[Brésil] Les femmes contre le fascisme

, par Vermehlo , DUARTE DE SOUZA Maria Valéria

Dans un contexte de rejet grandissant du candidat d’extrême-droite par l’électorat féminin, un groupe Facebook s’est transformé en camp de retranchement où les femmes exposent les raisons de leur opposition au machisme, à la misogynie et à la violence que représente la ligne politique de ce candidat à la présidence de la République.

Il n’aura fallu que peu de temps avant que les hackers n’envahissent le groupe. En parfaite cohérence avec la posture adoptée par le candidat, la stratégie de ses soutiens fut d’intimider les administrateurs du groupe, y compris, d’après ce que l’on sait, par de nombreux messages de menaces sur Whatsapp. Il fallait s’y attendre. Cette réaction révèle l’inquiétude de ceux qui, jusqu’à présent, se croyaient tous puissants sur le territoire des réseaux sociaux. Dans tous les cas, la création du groupe et ses répercussions sont devenues le symbole d’une résistance qui peut-être ne fait que commencer.

#EleNao (PasLui), cri de rassemblement des femmes contre le candidat d’extrême droite Bolsonaro au Brésil @CPERS Sindicato Portoalegre 29-09-2018 (CC BY-SA 2.0)

Les femmes ont toujours été aux premiers rangs de la résistance aux forces politiques et sociales qui s’entêtent à vouloir faire plonger l’humanité dans les abîmes de la barbarie. Au XXe siècle, la participation des femmes a été à la mesure des grands événements historiques comme, par exemple, avec leur participation à la lutte contre le nazisme et le fascisme pendant la guerre de 1939-1945. Dans ce contexte d’horreur, le rôle des femmes dans l’Armée rouge est devenu légendaire. Cette armée fut la seule, dans les pays participants au conflit, qui autorisait la participation directe des femmes dans des opérations de combat, opérations lors desquelles elles se rendirent célèbres pour leur courage et leur héroïsme. Dans le cadre de la résistance au nazisme et au fascisme, le rôle des femmes dans la France occupée est également entré dans l’Histoire. Que ce soit dans ces événements ou dans d’autres, par le combat armé ou par de nombreuses autres formes silencieuses et anonymes, les femmes ont joué un rôle majeur dans la victoire des forces démocratiques, puisque, quelque soit le type de régime d’oppression, elles sont toujours les premières victimes.

Plus récemment, alors que nous sommes déjà en plein XXIe siècle, les femmes descendent dans les rues des États-Unis pour protester contre les mesures inhumaines de Trump, dont le discours misogyne et raciste présente des similitudes avec le candidat qui, ici, est un sous-produit direct de la vague de haine nourrie par l’obscurantisme depuis les élections de 2014.

Le groupe créé sur Facebook fin août, dont le nombre de membres avait dépassé le million quatre jours après sa création est, sans nul doute, un fait politique important pour barrer la route à un candidat représentant une menace directe contre des droits si durement acquis.

Au Brésil, nous, les femmes, représentons plus de la moitié de l’électorat (52,5 %) et nous pouvons, dans ce contexte de lutte féroce que nous vivons actuellement, peser dans la balance. D’où l’importance de tout élément prouvant de quel côté nous nous trouvons.

Dans les processus électoraux, les femmes font plus attention aux propositions qui concernent directement leurs conditions de vie et celles de leurs proches. Contrairement à ce que de nombreuses personnes pensent, elles ne suivent pas nécessairement le vote de leur compagnon. Ainsi, outre les sorties machistes et irrespectueuses exprimées par le candidat en question vis-à-vis des femmes, le rejet croissant manifesté par ce segment de la population est également dû à l’absence totale de propositions qui symboliseraient un minimum de préoccupation pour les conditions de vie de la population.

Une résistance virtuelle organisée qui exploiterait le vaste champ des réseaux sociaux est nécessaire vu l’impact qu’elle a lorsqu’elle est dirigée dans la bonne direction, comme ce fut le cas avec le groupe de femmes qui a adhéré à l’espace d’un réseau social pour exprimer leur rejet d’une candidature. Le premier objectif, celui de donner une visibilité à cette opposition, a déjà été atteint. Mais l’objectif plus large visant à faire descendre cette opposition dans la rue est, sans aucun doute, un autre défi de grande ampleur.

Maria Valéria Duarte de Souza est assistante sociale diplômée, spécialisée en Planification et Gestion, titulaire d’un Master en sociologie et militante du parti PcdoB dans le District Fédéral (Brasilia).

Voir l’article original en portugais sur le site de Vermelho