Migrants et réfugiés : amalgames et mensonges... ou comment certains États ont détricoté les politiques d’accueil

Nouveau gouvernement, quelle politique d’accueil ? Décryptage et histoire des glissements idéologiques

, par ASIAD , M’BODJE Mamadou

Camp de migrants à Stalingrad, Paris, 30 octobre 2016. Crédits : Jeanne Menjoulet.

Bien avant le slogan frontiste « on est chez nous » 

La décolonisation puis la mondialisation, la fin du mythe révolutionnaire, la crise de l’aventure européenne, la migration vers la France d’anciens colonisés…, tout cela secoue notre récit collectif. Sans compter la fin de la France paysanne, les bouleversements du monde du travail, l’usure d’un quart de siècle de chômeurs, la « place nouvelle » faite aux femmes, les soins apportés aux individus et à leur diversité… Sans oublier non plus la place prise par l’islam dans la culture française, aussi bien en nombre de fidèles qu’en visibilité. Même si, bien entendu, elle demeure aussi un grand pays catholique, protestant, juif, agnostique et athée-laïque bien sûr…

Bien sûr, la France a profondément changé depuis un demi-siècle ; oui ces changements auraient sans doute mérité plus de débats de fond ; oui certaines peurs ont pu se télescoper. La juxtaposition entre immigration et chômage, ou immigration et insécurité, gérée par le Front national et d’autres groupes d’extrême droite, bien avant les années 80, a eu une certaine crédibilité dans l’opinion. Par exemple, la croissance d’un extrémisme islamique a pu être ressenti en parallèle avec la perception de plus en plus forte de la communauté musulmane de France. Autre exemple, l’intégration à l’Union européenne des anciens pays communistes d’Europe a fait craindre l’arrivée du plombier polonais.

La France qui s’adosse à un ensemble de valeurs et d’événements historiques, parfois contradictoires, pour se penser comme communauté nationale n’a guère, depuis plus d’un demi-siècle, repensé le socle culturel sur lequel elle s’appuie. Autrement dit, nous avons vécu des tournants successifs dans notre récit national que, sans doute, nous avons mal gérés. Certes nous ne sommes pas les seuls, et la paix se fait toujours à deux. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas être actif. Ne prenons qu’un exemple : celui de la colonisation puis de la décolonisation. Jules Ferry ne répondait-il pas en 1885 à Clémenceau qui refusait la colonisation de l’Afrique : «  Il faut le dire nettement : oui les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures ». Ajoutant : « La Déclaration des droits de l’Homme n’a pas été écrite pour les Noirs de l’Afrique équatoriale ».

Comment l’enfant noir qui entre chaque matin à l’école peut-il aimer le Jules Ferry des livres d’histoire ? Cette phrase, nous préférons en réalité la cacher que chercher les voies de son dépassement. Nous avons besoin au fond, d’être la référence et le bien, même si c’est en contournant la vérité. On pourrait facilement trouver des phrases du même acabit sur l’Islam, y compris chez Guy Mollet. Et, encore récemment, quand le Maire de Marseille regrettait que des « musulmans déferlent à 15000 ou 20000 sur la Canebière » et « avec le drapeau algérien  » un soir de match de foot, pour fêter une victoire de l’Algérie. Comment reconnaître ainsi une religion, au faciès ou par remonteé d’une mémoire refoulée ? Et quel drapeau pouvaient-ils avoir ? Elevons-nous nos enfants dans le rejet de la culture de leurs parents, de leurs ancêtres ? Le migrant doit-il « changer de souche » ? Et d’ailleurs qui est de souche ?

Autour des années 1990 

Déjà en 1995, quand trois communes de France furent conquises par un parti d’extrême droite, nous avons essayé de comprendre cet événement a priori impensable dans la France de la fin du XXe siècle. A Orange, à Marignane, surtout à Toulon, puis à Vitrolles en 1997. Là, ou avait commencé une crise électorale de la nation. On nous disait : «  ils arrivent », on nous disait : « on n’est plus chez nous », on nous disait : « pourquoi ils viennent ici alors qu’ils nous ont fait partir ? [d’Algérie] », on nous disait : «  ils prennent notre travail ».

