Le 9 juillet 2004, la Cour internationale de Justice rendait son avis sur la légalité du tracé du mur que les autorités israéliennes étaient en train d’ériger en territoire palestinien. [1] Mur de sécurité, disaient les Israélien·nes. Mur de l’apartheid, disaient les Palestinien·nes. L’Assemblée générale des Nations unies demandait à la Cour de La Haye de trancher. Sobrement, la Cour refusait de s’engager dans la polémique et reconnaissait le droit de tout État à ériger un mur pour se protéger, mais à la condition que ce mur soit construit sur son territoire. Or, notait-elle, le mur israélien est principalement érigé en territoire palestinien et coupe des pans entiers de territoire palestinien en deux. Premier motif d’illégalité. En réalité, comme le soulignait la Cour internationale de Justice, le tracé du mur a été fixé de manière à inclure un certain nombre de colonies israéliennes sur des terres palestiniennes. Deuxième motif d’illégalité. La Cour en déduisait qu’Israël devait renoncer au mur, en détruire les pans déjà construits, renoncer aux colonies de peuplement et indemniser les Palestinien·nes. La Cour précisait que les États membres de la communauté internationale avaient l’obligation de faire pression sur Israël pour qu’il se conforme à l’avis rendu. Un espoir était permis. Il était vite déçu. Pas de pressions de la part des États, et Israël poursuivait la construction de son mur comme le développement des colonies en territoire palestinien.
Le 9 juillet 2005, la société civile palestinienne, représentée par 170 syndicats et associations, prenait acte de cette situation et demandait à la société civile internationale de se mobiliser pour obtenir des États qu’ils agissent enfin. Elle lançait un appel demandant le respect du droit international. Par quels moyens ? En lançant des actions pacifiques de Boycott des entreprises et des institutions israéliennes et des initiatives visant à obtenir le Désinvestissement de l’économie israélienne et des Sanctions contre les institutions israéliennes. [2] Le mouvement BDS prenait naissance et tirait son inspiration du mouvement de lutte contre l’apartheid sud-africain. [3] En 2009, une cinquantaine d’associations françaises, choquées par l’opération militaire israélienne Plomb durci dans la bande de Gaza, [4] décidaient de répondre à l’appel de la société civile palestinienne et lançaient la campagne BDS France. Leur mode d’action consiste en des rassemblements de militants associatifs devant des centres commerciaux ou des magasins, dans le cadre desquels des appels sont formulés à ne pas acheter de produits israéliens. [5] Ces rassemblements sont en général filmés par les militant·es, les vidéos tournées étant ensuite diffusées sur les réseaux sociaux et les sites internet des associations membres de la campagne.
En résumé : un État viole le droit international (Israël n’est certes pas le seul État dans cette situation [6]) ; bien que tenus d’agir – comme l’indique la Cour internationale de Justice – les principaux États de la communauté internationale n’exercent aucune pression sérieuse sur lui ; une partie de la société civile française se mobilise et demande aux consommateur·rices de boycotter l’achat de produits issus de cet État pour faire pression. Finalement, n’est-ce pas parfaitement légitime pour des associations ou des activistes de la société civile de se mobiliser par des actions pacifiques en faveur du respect de la légalité internationale ? Ne serait-ce pas l’exercice d’un devoir citoyen ?
La campagne BDS France va pourtant faire l’objet d’une politique juridique et judiciaire des pouvoirs publics visant à la museler. Le moyen utilisé est celui de la pénalisation de son action. Un moyen puissant et efficace, car aucun·e citoyen·ne n’a envie de se retrouver face à la justice pénale pour son action militante. Le risque pénal est d’autant moins accepté lorsque l’activisme ne concerne pas directement le ou la citoyen·ne dans son quotidien, sa région ou son pays. La Palestine reste un horizon lointain.
Comment et pourquoi cette opération visant à pénaliser l’appel au boycott des produits israéliens a-t-elle eu lieu en France ? Si la mécanique utilisée pour pénaliser les appels au boycott a été largement documentée (I), les raisons ayant conduit à son usage restent en partie méconnues (II).
