Les ONG, acteurs incontournables de la Solidarité Internationale ?

Quelle indépendance pour les ONG ?

Des enjeux de transparence, autonomie, financement, etc.

, par Bioforce

La question de l’indépendance des ONG est liée à plusieurs facteurs tels que la question du financement, les enjeux de transparence mais aussi leur médiatisation de plus en plus systématique.

Pour mener à bien leurs missions dans le monde entier, les ONG ont besoin d’un important apport de fonds. Ces derniers peuvent être soit publics, soit privés. Mais de plus en plus, principalement pour une question d’autonomie, les ONG privilégient les fonds privés.

Les différents types de financements

Les financements publics peuvent provenir de différentes sources telles que les services de l’Etat, les collectivités territoriales, les gouvernements étrangers et les financements européens et internationaux.
Quant aux financements privés, ces derniers proviennent en grande partie de la générosité du public (dons, collecte de fonds, legs et produits divers), mais aussi des contributions d’entreprises, des grands bailleurs privés ou des rentrées fiscales pour les budgets locaux (droits de douane, TVA, etc.).

Pour mettre en lumière cette problématique, réalisons un focus sur trois d’entre elles, de taille et d’envergure différentes : Amnesty International, Médecins Sans Frontières (MSF) et Solidarités International.

Amnesty International a 74,6% des fonds qui proviennent de la générosité du public. Les 25,4% restants proviennent de fonds propres issus de la vente de produits, des cotisations, des abonnements, etc. Aucune des ressources financières d’Amnesty International n’est donc issue d’institutions. L’indépendance acquise de cette ONG lui permet de dénoncer en toute impartialité les violations des droits de l’Homme dans le monde entier.

MSF est une des ONG les plus connues du grand public et cela se ressent fortement dans la provenance de ses fonds. En effet, pour l’année 2010, 77,4% de ses ressources proviennent de la recherche de fonds, c’est-à-dire de la générosité du public. Seulement 5,5% découlent d’institutions diverses et le reste provient de ressources autres non déterminées. Son indépendance est donc presque totale.

Quant à Solidarités International, 81,5% de ses ressources proviennent de subventions et de concours publics. Celles collectées auprès du public ne comptent que pour 7% pour l’année 2010. Solidarités International dépend donc grandement du financement des institutions publiques telles que the European Community Humanitarian aid Office (ECHO).

La provenance des fonds varie fortement d’une ONG à une autre. Certaines peuvent être financées en grande partie par les dons du public et avoir une autonomie financière plus ou moins importante, selon le pourcentage de ce type de fonds dans leur budget. D’autres, au contraire, choisissent de favoriser les ressources provenant d’institutions et en dépendent donc fortement. Ici, c’est en partie un facteur de taille et d’importance de la structure qui marque la différence, mais aussi un choix de stratégies des organisations.

Plus une ONG sera en possession de fonds propres, plus elle pourra choisir ses terrains d’interventions, même si ces derniers ne sont pas plébiscités par une quelconque institution. Elle n’aura pas à attendre de feu vert pour mettre en place une équipe et partir en mission.

Cependant, la situation est en train d’évoluer. Alors qu’auparavant, les ONG étaient forces de propositions et allaient elles-mêmes à la rencontre des bailleurs, la tendance veut que ce soit maintenant les bailleurs qui aillent vers les ONG par le biais d’appels d’offres.

La transparence financière

De manière générale, les ONG doivent rendre des comptes quant aux fonds dont elles disposent et de la manière dont elles les utilisent. Pour des raisons de transparence, elles doivent expliquer comment ces finances sont réparties et à quelles fins elles sont utilisées. Chaque cas est unique.