Aujourd’hui, nous avons eu ce « grand débat sur l’identité nationale ». C’est évidemment différent des questions posées en 1995 et avant. Mais c’est dans ce contexte que fut décidé en Suisse, suite à une votation populaire, l’interdiction des minarets dans un pays qui n’en comporte à ce jour que trois. Ce débat sur l’identité nationale s’inscrit, quoi que puissent en penser et en dire ses organisateurs dans cette filiation. Il n’aurait jamais été organisé si la France ne se débattait pas depuis un quart de siècle avec un parti et des idées d’extrême droite. Mais ce parti et ses idées n’auraient jamais pris la place qu’elles ont conquises sur le dernier quart de siècle si les bouleversements du monde et des systèmes d’intégration, notamment par le travail et le respect des droits humains fondamentaux, n’avaient pas été si brutalement secoués et bafoués. Car il y a du sens dans le fait que le Front national et ses idées se soient brusquement répandus après 1983 dans des milieux populaires en crise, avec une surreprésentation le long des frontières d’abord du sud et de l’est, puis du nord. Il y avait là un dit social et géographique qui devait être entendu. Et pas seulement diabolisé et réduit à un pur retour d’un interdit historique.

Mais au-delà de ce contexte, notons aussi que nous traversons une grande crise des appartenances collectives que reflètent régulièrement des discours extrémistes électoraux ; pensons Front national, Autriche, Pays-Bas, Flamands, minarets et Suisse, mais pensons aussi islamisme, guerre ethnique ou religieuse en ex-Yougoslavie, conflits inter-religieux en Inde et peut-être même génocide du Rwanda et guerres au Soudan…

Jean Viard, sociologue et directeur de recherche CNRS au CEVIPOF, décrit comment, depuis la IIIe République, le récit national français a masqué l’immigration pour fonder « une mythique nation de fils de paysans, pères de famille, élus locaux et soldats aptes à reprendre l’Alsace et la Lorraine à l’Allemagne. L’analyse de ce paradoxe et de ce marquage est au cœur des problèmes actuels. Avec d’une part la quasi-disparition d’une paysannerie élevée donc, en France, au rang de mythe national et républicain fondateur, et d’autre part la "découverte" d’une immigration longtemps cachée sous le costume de travailleur. Il y a là changement de réalité et de représentation, nouvel imaginaire et télescopage difficile de la fin de nos liens, par la paysannerie et ses mythes, à la France des paroisses et des communes, au moment où entre en crise le travail productif intégrateur de l’immigrant. Cet immigrant travailleur brusquement apparu immigré musulman dans l’imaginaire collectif quand la France paysanne devenait une France d’individus mobiles. »

Nous le savons, en période de crise, quand chaque pouvoir cherche à masquer la montée du chômage et la crainte de troubles sociaux, il faut alors recréer du lien. Par tous les moyens ? Contre qui ? « En 1932, en pleine dépression économique et sociale, une loi permit la fixation de quotas dans les entreprises pour les étrangers  », rappelle Philippe Bernard dans Le Monde du 21 janvier 2010. Dans les années 70, après le choc pétrolier, on parle de remplacer les travailleurs du Maghreb par des français. Le Parti Communiste afficha « produisons français ». Ambiguïté. Parfois plus ou moins honteuse. Le Front national relèvera, avec succès, cette logique dans les années 80 et favorisera l’idée d’un rapport entre immigration et chômage. Immigration et insécurité.

A contre-rythme, le président Sarkozy déclara en début de mandat : «  la France doit relever le défi du métissage que nous adresse le XXIe siècle  » . Il chercha à faire une place au culte musulman, tout en instaurant des quotas annuels pour les expulsions d’étrangers en situation irrégulière.

Mais la grande crise de 2008 remet à l’honneur les recettes des années 30. Burqua, identité nationale. Instrumentalisation toujours. Reste que lorsque s’ouvrent les portes de la manipulation des peurs, on ne sait jamais qui les refermera.

Cependant, il était clair que la notion de « faire France, comme hier », était bousculée de l’intérieur - et ce y compris du fait des immigrations et mobilités nouvelles - et de l’extérieur, par le nouveau désordre mondial… Dans ce contexte, les manipulations n’étaient jamais très loin. Quel était le sens symbolique des quotas d’arrestations de « sans-papiers » ? Y compris des enfants ? Quel était le sens des innombrables dérapages entendus dans les différents débats ?

