Intercoll propose un dossier qui fait le point sur les mouvements sociaux qui secouent l’île caribéenne depuis plusieurs mois, voire plusieurs années.
Le président Jovenel Moise en se maintenant au pouvoir malgré la constitution du pays a déclenché une grave crise politique. Pratiquement tous les corps organisés incluant la magistrature, les organisations religieuses, les professionnels, les mouvements populaires et syndicaux appellent à la résistance. À l’extérieur du pays, les États-Unis et son fidèle allié-subalterne le Canada s’accrochent à la voyoucratie qui sévit dans ce pays depuis une décennie.
L’implosion
Jovenel et son prédécesseur, Michel Martelly, ont à peu près tout détruit, en pillant les revenus de l’État et l’énorme aide vénézuélienne (4 milliards de dollars), dans ce qui est devenu le scandale Petro-Caribe. L’infrastructure reste en ruine depuis le tremblement de terre de 2010, le chômage frappe plus de la moitié de la population, 50 % du pays vit sous le seuil de la pauvreté. Les paysans, fuyant les campagnes, s’accumulent dans les bidonvilles sous la proie des gangs mafieux militarisés, qui agissent en toute impunité. La misère est aggravée par la pandémie, l’écroulement des infrastructures sanitaires, et l’absence d’une aide internationale coordonnée.
La révolte
Tout au long de 2019 et de 2020, les manifestations populaires n’ont cessé de défier ce pouvoir. Les jeunes ont été au premier plan dans la capitale, à partir de collectifs décentralisés qui se coordonnent via les médias sociaux. De puissants mouvements paysans contrôlent des régions surtout dans le nord du pays.
Répression tout azimut
La répression est devenue dans ce contexte la principale forme de la gouvernance. Des massacres de grande envergure, des mitraillages de manifestants non armés et de plus en plus, la terreur des gangs armés agissant sous la protection policière via des kidnappings et des meurtres, tentent de contenir la multitude.
Impasses
Si le semblant d’état subsiste, c’est certainement en bonne partie par la complicité de ladite « communauté internationale ».Un autre facteur et non des moindres est la division de l’opposition. Les formations politiques sont fractionnées entre « modérés » (qui voudraient un départ de Jovenel négocié et dans l’ordre, avec l’appui de certains États étrangers) et « radicaux » qui espèrent un processus de refondation. Les uns comme les autres sont divisés en sous-fraction qui s’imposent souvent par le clientélisme. Cependant, divers processus sont en cours pour réunifier la galaxie de l’opposition au moment où le pouvoir est littéralement dans le ruisseau.