Sri Lanka : chronique d’un conflit meurtrier

Les enjeux stratégiques internationaux au Sri Lanka

, par CITIM

La position stratégique de Sri Lanka est telle que pour certains observateurs, il y a deux conflits sur l’île : celui du peuple de l’Eelam tamoul luttant pour se libérer de l’oppression cingalaise et celui qui voit les acteurs internationaux se bousculer pour le pouvoir et l’influence dans la région de l’océan Indien. En superficie le 3ème du monde, bordé par 47 pays, cet océan est devenu le centre stratégique du 21ème siècle.
Il contient environ 40 % de la production pétrolière mondiale, avec notamment de nouvelles explorations en cours dans le golfe de Mannar, au sud du détroit de Palk. Mais son importance tient surtout à ce qu’il est une voie navigable cruciale, où circulent la moitié des marchandises mondiales conteneurisées, un tiers en vrac et les deux tiers en pétrole. C’est pourquoi les grandes puissances, notamment l’Inde, le Japon, la Chine et les USA ont un tel intérêt à y maintenir leur position de force.

Avec son port de Trincomalee, que l’amiral Nelson avait qualifié de « plus beau du monde », Sri Lanka détient l’une des positions-clés sur cette route maritime.
Ce port naturel de 8 km de diamètre, qui comporte de nombreuses îles, est parfait pour dissimuler des bateaux, y compris des sous-marins nucléaires ; en outre, il abrite plus d’une centaine de réservoirs, qui avaient été construits par les Britanniques, contenant chacun 10 000 tonnes de pétrole. L’armée sri lankaise y a installé sa base en 1967. Ce port situé dans le territoire revendiqué par l’Eelam tamoul a été longtemps le bastion des LTTE.

Pour des raisons d’équilibre géostratégique, l’Inde a armé et entraîné des activistes tamouls, en réponse à la coopération militaire de Sri Lanka avec les Etats-Unis et Israël.

Quant à la Chine, elle a avancé ses pions, au grand dam de l’Inde, dans le domaine de l’industrie pétrolière sri lankaise, participant à la construction du port d’Ampanthota, sur la côte sud.

Pour leur part, les USA possèdent une grosse base militaire, cogérée avec le Royaume-Uni, dans l’île de Diego Garcia, située à proximité de Sri Lanka et des Maldives. Depuis 1951, ils disposent également d’une base à Sri Lanka. L’accord a été renouvelé en 1983, avec l’acquisition d’un territoire de 4 km2 qui leur est totalement réservé et qui est muni d’installations très sophistiquées en matière de captage de l’information.
Le 6 mars 2007, les USA ont signé avec le gouvernement sri lankais un nouvel accord selon lequel leurs navires ont accès quand ils le veulent aux ports sri lankais, en particulier celui de Trincomalee. De nombreux analystes politiques et militaires font remarquer que par cet accord, les USA ont acquis officiellement une nouvelle base. On comprend donc pourquoi les grandes puissances ont tant intérêt à cultiver de bonnes relations avec le gouvernement sri lankais, jusqu’à tolérer quelques violations des droits humains !

Pendant le conflit proprement dit, alors que certains activistes pro-tamouls – pas les LTTE – se formaient en Palestine et au Liban, les USA, et surtout Israël, ont clairement apporté leur soutien aux Cingalais : dès 1983, un accord secret était conclu prévoyant un entraînement des forces de combat sri lankaises par le Mossad, avec initiation à la stratégie de guerre contre-insurrectionnelle. Les Doras, navires de patrouille capables d’attaques très rapides, utilisés par la marine de guerre sri lankaise, ont été fournis par Israël. Ils ont joué un rôle décisif dans la lutte contre les forces maritimes des LTTE.