I) La mécanique de la pénalisation
La pénalisation de la campagne BDS s’est faite à l’initiative du ministère de la Justice, à la demande des associations de défense de l’État d’Israël. [7] Bien qu’elle ait été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme, les pouvoirs publics français ne semblent pas y avoir renoncé.
A) Circulaires et jurisprudence de la Cour de cassation
Les particuliers ont toute liberté de ne pas acheter des produits en provenance des États dont ils désapprouvent les pratiques politiques, économiques ou culturelles. Ils bénéficient de la liberté de pratiquer le boycott à titre individuel, dans leur choix de consommation. Mais ont-ils le droit d’appeler publiquement au boycott des produits qu’ils ne consomment pas ? La stratégie des pouvoirs publics français a consisté à faire croire que ce droit n’existait pas et que des dispositions légales pouvaient tout à fait interdire pénalement aux citoyen·nes de prononcer de tels appels.
En 2010 [8] et en 2012 [9], les ministres de la justice Alliot-Marie et Mercier ont ainsi prescrit à leurs services d’adopter deux circulaires adressées aux procureurs de la République et leur demandant de poursuivre les personnes appelant au boycott des produits israéliens. Le raisonnement en était simple : le droit pénal – la loi de 1881 sur la liberté de la presse – interdit l’appel à la discrimination contre les personnes physiques, notamment la discrimination fondée sur la nationalité de ces personnes. Or, ces deux circulaires considèrent que l’appel au boycott des produits israéliens a un impact sur les Israélien·nes et constitue donc un appel à la discrimination fondée sur leur nationalité, ce qui serait illégal. [10]
Le raisonnement souffrait de deux vices : il confond, pour paraphraser Steinbeck, « des produits et des hommes » et procède d’une interprétation extensive de la loi pénale puisque le droit pénal français n’évoque pas le terme de boycott ou de refus d’achat. [11] Sa mise en œuvre aboutit, en outre, à porter atteinte à la liberté d’expression.
Ainsi, depuis 2010, une cinquantaine de militant·es BDS ont fait l’objet d’une enquête pénale, bien souvent à la suite de signalements effectués par les associations de défense d’Israël. Une quinzaine de poursuites pénales ont été engagées. Nombre de tribunaux et de cours d’appel ont refusé de se soumettre à l’interprétation juridique proposée par les circulaires et ont relaxé les militant·es BDS poursuivi·es (Versailles, Mulhouse, Pontoise, Perpignan, Montpellier, Alençon, Bobigny, Créteil, Paris, Toulouse). Toutefois, le raisonnement est repris par deux cours d’appel (Bordeaux et Colmar) et finalement validé par la Cour de cassation en 2015. [12] La France est ainsi devenue le seul État dans le monde à considérer que l’appel au boycott des produits israéliens constituait une infraction pénale, ici un délit puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. [13]
Les militant·es condamné·es ont saisi la Cour européenne des droits de l’homme, avec le soutien de l’Association France Palestine, de la Fédération internationale des droits de l’homme et de la Ligue des droits de l’homme.
B) La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH)
Dans un arrêt du 11 juin 2020, la Cour européenne condamnait la France [14] : elle a jugé à cette occasion que l’appel au boycott des produits israéliens ne peut pas en soi constituer une infraction pénale car il est couvert par la liberté d’expression. La France n’ayant pas fait appel de l’arrêt, celui-ci est donc juridiquement définitif depuis le 11 septembre 2020.
On pouvait donc légitimement s’attendre à ce que le ministère français de la Justice prenne les mesures qui s’imposent afin d’abroger les circulaires Alliot-Marie et Mercier. [15] Le 20 octobre 2020, le ministère de la Justice a cependant adopté une dépêche adressée aux procureurs, consacrée « à la répression des appels discriminatoires au boycott des produits israéliens », [16] qui s’efforce de préserver la pénalisation à la française des appels au boycott. La dépêche (en réalité une circulaire de politique pénale) affirme même que les circulaires Alliot-Marie et Mercier sont toujours valables et que les opérations appelant au boycott des produits israéliens sont encore susceptibles de constituer une infraction. On est donc en droit de se demander ce que fait la France d’un arrêt du 11 juin 2020 dans lequel le juge européen s’est senti obligé de rappeler qu’il « a souligné à de nombreuses reprises que l’article 10 § 2 ne laisse guère de place pour des restrictions à la liberté d’expression dans le domaine du discours politique ou de questions d’intérêt général ».
