Palabra Radio est une équipe de femmes qui se charge d’accompagner des processus de communication communautaire, tout en créant des espaces de partage de savoirs et d’expériences et en apportant un soutien logistique à des projets de communication fondés sur la culture libre.
Étant donné que les médias dominants perpétuent un modèle de communication dans lequel la femme est réifiée et son travail passé sous silence, c’est à nous, les femmes, qu’il incombe de bâtir et créer les espaces et les outils qui permettront de développer d’autres réflexions, de chambouler les significations et d’inverser la tendance.
Palabra Radio a vu le jour dans la foulée de la contestation sociale de 2006. Notre naissance a été marquée par trois tournants historiques :
- Le 1er mai 2006, des millions d’immigré.e.s d’Amérique latine et des Caraïbes résidant sans papiers aux États-Unis sont descendu.e.s dans les rues pour revendiquer leurs droits [2]. En 2006, toujours, sont nées Radio Conciencia, une petite station de radio locale gérée par des travailleur.euse.s récoltant des tomates dans le Sud-Est de la Floride, et Radio Movimiento, une autre station de radio gérée par l’organisation Pineros y Campesinos Unidos del Noroeste (Union des planteurs de pins et paysans du Nord-Ouest) dans l’Oregon, aux États-Unis.
- Les 3 et 4 mai, dans le village de San Salvador Atenco [3], dans l’État de Mexico (Mexique), 3000 policier.e.s ont participé à la répression des habitant.e.s qui refusaient d’être délogé.e.s de leurs terres ancestrales. Le bilan fut d’un millier de personnes arrêtées, parmi lesquelles 27 femmes victimes de viols et de sévices sexuels.
- Le 14 juin, la répression s’est déchaînée à l’encontre du mouvement des personnels d’éducation de la section XX, dans la ville de Oaxaca (Mexique). La population s’est organisée et a formé l’Assemblée populaire des peuples de Oaxaca (APPO). Les femmes ont battu le pavé en soutien au mouvement et décidé d’occuper les locaux de la chaîne de télévision d’État [4].
Derrière ces événements se cache un récit narré par des femmes et des jeunes filles, qui à la peur ont préféré le courage, qui veulent non pas le pouvoir mais l’autonomie, qui sont des guerrières et non des victimes. C’est alors que nous avons découvert quelle était notre véritable passion : la radio.
Depuis lors, nous avons eu pour mission de donner la parole aux femmes et aux jeunes filles qui, à travers leur mode de vie, leur ressenti et leur réflexion matérialisent les mots et apportent une dimension émotionnelle au contenu. Cette mission inclut l’utilisation de technologies libres pour faire raisonner ces voix et ce contenu, à partir d’un narratif féministe.
Pour cela, nous encourageons la participation active des femmes aux processus de formation et de renforcement des compétences en vue de créer des médias communautaires, grâce auxquels elles auront voix au chapitre, endosseront leurs responsabilités dans les processus décisionnels des médias et se libéreront des dynamiques et des structures de pouvoir patriarcales, que reproduisent les autres médias communautaires [5].
Nous appelons à l’utilisation et l’appropriation des logiciels libres [6] : une démarche qui se veut politique, qui revendique le savoir en tant que bien commun et démystifie la technologie.
Selon nous, étayer et systématiser les processus d’apprentissage est fondamental pour produire des connaissances collaboratives contribuant à la pérennité des projets de communication populaire.
À travers notre production sonore, nous faisons cohabiter diverses formes d’écoute de nos mondes, de notre environnement ; diverses démarches visant à redonner un sens à la valeur des sons en tant que forme d’expression.
Nous revendiquons notre liberté d’expression, d’édification de nos propres espaces qui se veulent sûrs et réunissent les conditions propices à la satisfaction de nos désirs et intérêts. Nous revendiquons notre liberté de rêver et de construire nos propres infrastructures, nos technologies [7].