Les ONG, acteurs incontournables de la Solidarité Internationale ?

Les ONG au travers de l’histoire du mouvement de la solidarité, leurs principes et leurs typologies

, par Bioforce

Les origines des actions solidaires

Les actions solidaires tiennent entre autres leurs origines des ordres caritatifs chrétiens du Vème siècle, où le christianisme devient alors religion d’Etat. Ces actions prétextaient l’aide aux populations les plus démunies pour expliquer l’accroissement de leurs richesses. L’Eglise devint entreprise de charité. A cette époque, les hôpitaux se trouvaient en effet étroitement liés à la religion puisqu’ils furent fondés par l’Église et gérés par des membres du clergé. Ils appartenaient au patrimoine ecclésiastique et furent donc placés sous l’autorité de l’évêque.
On voit se créer de nouveaux ordres spécialisés comme l’Ordre hospitalier de Saint-Jean, de Jérusalem, de Rhodes et de Malte ainsi que des confréries laïques apparaissant dans les grandes cités marchandes pour apporter une aide aux membres des corporations.
Dans la même lignée et avec le développement des villes, des hospices sont fondés par de riches laïcs qui, en plus d’aider, font don de leurs biens. La plus connue est sans doute l’institution des Hospices de Beaune, fondée par le Chancelier Rollin, dont le produit annuel des ventes aux enchères de sa production vinicole est encore aujourd’hui reversé à des œuvres de charité.

Premiers terrains et premières ONG

Dès 1812, on peut commencer à parler d’actions humanitaires d’urgence. Les Etats-Unis, cette année-là, envoyèrent des secours au Venezuela quasiment détruit par un tremblement de terre ainsi qu’en Irlande, pays frappé par la famine. Ces terrains touchés par des catastrophes naturelles laissent place à un terrain de lutte militaire avec les abominations de la guerre d’indépendance grecque (1821-1830). Un mouvement de solidarité, le philhellénisme, naît dans les salons romantiques et envoie des fonds et des vêtements aux insurgés grecs qui luttent contre l’occupant ottoman.

Mais c’est entre 1854 et 1855 que la première ONG voit le jour. Florence Nightingale, riche britannique et infirmière d’une certaine renommée, met sur pied des équipes médicales qui interviendront lors de la guerre de Crimée (1853-1856) puis aux Etats-Unis lors de la guerre de Sécession (1861-1865) ainsi qu’en France, lors de la guerre de 1870.

Quelques années plus tard, Henri Dunant, humaniste et homme d’affaires suisse affligé par les horreurs apportés par la bataille de Solferino du 24 juin 1859, crée une organisation caritative privée symbolisée par une croix rouge qui prendra plus tard l’appellation que nous lui connaissons actuellement.

Les ONG au XXème siècle

La Seconde Guerre Mondiale va accentuer la création de nouveaux organismes caritatifs (par exemple Oxfam UK en 1942 et Care USA en 1945).

Lors de la guerre du Biafra (1967-1970), une lettre ouverte dénonçant le « génocide », ses « camps de la mort » et accusant les délégations françaises et internationales de ne pas avoir agi, alerte l’opinion publique et remet en question le concept de neutralité des ONG. Des membres de la Croix-Rouge décident de créer une organisation médicale d’urgence plus libre de sa parole et de ses actes, le Groupe d’Intervention médico-chirurgical d’urgence (GIMCU). C’est le début des french doctors.

A l’occasion de la crise qui secoue le Bangladesh (1970), un appel auprès des médecins français est lancé, donnant ainsi naissance au Secours Médical Français qui sera rejoint par les membres du GIMCU. C’est la réunion de ces deux groupes de jeunes praticiens qui a donné naissance à MSF.

Les années 80 voient l’émergence d’une nouvelle vague d’ONG avec Action contre la Faim et Aide Médicale Internationale en 1979, Handicap International en 1982.
L’imaginaire social du médecin intervenant sur les terrains de grandes catastrophes vient peu à peu s’enrichir de figures plus modestes. De plus en plus, les médecins et infirmiers se voient rejoints par des bénévoles sans connaissances préalables mais à la volonté sans faille. Ces jeunes bénévoles à l’engagement fort se voient donner le titre de « logisticien » ou plus simplement, d’« homme à tout faire ».

Naissance et vie du terme « ONG »

Le terme « ONG » apparaît officiellement pour la première fois dans l’article 71 du chapitre 10 de la Charte des Nations Unies de 1945, dans une série de dispositions consacrées au Conseil Economique et Social (ECOSOC) et faisait allusion au rôle consultatif que pouvaient avoir des organisations ne faisant pas partie d’un gouvernement. Un demi-siècle plus tard, dans une résolution du 25 juillet 1996, une définition en est donnée par l’ECOSOC. Selon ce dernier, une ONG est « une organisation qui n’a pas été constituée par une entité publique ou par voie d’un accord intergouvernemental, même si elle accepte des membres désignés par les autorités publiques à condition que ceux-ci ne nuisent pas à la liberté d’expression. Ses moyens financiers doivent provenir essentiellement des cotisations de ses affiliés. Toute contribution financière reçue directement d’un gouvernement doit être déclarée à l’Organisation des Nations Unies. ».