De Hollande à Macron

Très souvent, quand s’affaiblit la communauté de destin portée par un projet et des valeurs, ressurgissent avec force les communautés liées à l’origine, la couleur, la religion, les études ou les métiers… « Le changement, c’est maintenant » de François Hollande et de son binôme avec Manuel Valls n’a rien arrangé à la situation. Malgré tous les espoirs portés sur Hollande, la fragmentation s’est renforcée au détriment de la solidarité nationale avec des risques majeurs, bien sûr, pour les plus faibles et les derniers arrivés, notamment les jeunes et les migrants.

Face à cette fragmentation, l’appel à la Nation gagnait des pans entiers d’une société déboussolée, bien au-delà des forces nationalistes elles-mêmes. Le culte du franc-euro fort, le refus de l’Europe, l’éloge des particularités françaises, le « produisons français », voire certaines formes de discours républicains, relèvent en partie de cette perte de sens d’un destin commun de la France et des Français.

Ce que commence à faire Macron, n’est rien d’autre que la continuité des procédures précédentes. Il tente un marquage renforcé des frontières, dont le symbole est devenu le charter ; on expulsait à l’époque des migrants à tour de bras, il inventera pour bientôt, un quota annuel d’expulsions en lieu et place de l’application du droit ; il externalisera l’examen des demandes d’asile vers le Niger, le Tchad et quelque part en Libye. Des Afghans, Irakiens, Soudanais… risquent d’être renvoyés vers des pays en guerre, avec certainement l’intime conviction de donner des gages à un sentiment d’appartenance communautaire déboussolée, au risque de briser notre socle de valeurs communes. Celles-là mêmes qui sous-tendent l’identité française et son fondement universaliste.

Peut-être qu’il oublie, qu’ au-delà du seul cas du Front national, nous devons prendre conscience du lot de dérèglements politiques, sociaux, idéologiques et culturels qui s’expriment. A y regarder de plus près, il n’est qu’une modalité du national-populisme, qui n’est qu’une modalité de ce qu’on pourrait appeler le populisme, le populisme n’étant lui-même qu’une modalité de multiples phénomènes de régression politique auxquels on assiste dans toutes les démocraties occidentales et particulièrement en France. L’aspect préoccupant de ce symptôme est le fait qu’au fond, on s’aperçoit que, pour toute une série de thèmes, aussi bien dans l’espace de la droite que dans celui de la gauche, il y a une incapacité à penser le changement de nos sociétés et leur adaptation au flux de l’internationalisation. Devant le changement nécessaire ou inéluctable, la réaction du corps politique et social est trop souvent celle du maintien du statut quo ou de la régression vers de vieilles formules stato-nationalistes. Macron s’enferme-t-il dans ce cadre ?

Au vu de ses engagements présidentiels, le président de la République, n’a pas, depuis, dans ses discours, varié de sa position. Il proposait ainsi à la France d’assumer sa juste part dans l’accueil des migrants, sans objectifs chiffrés. Depuis, le Premier Ministre et son ministre de l’Intérieur ont présenté, le mercredi 12 juillet 2017, les grandes lignes de ce que devrait être le prochain projet de loi sur les réfugiés et les migrants. La Ligue des droits de l’Homme (LDH) considère que « comme on pouvait le craindre après les paroles outrancières de Gérard Collomb sur les associations agissantes à Calais, le gouvernement et le Président de la République n’ont manifestement rien compris à la situation des personnes qui cherchent aide et refuge dans les pays de l’UE. »

Le nouveau gouvernement et l’accueil des migrants

Un communiqué de la LDH du 13 juillet 2017, analyse bien la situation : «  On avait cru comprendre après quelques déclarations de campagne, qu’il y aurait un certain rééquilibrage. Las, ce n’était que des éléments de langage de ces mots lancés dans le vent pour capter des voix. Car d’équilibre entre humanité et fermeté, il n’y aura point ! Accueillir des réfugiés ? Oui, un peu, mais celles et ceux qui le méritent. Accroître le nombre de places d’accueil ? Oui, mais pour mieux garder sous contrôle. Diminuer le temps d’attente du titre de séjour ? Oui, mais pour reconduire plus vite à la frontière. Modifier la convention de Dublin [1] ? Oui, mais pour l’aggraver en fixant définitivement le demandeur au pays de déposition de la demande. Mieux instruire les demandes ? Oui, pour faire le tri entre les réfugiés, réputés légitimes, des migrants dont les motifs ne sont qu’économiques. Promouvoir une politique commune européenne ? Oui, mais si elle ne contrecarre en rien la fermeture du territoire, même si cela revient à abandonner d’autres, telles la Grèce et l’Italie, à leur propre sort.  »

