Révision des lois de bioéthique : Quels changements en vue ?

Par Evelyne Deret

, par Vivagora

Le Parlement entame cette semaine les débats sur la révision des lois de bioéthique de 2004. Après trois ans de consultation, le débat se cristallise sur trois points clés : la filiation, les inégalités d’accès à la procréation assistée et la gestation pour autrui. Doit-on s’attendre à une révision ou à de simples aménagements ?

Quelle filiation pour les enfants nés par procréation assistée ?

Depuis 1994, la loi établit la filiation des enfants nés par assistance médicale à la procréation (AMP) [1]sur le modèle de la filiation charnelle, qui repose sur les liens biologiques de l’enfant à ses parents. Pour certains, cela fausse les repères de l’enfant sur sa propre histoire et déstabilise le droit de la filiation dont le rôle est de permettre à une personne de se repérer et de se situer dans l’histoire des générations et de s’inscrire dans une filiation possible.

Aussi émerge l’idée que l’AMP avec tiers donneur puisse représenter un nouveau mode de procréation, qui justifierait la mise en place d’un type de filiation original, entre filiation charnelle et filiation adoptive. En effet, le recours aux mères porteuses fait émerger de figures familiales nouvelles qui jouent un rôle déterminant dans la genèse d’un enfant. Dans le cas des mères porteuses, il y a la mère d’intention (celle qui désire l’enfant), la gestatrice qui va le porter, voire une troisième femme qui fournira l’ovocyte.

Dans ce contexte, se pose également la question de la levée de l’anonymat du don de gamètes qui voit s’opposer les partisans de la « transparence biologique » au nom de la souffrance de l’enfant à ceux du maintien de l’anonymat pour éviter les dérives connues de l’accouchement sous X. La sociologue Irène Théry [2], défend pour sa part la levée de l’anonymat. Elle pense que la société peut distinguer filiation et procréation et que des « pluriparentalités » existent. Afin que les enfants nés d’un don puissent répondre à leur question : « à qui dois-je d’être né ? », elle suggère à chacun d’assumer « l’existence de deux statuts à la fois différents et complémentaires, celui de donneur d’engendrement et celui de receveur-parent par la filiation ». Lire

Notes

[1L’assistance médicale à la procréation s’entend des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro, le transfert d’embryons et l’insémination artificielle, ainsi que toute technique d’effet équivalent permettant la procréation en dehors du processus naturel.

[2Directrice d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et spécialiste de la famille, dans un récent livre intitulé Des humains comme les autres. Bioéthique, anonymat et genre du don