Cet article fait partie d’un dossier intitulé Il n’y a pas que le changement climatique : mobilité, vulnérabilité et transformations socio-économiques dans les zones écologiquement fragiles de Bolivie, du Sénégal et de Tanzanie, initialement été publié en anglais, et traduit par Anne le Meur, traductrice bénévole pour rinoceros.
Depuis longtemps, traiter la question de la migration est un objectif pour ceux qui font les politiques, mais sans réel succès, que ce soient les tentatives de promouvoir ou, le plus souvent, de limiter les mouvements de population. Ce document met en évidence une approche différente, en mettant l’accent sur les causes et notamment sur les impacts de la migration sur la résilience des individus, des ménages et des communautés face à la dégradation de l’environnement liée au changement climatique.
Les études de cas montrent que même dans le contexte d’un changement climatique graduel, il est possible d’identifier des événements déclencheurs, telles les sécheresses sévères inhabituelles, qui sont des points critiques à partir desquels les moyens de subsistance doivent changer radicalement afin de garantir la survie des populations. De manière toute aussi importante, c’est en grande partie le contexte socio-économique qui rend ces événements si catastrophiques, en empêchant notamment les personnes de pouvoir s’appuyer sur des stratégies solides de diversification locale des activités, que ce soit dans le secteur agricole ou dans le secteur non agricole. Il s’agit d’un indicateur clair pour les politiques visant à soutenir l’adaptation au changement climatique du besoin d’aborder aussi bien les questions socio-économiques qu’environnementales.
Le second point important qui émerge de ces études de cas est l’inter-relation forte qui existe entre immigration et émigration, ainsi que la diversité dans la durée, dans les destinations et dans la composition des flux migratoires. Les liens entre la mobilité et les changements socio-économiques et environnementaux sont complexes et dynamiques, et varient selon les lieux. De ce fait, il n’est pas possible d’aborder les effets de la migration, et notamment son potentiel à accroître la polarisation sociale et à accentuer la dégradation environnementale locale, en l’absence de systèmes de gouvernance locale qui soient inclusifs, responsables et pourvus des compétences techniques et des ressources financières nécessaires. Le soutien aux institutions locales et à la société civile est donc un élément qui fait partie intégrale des politiques d’adaptation et de mitigation.
Enfin, alors que la migration et la mobilité sont clairement des éléments importants des stratégies d’adaptation, elles sont aussi pertinentes dans la mitigation, notamment dans le cas des mouvements entre zones rurales et zones urbaines. La concentration de la population à la fois dans les centres urbains de petite ou de grande taille est potentiellement susceptible de réduire la pression sur les ressources naturelles pour des usages domestiques ou productifs . Cependant, pour que cela se réalise, il faut une meilleure planification et régulation, notamment dans les petites villes qui connaissent une expansion rapide. Il est aussi nécessaire de mieux comprendre les impacts environnementaux des différents types d’activités non-agricoles, particulièrement ceux du secteur informel en ville, au niveau local et régional. Lier les initiatives d’adaptation et de migration aux politiques est le prochain défi inévitable pour la coopération en matière de développement.