de mariage, ils peuvent la demander, sans garantie de l’obtenir.
Les conditions suivantes leur sont imposées : n’avoir jamais rompu la communauté de vie de leur couple, être entré en France avec un visa long séjour (si ce n’est pas le cas, il faut alors repartir dans le pays d’origine pour le demander…) et prouver sa « bonne intégration » à la société française. Pour les couples mixtes qui ne sont pas mariés, les espoirs de pouvoir vivre ensemble sont encore plus réduits : ils sont obligés de vivre cachés, avec la peur d’une expulsion du jour au lendemain. En effet, Les futurs père ou mères d’enfant français ne sont pas à l’abri d’une expulsion, tant que l’enfant n’est pas né.
La précarité du droit au séjour concerne presque tous les couples mixtes. Elle est extrêmement traumatisante pour eux. Comment justifier et accepter que dans une démocratie, on puisse intervenir dans les histoires privées des personnes, les empêcher de vivre leur histoire d’amour et de construire une famille ?