La péninsule Argany

Entre l’Egypte et Gaza, le poste-frontière de Rafah entre les mains d’un seul homme

, par inkyfada , MASR Mada

Cette enquête sur le business des passages au poste-frontière de Rafah, entre Gaza et l’Egypte, a été réalisée par le média égyptien Mada Masr. Depuis la publication, la rédactrice-en-cheffe du média a été interrogée et accusée de diffuser des fake news. Pour soutenir Mada Masr et continuer à diffuser l’information au plus grand nombre, inkyfada a traduit et reproduit cette investigation.

Au premier plan, des barbelés s'entremêlent. Au deuxième plan, on voit un mur fait de briques grises.
Mur-frontière entre l’Egypte et Gaza.
Crédit : Rob Pierson (CC BY 2.0)

Au cours des derniers mois, Israël a tué des dizaines de milliers de personnes dans sa guerre contre les Palestiniens. Que ce soit pour la population ou pour l’aide humanitaire, le poste-frontière de Rafah est désormais le seul moyen d’entrer et de sortir de Gaza.

Durant les premières semaines de la guerre, le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a tenu une conférence de presse, appelant à autoriser l’aide dans la bande de Gaza. De son côté, l’État égyptien a appelé célébrités et influenceurs à se rendre dans cette zone. Des militant·es des quatre coins du monde se sont réunis pour organiser un convoi jusqu’au point de passage de Rafah dans l’espoir d’atteindre Gaza, si les autorités égyptiennes le permettent. Leurs efforts ont finalement résulté en un “ report” et à l’expulsion de certains de ces activistes.

Officiellement, l’Egypte - qui est théoriquement censée contrôler le passage entre le Sinaï et Gaza - affirme que le poste-frontière est ouvert. En réalité, il est contrôlé par Israël, qui menace de viser quiconque s’avançant sans son approbation. Et ce ne sont pas des paroles en l’air. Israël a bombardé la zone à plusieurs reprises au début de son offensive sur Gaza.

En dépit de cette impasse, la population et l’aide continuent de passer par Rafah. Et, la manière avec laquelle ces passages se font est un secret de polichinelle.

Dans les coulisses se tient une figure solitaire, à l’intersection des relations économiques, internationales et du pouvoir ; une figure qui, en moins d’une décennie, est passé du statut de fugitif à celui de chef de bataillon tribal, de partenaire de l’armée égyptienne dans sa guerre contre le terrorisme à celui d’homme d’affaires les plus influents d’Egypte : Ibrahim al-Argany.

L’ascension fulgurante de cet homme au cours des dernières années soulève de nombreuses questions, qui ne font que se multiplier depuis l’escalade de la violence contre Gaza. Actuellement, tout ce qui entre et sort de Gaza se fait presque exclusivement par le biais des entreprises d’Argany et par son réseau de connaissances.

Dans un premier temps, le chaos provoqué par l’attaque israélienne sur Gaza a pertubé son emprise sur ce que l’on appelle le business de la “coordination”. Mais cela n’a pas duré longtemps. Au cours des dernières semaines, Argany a repris le contrôle sur les allées et venues à Rafah.

Ces derniers mois, Mada Masr a pu s’entretenir avec des dizaines de sources : 17 Palestinien·nes qui ont tenté de payer les frais de coordination leur permettant de sécuriser leur sortie de Gaza, deux coordinateurs égyptiens, deux chauffeurs travaillant à Hala (une des entreprises d’Argany), une source travaillant au poste frontière de Awja, deux sources du Croissant rouge égyptien et quatre membres de différentes tribues du Sinaï.

Elles nous ont raconté comment Argany a construit son empire, en seulement une décennie, dans un pays où les institutions étatiques sont connues pour leur contrôle sans faille. Ces sources nous ont permis de comprendre comment Argany a obtenu à terme le contrôle de l’unique point de passage vers Gaza, détenant un droit de vie ou de mort sur celles et ceux qui souhaitent se frayer un chemin hors de Gaza qui rend actuellement son dernier souffle sous les bombardements et la famine.

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