La LDH dénonce non seulement les mots utilisés, comme cette fameuse expression « dissuasion migratoire », mais surtout l’analyse qui explique que de telles choses puissent être dites. C’est ce que montre, à l’évidence, l’incroyable incohérence qui consiste à prôner le développement dans les pays d’origine pour « tarir » les flux vers les pays d’accueil tout en diminuant les aides publiques à ces pays.

Au lieu de comprendre que c’est l’instabilité du monde qui est à la base des mouvements migratoires, le gouvernement s’enfonce dans la classique inversion entre les causes des migrations et leurs conséquences. La LDH et beaucoup d’autres organisations, considèrent que « le projet de loi annoncé révèle que le gouvernement n’a en réalité pas de politique des migrations, juste le choix de l’aggravation de la répression et de la négation des droits. »

En effet, il n’existe pas de centres d’accueil adaptés à ce jour. L’évacuation du campement porte de la Chapelle, en juillet, était la plus importante organisée depuis le démantèlement du gigantesque bidonville de la place Stalingrad à Paris, le 4 novembre 2016 (4000 personnes prises en charge).
L’ouverture en novembre du centre humanitaire parisien (72 boulevard Ney, 75018 Paris), d’une capacité de 400 places, devait empêcher la reconstitution de ce genre de campement en offrant une alternative. Mais le dispositif unique en France, peine à absorber les nouveaux arrivants. Plus de 800 personnes vivent à nouveau dans les rues aux alentours du centre humanitaire, trois semaines après l’évacuation de près de 3000 personnes au même endroit.

« Le centre ne peut tout absorber » déclare Pierre Henri, directeur général de l’association Emmaüs Solidarité, officiellement mandatée pour mener des maraudes ; rappelant que « 42 % de la demande d’asile se concentre sur Paris et la région parisienne ». Selon lui, «  tant qu’il n’y aura pas de centre de transit dans les grandes capitales régionales, Paris continuera à faire entonnoir ». Lors d’une visite au centre humanitaire le vendredi 21 juillet 2017, le Défenseur des droits Jacques Toubon a également appelé le gouvernement à ouvrir de nouveaux centres d’accueil pour migrants, notamment à Calais.

Le gouvernement a présenté mi-juillet un « plan migrants » prévoyant notamment plus de 12 000 places d’hébergement pour les demandeurs d’asile et les réfugiés d’ici 2019 mais le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb s’est opposé à toute nouvelle ouverture de centres pour migrants. A noter que le jeudi matin (27 juillet), lors d’une cérémonie de naturalisation à la préfecture d’Orléans, le président Emmanuel Macron, déclarait que « d’ici la fin de l’année, je ne veux plus personnes dans les rues, dans les bois. Je veux partout des hébergements d’urgence, je ne veux plus de femmes et d’hommes dans les rues », a-t-il ajouté. (Dépêche AFP du 27 juillet 2017).

Et pourtant, malgré la fermeture en 2016 du centre d’accueil de migrants se trouvant à Calais, au profit d’une répartition de la prise en charge des migrants dans des structures d’accueil implantées sur différents points du territoire national, plusieurs centaines de migrants se trouvent à nouveau à proximité de Calais depuis le début de l’année 2017.

Conditions d’accueil des migrants à Calais : retour sur les faits et les procédures

Au cours de l’année 2016, face à l’afflux croissant de milliers de migrants sur le territoire de la commune de Calais, essentiellement en bordure d’un terrain dénommé « la Lande », les autorités publiques ont décidé de répartir leur prise en charge dans des structures d’accueil implantées sur différents points du territoire national. Dans ce cadre, elles ont décidé la fermeture du centre d’accueil qui se trouvait sur le territoire dit de « la Lande » et des autres structures destinées à l’accueil et à l’hébergement des migrants dans cette zone, afin d’éviter que ne s’y reconstituent de nouveaux campements de migrants. C’est à partir de ce moment que le juge des référés du tribunal administratif de Lille est saisi d’un référé-liberté afin que cessent les atteintes graves contre des centaines de migrants vivant, à la fin du moins de juin 2017, sur le territoire et la commune de Calais.

