Déclaration du Rassemblement Mondial de Oilwatch International

"Nous réclamons un Zéro Vrai, pas un Zéro Net"

, par Oilwatch

Les membres du réseau Oilwatch International, des représentant·es des communautés de régions pétrolières, des ONG, des organisations sociales et communautaires (OSC), des universitaires et des médias se sont réunis à Port Harcourt, dans le Rivers State au Nigéria, entre le 19 et le 21 octobre 2021, en présentiel et en distanciel, pour la première édition du Rassemblement mondial de Oilwatch International.

Avec comme thème Demanding Real Zero, Not Net Zero « Nous exigeons un zéro vrai, pas un zéro net », le rassemblement visait à présenter une sortie à l’impasse climatique et à présenter de véritables alternatives pour l’action climatique. Le Rassemblement mondial a porté un regard critique sur les fausses solutions au changement climatique, dont le concept de Zéro Net dont les dirigeant·es internationales·aux, les entreprises et les investisseurs se font le relai à la veille de la COP26.

Les participant·es ont réfléchi à l’échec de la convention-cadre des Nations Unies de la Conférence des partis sur le changement climatique (COP) : au fil des ans, celle-ci est devenue un lieu privilégié pour les négociations et promesses commerciales, et où l’on a soigneusement évité de mettre en place des actions sérieuses malgré la catastrophe climatique flagrante en cours. Au même moment où le monde subit des phénomènes météorologiques extrêmes comme des sécheresses, des feux de forêts, des cyclones, ouragans ou encore inondations, les dirigeant·es internationales·aux se laissent happer par de fausses solutions qui nous enchaînent à la dépendance aux énergies fossiles via des promesses de solutions technologiques de décarbonisation, de gestion des radiations solaires et/ou de compensation carbone.

L’impact de l’exploitation des énergies fossiles sur les droits humains et sur les économies primo-exportatrices (dont l’agriculture, la pêche, et les moyens d’existence), a également fait l’objet de débat.

Les participant·es ont observé que :

  • Les plus grands pollueurs, les plus grands émetteurs de gaz à effet de serre, à l’échelle mondiale, ont continué à se servir de leur influence sur les négociations autour du climat. Ceci a été mis en évidence par le nouveau mantra du Zéro Net, une suite d’algorithmes et de technologies, c’est-à-dire une version augmentée du mythe de la compensation carbone, qui semble encore être le centre de toutes les discussions plutôt que de véritables actions pour le climat dans le cadre de l’Accord de Paris.
  • Zéro Net et les autres fausses solutions permettent aux pollueurs de continuer à polluer et de verrouiller les activités extractives et autres qui alimentent l’industrie des énergies fossiles.
  • Zéro Net efface l’essence même de l’histoire et des responsabilités à réduire les émissions.
  • Les pays et les territoires du Sud Global n’ont pas contribué de façon substantielle au problème, et sont affectés de façon disproportionnée par le changement climatique.
  • L’industrie des énergies fossiles et leurs alliés, les dirigeant·es politiques, cherchent à étendre l’extraction d’énergie fossiles destructrices dans des endroits comme le Bassin de Okavango, en Namibie et au Botswana, dans le delta du Saloum au Sénégal et au Delgado au Mozambique. Pendant ce temps, cette industrie poursuit ses activités polluantes dans le delta du Niger, dans l’Amazonie et ailleurs.

Suite aux intenses débats et discussions, les participant·es au Rassemblement mondial déclarent que :

  • Il faut mettre un terme à la propagation de faux discours comme celui sur les émissions Zéro Net, au moment où le monde à besoin d’émissions Zéro Vrai, la seule solution au changement climatique désastreux.
  • La COP26, à Glasgow (Royaume-Uni) ne devrait pas être l’arène de délibérations sur des notions mensongères comme les « solutions fondées sur la nature », « Zéro Net », « neutralité carbone », « compensation carbone » ; mais plutôt sur des véritables actions qui incluent le fait de garder les énergies fossiles dans le sol.
  • Le recours à des « solutions fondées sur la nature » ne devrait pas être une excuse à l’accaparement des terres et des mers et au déplacement forcé de communautés autochtones.
  • Tous les gouvernements devraient, de toute urgence, revenir à des formes contraignantes de réduction des émissions globales, plutôt que de se tourner vers des pseudo-« contributions déterminées au niveau national » qui, selon les calculs de l’ONU, mènent le monde tout droit vers des augmentations de température calamiteuses, jusqu’à +2,7° au dessus des niveaux pré-industriels.
  • Il ne devrait pas y avoir de nouveaux projets d’expansion ou d’extraction de charbon, pétrole ou gaz, conformément aux rapports scientifiques existants – ce qu’a souligné le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et le Programme des Nations Unies sur l’environnement.
  • L’élimination de l’extraction existante des énergies fossiles est juste et équitable, si l’on prend en compte la dépendance de ces pays aux énergies fossiles et l’importance de transférer les travailleur·ses de l’industrie des énergies fossiles vers des secteurs plus respectueux du social, de l’environnement et du climat.
  • Les participant·es à la COP26 doivent réintroduire la distinction entre les pays compris dans l’Annexe 1 du Protocole de Kyoto, prendre en compte la demande de créer des pays de l’Annexe 0, et prendre en compte le paiement d’une dette écologique aux communautés qui ont été sacrifiées au fil du temps pendant que les entreprises des énergies fossiles amassent des profits teintés de sang.
  • Il faut sécuriser une transition juste et globale pour 100 % d’accès à des énergies renouvelables, sans intérêt privé ni fondement étendu ; qui contribue à la souveraineté énergétique, qui appuie la diversification des économies dépendantes des énergies fossiles, et permet aux peuples et aux communautés, en particulier celles du Sud Global, de s’épanouir.
  • Les communautés devraient jouer un rôle de premier ordre et être entendues dans les négociations de la COP, puisqu’elles sont en première ligne des désastres climatiques qui ont lieu à l’échelle mondiale.
  • Les communautés affectées par l’extraction pétrolière et qui en subissent les conséquences, comme dans le delta du Niger, ou dans l’Amazonie équatorienne, doivent être nettoyées correctement. Les compagnies pétrolières doivent être tenues pour responsables et ne doivent pas continuer à jouir d’une telle impunité.
  • Les entreprises des énergies fossiles et extractives, et leurs gouvernements alliés, qui seraient liées à des violations des droits humains, doivent rendre des comptes. Elles doivent être forcées à désinvestir et à donner des compensations de manière juste aux défenseur·ses de l’environnement, aux activistes du climat et aux communautés qu’elles ont injustement affecté·es.
  • La libération immédiate du personnel de l’Africa Institute for Energy Governance (AFIEGO) – un membre d’Oilwatch International en Ouganda – ainsi que la fin de toute forme de harcèlement des défenseur·ses de la terre, partout dans le monde.

Lire la déclaration en anglais sur le site de Health of Mother Earth Foundation (HOMEf)