Quelques lignes plus haut, le juge européen avait indiqué que les appels au boycott des produits israéliens concernent précisément « un sujet d’intérêt général, celui du respect du droit international public par l’État d’Israël et de la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés, et s’inscrivaient dans un débat contemporain, ouvert en France comme dans toute la communauté internationale ».
Il est clair que les autorités françaises refusent, en violation de la hiérarchie des normes, de se soumettre à la décision de la CEDH et au droit européen. Pire encore, la dépêche fait revenir en arrière, avant le 11 juin 2020, quand la Cour de cassation voyait dans l’appel au boycott un appel discriminatoire.
Comme si la summa divisio consacrée par la Cour européenne n’existait pas. L’arrêt explique pourtant de manière très claire qu’il convient de distinguer entre, d’une part, l’incitation à ne pas consommer des produits pour contester la politique d’un État – incitation licite couverte par la liberté d’expression – et, d’autre part, des appels à la violence contre les personnes (ou des propos racistes et antisémites visant les juif·ves en tant que collectif ethnico-religieux) ou à la destruction de biens – discours de haine qui doivent être interdits.
La dépêche joue sur ce qui pourrait à première vue apparaître comme une zone grise située entre ces deux situations, en entretenant un flou entre appel au boycott des produits israéliens et antisémitisme, sans préciser clairement ce qui pourrait faire basculer l’un vers l’autre. [17] Au final, la dépêche ne parvient pas à masquer son but, qui est manifestement idéologique : réprimer à tout prix les appels au boycott des produits israéliens lancé dans le cadre de la campagne BDS.
II) Les raisons de cette pénalisation
Les autorités françaises n’ont jamais expliqué clairement les motifs de la pénalisation, ajoutant au malaise que suscite nécessairement la stigmatisation d’une telle forme d’action militante pacifique. Le débat sur l’opportunité d’une telle pénalisation doit avoir lieu au sein des ministères concernés (Intérieur, Justice, Affaires étrangères, Premier ministre) mais il n’est pas public et les ministres sont toujours restés flous ou évanescents sur le sujet, même dans leurs réponses aux questions écrites ou orales des parlementaires. Seule Christiane Taubira, alors ministre de la Justice, a osé évoquer publiquement le sujet, indiquant que l’appel au boycott était un « acte militant » légitime pour la situation en Afrique du Sud du temps de l’apartheid mais finalement pour en conforter l’idée selon laquelle, quand il s’agit d’Israël, les choses sont différentes. [18] On en est donc réduit à formuler des hypothèses, tenant à la faiblesse de la tradition démocratique française sur ce type de sujet et au statut particulier que possède l’État d’Israël en France.
A) La faiblesse de la tradition française en matière de boycott
Plusieurs éléments sont venus se combiner pour permettre la pénalisation de l’appel au boycott des produits issus d’un État dont la politique gouvernementale est critiquée.
- En France, le boycott-citoyen, prérogative de la société civile et des consommateur·rices engagé·es, est souvent confondu avec le boycott, prérogative de l’État dans le cadre des relations internationales. [19] Or la France est un pays de tradition centralisatrice et l’État y est traditionnellement réticent à admettre des initiatives de la société civile ou des collectivités locales qui lui déplaisent. Une réticence d’autant plus forte que le boycott-citoyen concerne un sujet susceptible d’entrer dans son champ de compétence, les relations internationales et les échanges internationaux. L’État a ainsi tenté à de multiples reprises d’empêcher les collectivités locales d’appeler au boycott des produits israéliens ou des colonies israéliennes. Il a déféré au juge administratif les résolutions des collectivités locales françaises (Bondy, Ivry, Saint-Pierre-des-Corps, Clermont-Ferrand) ayant adopté des résolutions favorables au boycott. [20] Le boycott idéologique d’un État étranger ou de ses institutions, outil important dans une démocratie, n’est pas considéré comme un boycott noble en France, comme peut le devenir le boycott consumériste. [21]
- Dans l’organisation constitutionnelle française, les questions de relations internationales relèvent traditionnellement du domaine réservé du président de la République, les services du Premier ministre et le ministère des Affaires étrangères étant (sauf en période de cohabitation) chargés de mettre en œuvre les orientations présidentielles. Ces questions sont parfois débattues au Parlement. D’une manière générale, les pouvoirs publics français sont réticents à débattre des sujets touchant aux relations internationales avec les acteur·rices de la société civile, a fortiori si ceux·celles-ci proposent des mesures concrètes comme le boycott ou des sanctions. En matière de politique étrangère, les modalités d’un débat démocratique, libre et transparent, incluant les acteur·rices de la société civile, restent largement à inventer et à mettre en place.
