Tunisie : une loi contre le racisme, grâce à la mobilisation de la société civile

Une initiative sur la lutte contre les discriminations

, par Agenda de la Solidarité Internationale

Chaque mois, à travers une thématique, l’agenda de la solidarité internationale propose de revenir sur deux initiatives portées par des associations, ONG, citoyen.ne.s, etc. et qui ont porté leur fruit. L’objectif est de comprendre les grands enjeux des problématiques internationales, montrer le pouvoir des mobilisations et donner des envies d’engagement, de manière positive.
Nous vous offrons donc, tout au long de l’année, des extraits de notre agenda. En juillet, la lumière est mise sur la lutte contre les discriminations.

Crédits :Philippe Savoye

Printemps 2018, en Tunisie, c’est le sujet dont tout le monde parle. La reprise du tourisme ? La chute du dinar ? Les élections municipales ? Non, l’arrivée, pour la première fois de l’histoire de la télévision nationale tunisienne, d’un présentateur de la météo noir ! Pour certain·es, c’est anecdotique, pour d’autres, ce n’est que le reflet d’une société où le racisme est encore très présent. Souvent considérées en Tunisie, et plus largement au Maghreb, comme un non sujet, les discriminations sont pourtant réelles et peuvent aller d’injures à, parfois, des cas d’agressions. Grâce à des campagnes d’associations et de citoyen·nes, les politiques ont (enfin !) pris les choses en main.

Il existait en effet un vide juridique en ce qui concerne la question des discriminations, même si la Tunisie a ratifié en 1967 la Convention internationale relative à l’élimination de la discrimination raciale. Une première proposition de loi avait été élaborée par des associations en 2016. Mais ce projet n’a jamais été débattu en plénière et a finalement été abandonné. La question revient à l’ordre du jour en 2018. Un nouveau projet de loi est ainsi adopté en juin 2018, grâce aux mobilisations de la société civile. Cette loi est une véritable première, un début de victoire, une peine de prison entre 6 mois et 3 ans, ainsi qu’une amende de 500 dinars sont en effet prévues dans le texte à l’encontre les personnes tenant des propos ou actes discriminatoires. Une commission nationale pour la lutte contre la discrimination raciale attachée au ministère des droits de l’Homme devrait aussi voir le jour. Au-delà de l’aspect punitif, les organisations espèrent également pouvoir lutter contre le racisme en profondeur, en incluant les principes de tolérance et de différence dans les manuels scolaires et en développant de véritables politiques de sensibilisation au sein des institutions publiques et, plus largement, du grand public. Ces associations vont continuer à se mobiliser pour améliorer cette loi : pour protéger l’ensemble des victimes et pas seulement les Tunisien·nes (notamment les personnes originaires d’Afrique sub-saharienne), et pour y inclure la violence physique, tout en garantissant un meilleur accès à la justice.

En même temps que les lois, les mentalités changent. Le signe d’un autre printemps arabe ?