Énergie et eau : un modèle énergétique alternatif pour l’Équateur

La concrétisation difficile de la Constitution

, par EcoPortal

Une constitution ne fait pas une société. Sa seule adoption ne garantie pas son application et son respect. Une constitution, au-delà de son indubitable valeur juridique, doit être un projet politique de vie commune et être élaborée ainsi que mise en vigueur avec la participation active de tous les citoyens. De ce point de vue, la Constitution de Montecristi représente un moyen et même une fin pour entamer des changements structurels. Dans ce contexte, l’eau constitue un élément prépondérant.

Si l’eau a été un thème polémique lors de l’Assemblée Constituante de 2007 et de 2008, la mise en pratique des principes constitutionnels correspondants s’est également révélée complexe.

Pour commencer, elle n’a pas respecté la 26e disposition transitoire de la Constitution qui imposait de réaliser un audit intégral des délégations pour l’eau et l’assainissement dans les entreprises privées. La première disposition transitoire, qui fixait un délai d’un an après l’entrée en vigueur de la Constitution (en octobre 2009) afin de dresser, entre autres, la loi sur les ressources hydriques, n’a pas été appliquée non plus. Au sujet de ces éléments qui n’ont pas été réalisés, la révision de la situation de l’accès à l’eau d’irrigation s’y ajoute également. Comme le stipule la 27e disposition transitoire, cette tâche avait pour objectif de réorganiser l’attribution des concessions, d’éviter les abus et les inégalités des prix d’utilisation ainsi que de garantir une distribution et un accès plus équitable à l’eau, en particulier pour les petits et moyens producteurs agricoles. L’exécutif devait faire appliquer cette disposition dans un délai de deux ans après l’entrée en vigueur de la Constitution de Montecristi en octobre 2008.

La dispute à propos de l’eau continue donc. Suite à l’application des lois sur l’industrie minière et la souveraineté alimentaire, qui présentent plusieurs contradictions avec les normes constitutionnelles en vigueur, la discussion du projet de loi sur les ressources hydriques s’est terminée en violentes confrontations qui ont même coûté la vie à une personne. Dans ce cas, le gouvernement n’a pas réussi à approuver rapidement la loi sur l’eau, comme il l’avait fait pour ces deux précédentes lois. La résistance populaire, surtout autochtone et paysanne, a obligé le gouvernement ainsi que le mouvement au pouvoir à faire marche arrière. Depuis lors, grâce à des rencontres intermittentes, en particulier à l’Assemblée Nationale, l’élaboration d’un nouveau projet de loi a avancé. Son application a recueilli une partie des aspirations de la société exprimées dans la Constitution, mais n’envisageait pas une indispensable nationalisation et redistribution de l’eau.

Il faudrait noter, par exemple, que parmi toutes ces incohérences, l’agrandissement de la concession d’Interagua, acceptée par le gouvernement du président Correa, représente un non-respect de la Constitution. Le maintien des concessions pour les entreprises qui mettent en bouteille l’eau et les eaux thermales surprend également car il marginalise les communautés qui n’en bénéficient pas.

En définitif, sans nier certaines réussites de la « révolution citoyenne », la « longue nuit néolibérale » semble parfois résister à laisser la place à la lumière d’un jour nouveau. Dans son propre gouvernement ainsi que dans sa législature, la Constitution de Montecristi commençait à être perçue comme une camisole de force inconfortable.

Cette affirmation est illustrée lorsque l’approbation d’une loi fondamentale en faveur d’une profonde et radicale transformation de la société équatorienne, comme l’est la loi sur l’eau, est sujette à toute une série d’entraves encouragées depuis la propre présidence de l’Assemblée Nationale et qui affaiblissent ses chances de mise en vigueur.