L’accès ouvert exclut les scientifiques du monde "en développement"

, par SciDev.Net

La publication en accès ouvert exclut de nombreux chercheur·ses des pays du Sud parce que les systèmes complexes de dispense de frais (paiement pour publier des articles) ne remplissent pas leur mission.

Ce texte est une synthèse d’un article paru en espagnol et en anglais sur le site SciDev.Net

Un modèle qui charge les chercheur·ses de publier leurs travaux dans des revues en libre accès nuit à de nombreux chercheurs des pays en développement.
Crédit : National Institutes of Health, USA (domaine public)

Promu par les bailleurs de fonds comme moyen de donner au plus grand nombre l’accès à la recherche scientifique, en permettant une lecture gratuite, le système d’accès ouvert facture aux auteur·rices la publication de leurs travaux, ce qui, pour de nombreux chercheur·ses de pays du Sud qui ne disposent pas d’une bourse ou d’une institution pour couvrir les frais, peut les exclure des meilleures revues académiques.

Le coût de publication d’un article demandé par les éditeur·rices scientifiques peut être plusieurs fois supérieur au salaire d’un·e chercheur·se. À titre d’exemple, dans le cadre du système d’accès ouvert, le coût initial pour soumettre à l’évaluation éditoriale un article à Nature est de 2690 $ US, alors que le salaire d’un·e chercheur·se doctorant·e au Cameroun est estimé à un peu plus de 350 $ US.
Le dilemme revient à publier soit dans des revues prestigieuses qui facturent des frais exorbitants, soit dans des revues moins cotées avec peu ou pas de frais, mais avec une longue attente de réponses, ce qui retarde la publication et accroît le fossé entre pays du Nord et pays du Sud dans les publications scientifiques.
Le modèle d’accès ouvert constitue une double peine pour ces scientifiques : la première fois, ils et elles sont pénalisé·es parce qu’il n’y a pas d’argent pour financer leurs recherches, la seconde, parce que même une fois parvenu·es à faire leurs recherches, on leur demande de payer pour publier un article.

De nombreuses revues ont un système d’exemption pour les scientifiques des pays du Sud, mais trop difficile d’accès et/ou par manque de clarté sur son fonctionnement, ce système de dérogation est largement sous-utilisé.

Un modèle à repenser

En l’absence des coûts d’impression, les coûts de publication en ligne auraient dû baisser. Ce qui n’est pas le cas. Le marché des publications scientifiques génère des revenus de plus de 25 milliards de dollars (selon un rapport de 2018 de l’Association internationale des éditeurs scientifiques). Un marché détenu pour une part importante par certains grands éditeurs scientifiques qui gagnent sur deux tableaux en faisant payer les auteur·rices et aussi les bibliothèques et universités.

Repenser le modèle économique de l’accès ouvert est en débat depuis des décennies dans la communauté internationale de la recherche, mais de véritables changements ne commenceront à se produire que lorsque les bailleurs de fonds et les institutions le rejoindront.

Lire l’article original sur le site SciDev.Net