Précarité énergétique

La précarité énergétique peut être définie comme la difficulté d’un foyer à avoir accès à l’énergie nécessaire pour satisfaire ses besoins fondamentaux. Elle renvoie donc non seulement à l’incapacité à maintenir le foyer dans des conditions adéquates de température à un prix juste comme à la difficulté d’accès aux ressources énergétiques [1].
La précarité énergétique est une situation à caractère multifactoriel, résultant de « l’interaction entre des ménages, leur situation économique et sociale et leur habitat dans ses dimensions économiques et techniques [coût de l’énergie & mauvaise qualité thermique de l’habitat, ndlr] [2] ».

Définition développée

La précarité énergétique est une notion assez récente qui tire son origine du concept de « fuel poverty », issu d’une réflexion des britanniques au cours des années 1970 et défini de la sorte : « Un ménage est considéré en précarité énergétique s’il dépense plus de 10% de son revenu en combustible afin de maintenir un régime de chauffage satisfaisant (21 degrés en moyenne pour la pièce principale et 18 degrés pour les autres pièces) ».
Une première quantification du phénomène peut se faire sur la base du ratio de pauvreté énergétique ou taux d’effort énergétique, correspondant seuil de revenus nécessaire à la satisfaction des besoins [3], soit : coûts des combustibles (ou de l’électricité utilisée pour se chauffer) ÷ revenus [4].
Pourtant, cette méthode est incomplète, puisque certaines personnes, dont le taux est supérieur au seuil des 10%, déclarent avoir souffert du froid pour des raisons financières [5]. En effet, « la question de la définition de la précarité énergétique ne relève donc pas que du débat académique. L’enjeu est plus précisément le suivant, entre :
 une définition précise et mesurable, mais ne permettant pas la mise en œuvre concrète d’instruments d’intervention et de suivi adaptés,
 une définition sociologiquement plus pertinente, mais difficilement mobilisable pour l’action, du moins à travers des dispositifs d’aide dédiés,
 et enfin une caractérisation liée aux instruments de suivi mais laissant de côté toute une série de situations indécises caractéristiques des situations de précarité [6] ».
Et le même rapport de souligner : « […] Parce qu’elle renvoie précisément aux limites de notre système, la définition de la précarité énergétique condamne la collectivité publique à l’incertitude : trop précise ou trop circonscrite, elle comporte le risque de laisser de côté un grand nombre de situations particulières, trop large ou trop floue, elle peine à fonder des dispositifs opérationnels efficaces. Le juste milieu, en la matière n’existe pas [7] ».

La précarité énergétique est ensuite un phénomène comportant des conséquences de plusieurs ordres :
 sanitaire : restriction et privation de chauffage entraîne le développement de maladies respiratoires, favorise la surmortalité hivernale, un inconfort permanent, des comportements dangereux en matière de sécurité ((intoxication au CO, brûlures,…). ;
 financier : impayés, endettement progressif, coupures d’approvisionnement ;
 techniques : humidité, additionné au calfeutrage des aérations, entraîne le développement de moisissure et dégrade à terme l’habitat ;
 sociales : isolement et repli social, sentiment d’injustice, santé psychique (stress lié au froid, fatigue accrue, sentiment d’injustice) et physique (activités statiques difficiles), constituant un frein à la vie sociale et personnelle ;
 environnementales : émissions gaz à effet de serre (recours à des solutions de chauffage inadaptées) [8].

À noter que si les francophones retiennent davantage le terme de « précarité énergétique » pour traduire « fuel / energy poverty », la pauvreté énergétique serait, selon Wikipédia, « un stade ultime de la précarité énergétique [qui] relève d’une difficulté à accéder techniquement pour son logement à des sources d’énergie outre le fait d’avoir des difficultés à les payer [9] ».

Enfin et à plus large échelle, on pourrait étendre la réflexion sur la précarité énergétique en ouvrant sur les questions de sécurité et d’insécurité énergétique, au regard notamment du maintien de la croissance de la demande et de la raréfaction des sources d’énergies (voir « transition énergétique »).

Utilisations et citations

Au niveau Européen, EPEE [10] précise : « La pauvreté énergétique est prise en compte dans les deux directives adoptées le 25 juin 2009 sur le marché intérieur de l’électricité et du gaz, mais n’y est pas définie. Dans la révision en cours de la directive 2002/91/CE sur la performance énergétique des bâtiments, la définition suivante est proposée : « situation dans laquelle un ménage est obligé de dépenser plus du dixième de ses revenus pour régler les factures lui permettant de chauffer son domicile selon une norme acceptable, fondée sur les niveaux recommandés par l’Organisation mondiale de la Santé [11] ». Le « coût acceptable » correspondrait « à deux fois la moyenne des dépenses dans le pays concerné. Soit pour la France un « seuil » à 7,6 % (2 fois 3,8%) [12].

Des études menées par l’Organisation Mondiale de la Santé soulignent que « la surmortalité hivernale est fortement liée aux caractéristiques du logement » et précisent : « L’option politique la plus efficace consiste à s’attaquer à la cause du problème et d’améliorer l’efficacité énergétique des logements afin d’alléger le coût du maintien à des températures saines et confortables. Cela permettrait de réduire la surmortalité et la mauvaise santé, les demandes faites aux services de santé, et la contribution au changement climatique par l’utilisation d’énergie domestique ». [13]

En France, la loi dite du Grenelle 2 a fixé une définition officielle : « Est en précarité énergétique au titre de la présente loi, une personne qui éprouve dans son logement des difficultés particulières à disposer de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de ses besoins élémentaires en raison notamment de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’habitat [14] ». Notons que suite à la remise du rapport Pelletier P., De Quero A. & Lapostolet B. au gouvernement en janvier 2010, a été lancé un plan national de lutte contre la précarité énergétique qui se traduit par la mise en place d’un « fonds national d’aide à la rénovation thermique des logements privés ». L’objectif de ce plan : réhabiliter en 8 ans (d’ici 2017) le logement des 300 000 propriétaires modestes. De même, la « loi portant engagement national pour l’environnement du 10 juillet 2010 […] intègre la lutte contre la précarité énergétique aux plans départementaux d’action pour le logement des personnes défavorisées [15] ». Rappelons qu’en préalable de cette loi, un observatoire national de la précarité énergétique avait été lancé en janvier 2010, avec « un double objectif : mesurer le phénomène dans le temps et l’espace afin d’identifier le nombre de personnes touchées, les causes, les facteurs et les conséquences. Et « assurer le suivi des aides publiques et privées apportées aux ménages en impayés d’énergie et plus globalement aux ménages précaires », selon le ministère de l’Ecologie. [16].

Chiffres

Chiffres :
En France 3 400 000 ménages (soit (13% des ménages) consacrent plus de 10% de leurs ressources à régler leurs factures d’énergie, selon les enquêtes de l’INSEE, sachant qu’il s’agit aussi bien de ménages défavorisés que de ménages modestes. [17]
Au Royaume Uni, la précarité énergétique pourrait concerner près de 15 millions d’habitants, soit plus de 30% qu’en France , avec 5 millions de personnes ayant du mal à payer leur factures, selon le documentaire d’Hugo Hayat [18]
Enfin, selon l’ADEME « Le traitement social des impayés d’énergie représente 150 millions d’euros par an avec un rythme de progression de 10 à 15 % par an » [19].