Système d’échange local (SEL)

Un système d’échange local (SEL) rassemble des personnes qui échangent entre elles des biens, des services et des savoirs sans avoir recours au système monétaire classique (monnaie nationale). Pour cela, les membres d’un SEL définissent ensemble une unité de compte pour les échanges, qui le plus souvent est basée sur le temps. En cela, le SEL diffère du troc. Cette unité de mesure peut alors s’appeler "sel", « fleur" ou "cailloux", etc. Elle constitue une valeur d’échange et non d’accumulation financière et ne peut donc pas faire l’objet de spéculation, à la manière d’une monnaie complémentaire.
Si ces systèmes d’échange locaux naissent d’une réflexion sur la lutte contre la précarité et la financiarisation des rapports sociaux, ils s’avèrent également être des moyens de retrouver ou de recréer du lien social au travers des échanges, et peuvent ainsi s’inscrire dans le cadre d’expériences alternatives, de nouvelles formes de citoyenneté et d’apprentissage de la démocratie. Dans l’idée d’une économie plus solidaire, ils peuvent également être pensés comme des outils de développement local ou de lutte contre l’exclusion [1].

Exemples

Le sol Violette à Toulouse (France), est aujourd’hui cité comme l’une des expériences les plus probantes au niveau des SEL : http://www.sol-violette.fr/

Historique de la définition et de sa diffusion

C’est au Canada qu’est né le premier SEL (LETS en anglais, pour Local Exchange Trading System) en 1983, à l’initiative de Michael Linton, un écossais qui l’a développé dans la vallée du Comox (Colombie britannique – île de Vancouver) afin de rationaliser les échanges locaux (pratiquée sous forme de troc) de cette région particulièrement touchée par le chômage. Il développe pour cela le « green dollar », utilisé comme unité de compte. Si le système fût abandonné au bout de quelques années, du fait de problèmes de fonctionnement interne entraînant une perte de confiance des adhérents, il a permis en revanche de lancer des expériences similaires en d’autres endroits d’Amérique du Nord.
Selon Maria Puig de la Bellacasa et François Ducat, « C’est rétroactivement, et notamment avec la publication en Angleterre du livre de Guy Dauncey, After the crash : the emergence of the rainbow economy (1988) que l’expérience canadienne s’est inscrite dans la filiation des économies alternatives, qui visent une redéfinition de l’argent mettant l’intérêt égoïste de chacun au service de l’intérêt de la communauté. Dès la fin des années 80, les systèmes LETS commençaient à proliférer en Angleterre, dans des zones où le chômage atteignait des taux record. Et cela, selon une dynamique de réseau : un véritable kit contenant des conseils, des encouragements, des adresses, des échantillons de "chèque", de bilan comptable, de listes de services, et même un logiciel, est mis à disposition de tout groupe débutant, mais chacun à la tâche d’adapter le dispositif aux particularités locales.
La "charte" LETS, qui donne son identité au système, inclut les principes suivants : les participants évaluent eux-mêmes les transactions ; il n’y a pas d’obligation d’accomplir des transactions ; le système LETS tient la comptabilité des échanges en termes de débit et de crédit, évalués selon une "unité de compte" définie localement ; seules ces unités entrent dans la comptabilité, mais un complément monétaire peut être convenu lors d’une transaction, dans le cas notamment où le service entraîne un coût monétaire (essence, achat de matériel...) ; le système central diffuse les offres de service émanant des participants, mais n’est pas responsable de la qualité de ces services, de la compétence de ceux qui les proposent ou de leurs problèmes de taxe et d’impôts ; l’état du compte de chacun peut être communiqué à d’autres, et la situation de tous les comptes peut être périodiquement communiquée à tous. Enfin, et surtout, les comptes en crédit ou en débit ne donnent lieu à aucun intérêt, et les membres ne sont pas tenus à avoir un compte positif pour accéder à un service [2].
Et Wikipédia poursuit : « Le premier SEL moderne de France a été créé en 1994, en Ariège. En 1996, Strasbourg était l’une des premières grandes villes de France à voir naître un SEL. Dix ans après, il y a près de 300 SEL dans 96 départements, de tailles plus ou moins modestes (de deux à quelques centaines de membres) suivant les régions, qui permettent à plus de 20 000 personnes de procéder à des échanges.
On en trouve aussi en Australie, au Japon ou en Amérique latine et bien sûr dans d’autres pays d’Europe : Belgique, Suisse, etc.
Système d’échanges locaux au départ, des réseaux plus vastes se tissent entre "selistes" et il existe aujourd’hui des réseaux interSEL, des routes du SEL, des stages de SEL [3].
Alternatives économiques rappelle enfin que « Les relations entre les SEL et les pouvoirs publics n’ont pas toujours été harmonieuses. Certains SEL, soupçonnés de remettre en cause la législation du travail en dissimulant notamment du travail au noir, ont été poursuivis en justice. Aujourd’hui, les pouvoirs publics sont conscients que les comptes de ces organisations sont transparents et, surtout, qu’ils assument une fonction de prévention de l’exclusion pour des personnes sans emploi. On recensait une cinquantaine de SEL dans les années 1990, ils sont désormais 312, répartis dans toute la France [4] ».

Utilisations et citations

À noter que si la notion a premièrement été désignée en anglais en tant que « Local Exchange Trading System », la référence au commerce (Trade) a ensuite été euphémisée pour se distinguer de la connotation parfois négative qui y est associée. L’appellation « Système d’échange local » (SEL) est alors celle qui s’est imposée et qui est parfois utilisée telle quelle, y compris dans des langues étrangères.

Par ailleurs, selon l’idée que « le lien vaut plus que le bien », il est intéressant de souligner que l’acronyme SEL a cela de commode qu’il vient rappeler l’allégorie de « retrouver le sel de la vie », en tissant de davantage de solidarité les rapports humains.