- Les milieux d’affaires demeurent hostiles au boycott-citoyen. Ils y voient le risque d’affecter les intérêts économiques français. Appeler au boycott des produits de certains États risquerait de gêner les entreprises françaises souhaitant s’y implanter et aussi, en retour, d’entraîner une forme de boycott des produits français. L’impact ne serait alors pas nul pour l’économie française, notamment si l’on pense à la Chine ou à la Russie. Tout en reconnaissant qu’une société démocratique doit tolérer des débats sur les questions d’actualité internationale, les milieux patronaux ne sont pas favorables à des incitations au boycott-citoyen et à des mouvements de boycott issus de la société civile, qui impliquent des risques commerciaux et une possible insécurité juridique des contrats avec les entreprises des États critiqués. [22]
- Le consumérisme militant constitue un mouvement en progression [23] mais reste faible en France. [24] Ce n’est que récemment que des propos ont été tenus à l’Assemblée nationale en faveur du boycott : « l’appel au boycott, comme arme ultime d’une consommation responsable, doit être considéré comme licite dès lors qu’il est établi par des rapports crédibles d’organisations internationales et d’ONG dignes de foi qu’une multinationale viole délibérément et gravement la légalité internationale ». [25] Le boycott de sociétés comme Amazon ou Airbnb en raison de l’impact négatif de ces sociétés sur l’emploi et les modes de vie constitue un mouvement récent en France. Si les pouvoirs publics n’ont pas entendu interdire les appels au boycott des produits d’entreprises critiquées en raison de leurs pratiques commerciales ou de leur politique sociale [26] ou environnementale, [27] ce type d’appels n’a jamais rencontré un grand succès en France, notamment parce que les syndicats (par crainte pour l’emploi) et les partis politiques n’y ont jamais été favorables ; une différence notable avec les pays anglo-saxons, où le boycott des produits, des marques, des commerces y a souvent été reconnu et encouragé. [28] La « grande » histoire des mouvements de boycott-citoyen, synonymes de lutte contre les discriminations, l’apartheid, la colonisation, voire, plus récemment, les essais nucléaires français, n’a jamais réellement suscité de mobilisation en France. [29]
La plupart de ces éléments existaient déjà dans les années 1970 et 1980 et n’empêchaient pas les appels au boycott contre les produits sud-africains du temps de l’apartheid. Il n’empêche que ces appels ont toujours été plutôt timides en France et somme toute assez peu suivis d’effet. Cela étant dit, personne n’avait imaginé pénaliser ces appels, ce qui nous conduit naturellement à évoquer également la situation particulière de l’exception israélienne.