Les fonds privés collectés par appel à la générosité du public au niveau national sont contrôlés par la Cour des Comptes. Les subventions publiques nationales et internationales, quant à elles, sont observées par les bailleurs de fonds, les différents corps d’inspection de l’Etat, la Cour des Comptes ou encore la Chambre régionale des Comptes. Et à tous ces contrôles, s’ajoute celui du Commissaire aux comptes. Sa désignation est obligatoire pour la quasi-totalité des ONG en fonction du montant des subventions reçues, du nombre de salariés employés, ou encore du montant des fonds privés collectés.

Mais les ONG doivent être aussi transparentes avec leurs donateurs. En règle générale, il est d’usage de pouvoir trouver facilement sur le site internet de l’institution un état des fonds de l’ONG avec la provenance mais aussi la redistribution entre les différentes activités ou missions en cours à l’association. Dans le cas où ces informations ne seraient pas disponibles, le donateur potentiel est tout à fait en droit de se renseigner auprès de l’ONG elle-même qui doit pouvoir lui fournir ces renseignements dans un délai raisonnable.

Bien entendu, la question de la transparence ne s’arrête pas là. Dans le secteur de la solidarité internationale, il est d’usage de mettre en pratique ce qu’on appelle le don affecté. C’est-à-dire, d’assurer le donateur que la somme qu’il a versée sera bien utilisée pour soutenir les projets de l’association. Et dans le cas où l’ONG n’aurait pas besoin de l’ensemble des fonds collectés, l’association se doit de proposer à ces donateurs, soit un remboursement de leur versement soit l’utilisation de ce dernier pour une autre mission.

Les ONG et les médias

Dans le cas de catastrophes naturelles de l’ampleur du Tsunami ou d’Haïti, l’appel aux dons passe essentiellement par les médias, qui diffusent des images chocs. Les ONG sont alors prises au milieu d’une vague de médiatisation importante qui les place au centre de l’intérêt public. Pour les médias, la médiatisation de ce genre d’évènement leur permet d’augmenter leur audimat tandis que les ONG acquièrent une meilleure visibilité. La médiatisation est aussi un moyen d’augmenter la pression sur les pouvoirs publics et d’influer plus efficacement sur leur prise de décision. Cette collaboration entre ONG et média favorise la mobilisation de la communauté internationale.

Mais cette médiatisation peut être aussi à double tranchant pour les ONG car elle pourrait révéler certaines difficultés organisationnelles ou de gestion comme lors du Tsunami de 2004, où la pertinence des projets mis en place a été remise en cause. Les ONG recevaient tellement d’argent qu’elles mettaient en route de nombreux projets sans suffisamment de réflexions préalables. Cet afflux de fonds leur a aussi causé de nombreuses difficultés d’organisation. Enfin, cette médiatisation peut aussi mettre à jour certaines dérives de l’humanitaire comme lors de l’affaire de l’Arche de Zoé de 2007.

L’évaluation des ONG

Toutes ces questions qui touchent au financement et à la transparence des ONG se regroupent derrière la problématique de l’évaluation des ONG. Comment évaluer des organismes dont il est difficile de donner une définition commune ? Pourtant, il a bien fallu trouver un moyen pour déterminer si l’aide apportée aux victimes de catastrophes naturelles et autres est adéquate ou s’il faut remettre en question la méthode employée. Il ne faut pas oublier que l’évaluation des pratiques humanitaires est un moyen de démontrer l’efficacité, la pertinence et la durabilité de ces dernières.
Les ONG peuvent être évaluées en interne et en externe par un bailleur de fonds ou un organisme habilité (exemples : Cour des comptes, services des impôts, etc.) mais aussi par des structures indépendantes (exemples : Fondation Prometheus, Comité de la Charte...).

Depuis 2005, le Label IDEAS permet une autre évaluation assez complète des ONG. C’est un vecteur de confiance non négligeable pour les donateurs délivré par un comité label indépendant. Ce label atteste d’un bon niveau de conformité de l’organisme au « Guide des Bonnes Pratiques » qui couvre à la fois les champs de la gouvernance, de la gestion financière et de l’efficacité de l’action. L’objectif de ce label est l’optimisation des bonnes pratiques.