Comme le rappelle Médiapart  [2], à l’époque, par ordonnance du 26 juin 2017, le juge des référés avait partiellement fait droit à cette demande, et il avait enjoint au préfet du Pas-de-Calais de mettre en place un dispositif adapté de maraude quotidienne à Calais à destination des mineurs non accompagnés, et avait déjà enjoint au préfet et à la commune de créer plusieurs points d’eau, à l’extérieur du centre de Calais, dans des lieux facilement accessibles aux migrants afin de leur permettre de boire, de se laver et de laver leurs vêtements. Avait également été demandés : la mise en place de latrines et d’ un dispositif d’accès à des douches, ainsi que l’organisation des départs, depuis la commune de Calais, vers les centres d’accueil et d’orientation ouverts sur le territoire français dans lesquels des places étaient disponibles. En revanche, le juge avait rejeté les demandes tendant à la création d’un centre d’accueil des migrants ou d’un centre de distribution alimentaire sur le territoire de la commune de Calais.

Le ministre de l’Intérieur et la commune de Calais font appel de cette ordonnance devant le Conseil d’État mais le 31 juillet 2017, le Conseil d’État rejette ces appels. Il commence par rappeler qu’il appartient aux autorités titulaires du pouvoir de police générale, c’est-à-dire au maire sur le territoire de la commune et au préfet pour les mesures excédant ce territoire, de veiller à ce que le droit de toute personne à ne pas être soumise à des traitements inhumains ou dégradants soit garanti. Dès lors que la carence des autorités politiques expose à un traitement inhumain ou dégradant caractérisé, et que la situation permet de prendre des mesures de sauvegarde dans un délai de quarante-huit heures, le juge des référés peut, dans le cadre d’un référé-liberté, prescrire les mesures de nature à faire cesser la situation résultant de cette carence…

En l’espèce, le Conseil d’État constate que plusieurs centaines de migrants se trouvent présents sur le territoire de la commune de Calais, dont une centaine de mineurs. Il révèle que ces migrants, qui se trouvent dans un état de dénuement et d’épuisement, n’ont accès à aucun point d’eau ou douche ni à des toilettes. Ils souffrent en conséquence de pathologies, de divers troubles liés à une mauvaise hygiène ou encore de plaies infectées ainsi que de graves souffrances psychiques. Le Conseil d’État souligne aussi qu’il n’appartient pas au juge des référés de remettre en cause le choix des autorités publiques de prendre en charge les migrants présents à Calais , sous réserve que soient toujours mises en œuvre les procédures d’éloignement du territoire français, dans des structures adaptées situées en dehors de la commune de Calais, dans le but d’éviter que ne s’y reconstitue un afflux incontrôlé de migrants. Cependant, il juge qu’il appartient bien au juge des référés d’ordonner les mesures urgentes que la situation permet de prendre, dans un délai de quarante-huit heures, et qui sont nécessaires pour faire cesser les atteintes graves et manifestement illégales aux libertés fondamentales.

Le Conseil d’État rejette donc les appels du Ministre de l’Intérieur et de la commune de Calais. C’est une victoire pour les migrants et les associations de défense des droits ; pour combien de temps ?

Notes

[1Le règlement Dublin II (auparavant convention de Dublin) est un règlement européen qui déterminait l’État membre de l’Union européenne responsable d’examiner une demande d’asile en vertu de la Convention de Genève (art. 51) dans l’Union européenne. Il a été réformé en juin 2013 par le règlement Dublin III.

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Bibliographie

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CONSEIL d’ETAT (Le) : Conditions d’accueil des migrants à Calais : le Conseil d’Etat rejette les appels du ministre de l’Intérieur et de la commune. Décision contentieuse du 31 juillet 2017, Le Conseil d’Etat et la juridiction administrative, 2017.

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JAILLET Marie-Christine, avec DONZELOT Jacques : La nouvelle question urbaine, Puca, Recherches, 2001.

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