B) L’exception israélienne
Si l’on peut parler d’exception israélienne, c’est sans doute parce qu’Israël n’est pas traité comme les autres États par le personnel politique français et par les pouvoirs publics français. En dépit des violations répétées par Israël des résolutions adoptées par les Nations unies, notamment depuis l’année 1967 – année qui marque le début de l’occupation des territoires palestiniens – la France s’en est toujours tenue, dans le conflit israélo-palestinien à une position prudente, qui, in fine, revient à favoriser la partie forte. Elle n’a cessé, avec les autres États membres de l’UE, d’approfondir ses liens commerciaux et scientifiques avec Israël, [30] sans jamais exiger en échange le respect du droit international et des droits humains. Cette prudence trouve son origine dans la fascination qu’Israël a toujours exercée sur une partie du personnel politique français, qu’il soit de gauche, du centre ou de droite ; fascination nourrie tantôt par une forme de nostalgie du modèle colonial, tantôt par une admiration pour la militarisation de la société israélienne, tantôt par une apparence démocratique dans un Moyen-Orient, il est vrai, marqué par l’autocratie. Israël a, en retour, a tissé des liens forts avec ces responsables publics. Dans le même temps, particulièrement à partir des années 2000 et la place prise dans les esprits par la lutte contre le terrorisme, la politique arabe de la France (qui avait eu, depuis le général de Gaulle, une tendresse particulière pour la cause nationale palestinienne) s’est érodée. Parallèlement, une partie de la communauté juive française, notamment le Conseil représentatif des institutions juives de France, s’est très fortement mobilisée pour défendre la politique du gouvernement israélien – y compris dans ses aspects les plus brutaux – tandis que la communauté d’origine arabe ou maghrébine française semblait en peine d’articuler un discours politique crédible en soutien des pouvoirs publics palestiniens ou de la population palestinienne subissant le joug de l’occupation.
La politique étrangère française demeure attachée au respect du droit international dans le conflit israélo-arabe, en rappelant régulièrement la nécessité de respecter le sens des résolutions des Nations unies. Cependant, dans le même temps, elle exclut toute initiative ou sanction à l’encontre de l’État d’Israël et même à l’égard de certaines de ses composantes (militaires, colons, responsables politiques, entreprises impliquées dans la colonisation, etc.) qui participent directement des violations du droit international [31] ; prudence qui a également pour souci de ne pas froisser notre allié états-unien, principal soutien d’Israël, et certains partenaires européens, comme l’Allemagne.
Il n’est pas difficile de comprendre qu’une grande partie de la classe politique ne souhaite pas que ce type de débats, comme celui sur le boycott des produits israéliens ou les sanctions à adopter contre Israël, agite la société française. Certain·es y voient, en outre, un danger pour l’harmonie de notre société, compte tenu de la présence sur le sol français de communautés religieuses ou d’origine étrangère, avec in fine le risque d’éventuels troubles à l’ordre public. Une telle restriction au droit du citoyen à participer à des débats de nature politique paraît pourtant peu légitime, alors qu’il existe déjà des lois et règlements permettant d’éviter des manifestations générant un trouble à l’ordre public. Le recours à l’argument d’autorité d’antisémitisme est, en outre, une constante dans ce panorama. [32] L’argument, puissant et dissuasif, est utilisé pour discréditer la campagne BDS France et rend compliquée toute prise d’initiative sur le sujet.
Le mouvement BDS en faveur du respect du droit international est la cible d’une campagne de désinformation visant à le présenter comme un mouvement antisémite et illégitime. En Israël, une sanction civile est prévue par la loi « anti-BDS » qui a été adoptée en 2011 et validée par sa Cour suprême en avril 2015. Aux États-Unis, où de nombreux États fédérés ont adopté des législations anti-BDS, des mesures civiles ou disciplinaires sont prévues par la loi à l’encontre des personnes morales ou physiques qui soutiennent le boycott des produits israéliens. En Allemagne, le Bundestag a adopté une résolution qualifiant le BDS de mouvement antisémite. À cet égard, la France, qui a choisi la voie de la pénalisation des boycotteur·ses d’Israël, fait figure de laboratoire dans la lutte contre le mouvement BDS. La Cour suprême allemande, la Cour suprême américaine, et plus récemment la Cour d’appel d’Angleterre et du Pays de Galles et la Cour européenne des droits de l’homme se sont pourtant toutes prononcées pour un droit au boycott, protégé par la liberté d’expression. En réalité, dans cette campagne internationale de désinformation, la « guerre juridique » constitue un outil pour discréditer le mouvement BDS, faire peur à ceux et celles qui seraient tenté·es de le rejoindre et faire croire aux acteur·rices de la société civile qu’ils·elles n’ont pas de rôle à jouer dans la défense du droit international. Tout comme les tentatives pour discréditer le mouvement anti-apartheid ont échoué, il est permis de penser que celles visant le mouvement BDS sont vouées à l’échec. Mais dans quel délai ? Cela dépendra assurément de la capacité de mobilisation des acteur·rices de la société civile.