« En général, les femmes vietnamiennes ne sont pas respectées. Pas seulement dans le milieu de l’activisme pro-démocratie, mais dans tous les domaines. Dans le milieu militant, les activistes femmes sont désavantagées car elles ne subissent pas moins d’attaques que les activistes hommes. Elles sont, elles aussi, tabassées et agressées. Elles travaillent autant que leurs homologues masculins. Mais ce qu’elles récoltent la plupart du temps, c’est de la pitié. Je ne pense pas que ce soit du respect. »
Elle relate également un incident lors duquel des violences policières ont causé des lésions irréversibles à ses deux jambes.
« Lors d’une manifestation appelant à protéger les arbres et l’environnement à Hanoï, ils m’ont attaquée et m’ont cassé les deux jambes. »
D’autres femmes, dont la blogueuse et défenseure de causes sociales Tran Thi Nga, qui purge actuellement une peine de neuf ans de prison, ont elles aussi subi de graves blessures à la suite d’attaques physiques, souvent perpétrées par des hommes de main.
L’attaque ciblant Tran Thi Nga a été documentée et des clips vidéo la montrant emmenée à l’hôpital sur un brancard, suivie de ses deux jeunes fils, ont été postés sur YouTube.
Selon des informations divulguées par sa famille, Tran Thi Nga subit depuis son arrestation des actes de harcèlement à la fois physiques et psychologiques, et a notamment reçu des menaces de mort et des coups de la part d’une co-détenue.
Malgré les obstacles auxquels font face les défenseures des droits humains, à la fois derrière les barreaux et hors de prison, Pham Doan Trang considère que l’implication des femmes dans l’activisme politique pourrait servir une cause plus grande.
« Dans une dictature, les libertés de tous sont bafouées, mais les femmes sont plus fortement touchées. Les atteintes à leur liberté sont démultipliées par rapport aux hommes. Car les femmes ne sont pas seulement victimes du régime sur un plan politique, elles sont aussi victimes des inégalités de genre ainsi que des limites qu’elles s’imposent elles-mêmes. Les femmes se brident en pensant qu’elles ne sont pas faites pour les carrières politiques. Que la politique est une affaire d’homme.
Ce que nous devons réaliser, c’est que notre combat n’est pas seulement contre la dictature ou pour libérer le Vietnam de la dictature. C’est également un combat visant à nous libérer nous-mêmes des contraintes idéologiques et des préjugés que nous nous imposons encore aujourd’hui. »
Selon la base de données alimentée par The 88 Project, le Vietnam compte actuellement plus de 200 prisonniers de conscience, dont une trentaine de femmes.
Il est fréquent que blogueurs et journalistes soient arrêtés et inculpés pour « activités visant à renverser l’État » ou « propagande anti-État ». Selon Amnesty International, le gouvernement vietnamien mène depuis plusieurs années une répression tambour battant à l’encontre de la liberté d’expression et de l’activisme pacifique.
La photojournaliste Nguyen Dang Minh Man, qui détient le triste record féminin de la plus longue peine de prison purgée, devrait être libérée au début du mois d’août.
Alors que de plus en plus de femmes s’engagent en tant qu’activistes au Vietnam, Pham Doan Trang souligne le potentiel que peuvent représenter les femmes émancipées au sein de la société vietnamienne.
« Lorsque les femmes sont libres, elles peuvent se développer en profondeur, et réaliser à quel point la vie est belle, qu’il y a tant d’options, d’opportunités, tant de choses qu’elles peuvent faire, découvrir et développer afin de contribuer au développement de la société et de l’humanité. »