En ce début du XXIème siècle, les Organisations Non Gouvernementales (ONG) sont habituellement définies comme des organisations d’intérêts publics qui ne relèvent ni de l’État, ni d’une institution internationale. Ce terme est employé pour des institutions à but non lucratif financées par des fonds privés. Leur relation à l’Etat et aux pouvoirs étant assez ambiguë, il apparait plus logique de faire référence aux ONG avec un terme qui ne met pas directement en jeu ce statut peu ordinaire. On utilise désormais aussi bien l’expression OSI qu’ASI pour Organisation ou Association de la Solidarité Internationale, deux appellations qui semblent mieux convenir au statut des ONG car elles englobent tous les types d’associations qui agissent dans le domaine de la solidarité internationale.

Les ONG sont-elles toutes identiques ?

Le terme ONG englobe des entités différentes en action et en taille. Il n’existe aucune base juridique permettant de classer une association sous le nom d’ONG, il faut donc dans un premier temps pouvoir différencier les ONG des autres acteurs non étatiques internationaux comme les églises, les fédérations sportives ou les fédérations syndicales internationales.

Si l’on prend la taille en considération, on peut distinguer deux familles d’ONG, les très grandes comme Amnesty, Médecins du Monde ou Oxfam, possédant de fortes ressources humaines et budgétaires et les microstructures, souvent locales, ayant peu de moyens et un rayon d’action géographique plus restreint. Ces deux familles interagissent ensemble dans de nombreux projets afin de mutualiser les moyens financiers, humains et les connaissances du secteur local.

Les ONG peuvent également se distinguer par leurs actions, qui découlent le plus souvent de leurs valeurs et principes fondateurs. Dans le paysage de l’humanitaire, on peut rencontrer des ONG apolitiques et areligieuses qui garantissent une neutralité de leurs actions (La Croix Rouge Internationale), mais également des ONG basées sur des valeurs spirituelles (Secours Islamique, Secours catholique). Avant la complexification des crises et des conflits, on pouvait distinguer également quatre grandes familles d’ONG classées par rapport à leurs spécialisations : les humanitaires d’urgence (Médecins sans Frontières ou Médecins du Monde), les environnementalistes (Sortir du Nucléaire), les défenseurs des droits de l’Homme (Amnesty International, ATD Quart Monde) et les « développementalistes » (CCFD-Terre solidaire, Action contre la Faim). Désormais, une grande partie des ONG humanitaires ne se contentent plus d’effectuer des missions ponctuelles durant la phase critique et la période post-crise mais agissent également sur un long laps de temps comme les « développementalistes » avec qui elles partagent des activités semblables. Les ONG des Droits de l’Homme et les environnementalistes partagent également des combats avec les humanitaires et les « développementalistes ».

Essor des ONG du Sud et de l’Est

L’aide d’Etat à Etat, prolifique à la moitié du XXème siècle, tend à laisser la place à une relation construite entre les Etats/bailleurs internationaux et des structures locales. L’essor de la notion de bonne gouvernance et des sociétés civiles dans les pays du Sud et de l’Est a vu l’émergence de ces organismes locaux que l’on nomme le plus souvent ONG du Sud ou de l’Est. Ces structures n’ont pour la plupart aucune activité transnationale et travaillent essentiellement au niveau local. Les grands bailleurs internationaux comme ECHO (Bureau d’Aide humanitaire de la Commission européenne), les Nations Unies ou la Banque mondiale donnent souvent la responsabilité de la réalisation de leurs projets aux ONG du Nord en association avec ces ONG du Sud ou de l’Est.

Les Etats tolèrent l’existence de ces ONG locales sous la condition qu’elles n’aient pas un trop grand pouvoir contestataire car elles pallient localement à l’absence de structures étatiques dans la mise en place d’action d’entraide et de solidarité comme dans les secteurs de l’éducation, de la santé ou du déminage.

Des ONG venant des pays émergents comme la Chine, l’Inde et le Brésil apparaissent sur la scène humanitaire et contrairement aux ONG locales des pays fragiles, elles s’internationalisent. Des ONG brésiliennes se retrouvent ainsi en Angola et des ONG indiennes dans la Corne de l’Afrique. Les ONG du Nord ont des difficultés à accéder à certains terrains, comme par exemple en Inde qui leur refuse l’accès considérant que les ONG locales peuvent effectuer le même travail.