Côte d’Ivoire : un pays en reconstruction

Une gestion raisonnée des problèmes environnementaux : la forêt, le littoral

, par Bioforce

Photo de jbdodane, 27 août 2013 près de Bouafle Kossou-Dam Yamoussoukro (CC BY-NC 2.0)

Selon la Banque mondiale, la Côte d’Ivoire qui a perdu près d’un tiers de son stock de ressources naturelles depuis 2003 est un des pays les plus vulnérables de la planète (classé 147ème sur 178 en 2018 par la Banque mondiale). Les dégradations du capital naturel, qui voit disparaître de nombreuses forêts et des villages côtiers, peuvent s’expliquer par l’ampleur du changement climatique qui touche de nombreuses régions du littoral atlantique mais également par le manque de vigilance du pays.

Protéger les forêts au détriment des hommes ?

Les forêts ivoiriennes jouent un rôle important au niveau local, régional et mondial. Elles fournissent aux populations du bois et des biens d’origine biologique autres que le bois, participent à la régulation du climat et à la préservation de la biodiversité qui est riche de nombreuses espèces endémiques.
En 1900, la forêt couvrait près de 50 % du territoire ivoirien, en 2018, elle ne couvre plus que 3 % du pays. Durant les périodes de conflit, l’État ne pouvant assurer de contrôle, la déforestation importante et récurrente s’est accentuée : le bois des forêts a été exploité illégalement à des fins commerciales et aussi de manière légale mais sans supervision. De nombreux hectares de surfaces boisées ont été convertis en surfaces agricoles ou en mines artisanales et les braconniers se sont attaqués à la faune sauvage.
La faune, éléphants, panthères, buffles et chimpanzés, mais aussi la flore sont en danger critique. Si la tendance actuelle n’est pas arrêtée, les forêts ne pourront plus remplir leurs fonctions d’écosystème.
Ouattara s’est engagé à restituer 20 % du territoire à la forêt et à préserver la biodiversité.

Il existe huit parcs nationaux sur le territoire ivoirien dont le parc national du Mont Péko, couvrant 34 000 ha à l’Ouest du pays. Durant de nombreuses années, ce parc a été dévasté par des agriculteurs cultivant illégalement du cacao, en profitant du chaos régnant.
En juillet 2016, l’État ivoirien a lancé un grand programme d’expulsion des dizaines de milliers d’exploitants de cacao illégaux et a interdit aux habitants des nombreux villages entourant le parc de travailler dans les champs qu’ils avaient défrichés illégalement.
Les planteurs de cacao expulsés se sont réfugiés dans les villages en bordure du parc. Ils ont parfois doublé le nombre d’habitants des localités, mettant ainsi à mal la sécurité alimentaire et la cohésion sociale de la zone. C’est ainsi qu’en 2016 la ville de Duékoué, passée de 850 à 1 300 habitants, s’est trouvée dans l’impossibilité d’’accueillir à l’école tous les enfants dans de bonnes conditions.
De nombreuses organisations de défense des droits humains, dont Human Rights Watch et le Réseau d’Alerte et d’Intervention pour les Droits de l’Homme (RAIDH), dénoncent les expulsions pratiquées par le gouvernement, contraires au droit international.

Exploitation des enfants

En Côte d’Ivoire, un grand nombre de plantations de cacao se trouve dans des zones reculées et difficiles d’accès. Le fonctionnement de ces plantations échappe au contrôle du gouvernement ivoirien et des multinationales qui achètent les fèves ivoiriennes car il n’existe aucune traçabilité des sacs de récoltes. Cette opacité permet l’exploitation d’enfants qui sont traités en esclave, bien que le travail des enfants soit passible d’une peine de 6 mois d’emprisonnement.
Ces enfants viennent pour la plupart du Burkina Faso, mais également du Mali, du Togo, du centre et du nord de la Côte d’Ivoire. Ils sont vendus par leurs parents pour environ 200 000 CFA, beaucoup pensant qu’ils auront une vie meilleure.
Un million d’enfants pourrait être victime de cette traite ; ils se retrouvent ainsi exposés aux pesticides, aux piqûres d’insectes, aux morsures des serpents, aux blessures de machettes et aux maux de dos. Nourris et logés par les propriétaires des plantations, ils ne sont pas payés et, après des années de quasi esclavage, ils peuvent obtenir un lopin de terre à revendre ou cultiver.

La préservation du littoral et la gestion des déchets

Le littoral de la Côte d’Ivoire s’étend sur plus de 500 km et abrite plus de la moitié de la population du pays. L’augmentation de la production pétrolière et des forages en mer fragilise ce littoral et augmente le risque de marées noires. Les nombreux pétroliers et navires longeant la côte ainsi que le stock grandissant d’hydrocarbures au port d’Abidjan sont susceptibles de provoquer des marées noires qui dévasteraient l’économie nationale touristique, les activités du port d’Abidjan et le secteur de la pêche.
De plus, aucun des deux ports importants du pays, Abidjan et San Pedro, ne possède les infrastructures requises pour traiter les déchets dangereux et les contrôles administratifs sont insuffisants pour empêcher les actes de pollution.
La gestion des déchets d’Abidjan est aussi un problème environnemental, la ville générant 3 000 tonnes par jour de déchets solides qui, pendant la saison des pluies, par faute d’une décharge adaptée, sont emportés vers la lagune d’Ébrié, fortement polluée par des métaux lourds et des pesticides qui contaminent les poissons. Le gouvernement qui souhaite faire d’Abidjan, et plus particulièrement la lagune d’Ébrié, la vitrine de la modernité ivoirienne mène une politique pour transformer la capitale une ville propre en optimisant la gestion des déchets mais la plupart des projets mis en place sont souvent abandonnés faute de financements. Le service de collecte formel n’a pas encore la capacité d’absorber l’augmentation de la production d’ordures ménagères et le gouvernement ne s’est pas encore approprié le travail dynamique du secteur informel qui valorise et recycle les déchets et qui tient donc une place déterminante dans le cycle des déchets ivoiriens. Les activités informelles consistent à récupérer les déchets valorisables, tels que le plastique, le carton, le fer, les bouteilles, le verre et de les revendre à des repreneurs industriels ou sur les marchés. Des agriculteurs cultivent également directement dans les décharges et vendent leurs productions de bananes et de manioc dans les marchés informels. Ces travaux informels peuvent s’avérer dangereux car ces travailleurs de l’ombre ne possèdent pas d’équipements appropriés et respirent directement les émanations de méthane.