C’est au rythme des danses et des chants que le marché coopératif Sûka Jîn a ouvert ses portes le 7 mars 2021. Porté par le « Bureau des femmes » (Mektaba Jin) de la ville de Qamishlo, ce marché dédié au travail des femmes vise à renforcer l’autonomie économique de quatorze femmes issues des diverses communautés qui habitent la région du Nord-Est de la Syrie (anciennement Rojava, ou Kurdistan syrien).
Si les images des femmes kurdes combattant pour la liberté ont fait le tour du monde, la dynamique d’émancipation sociale, économique et politique impulsée par et pour les femmes reste encore peu connue. Depuis plusieurs années, la guerre civile en Syrie, la lutte contre Daech, les attaques de l’armée turque et les crises économiques et sanitaires compromettent lourdement la capacité des peuples de la région à pourvoir à leur subsistance. Dépassant ces obstacles, dans une région où les activités commerciales sont surtout masculines, ce souk, ouvert 6 jours sur 7, permet de surmonter les inégalités et la dépendance.
Derrière les cabanettes colorées où se vendent pâtisseries, vêtements, lunettes, chaussures fleurs et petite alimentation, c’est une société plus égalitaire qui émerge. Engagées ensemble sur la voie de l’autonomie, ces femmes de 17 à 53 ans participent à créer une expérience solidaire d’économie coopérative. Grâce aux bénéfices, un fonds de roulement collectif sera créé pour subvenir aux besoins communs et appuyer leurs activités : amélioration de l’équipement, investissement en matériel de couture, par exemple.
Inscrit au cœur de l’alternative politique inspirante expérimentée au Nord-Est de la Syrie, ce marché en reflète les principaux fondements. Le Sûka Jîn est une alternative concrète pour renforcer l’émancipation des femmes, leur solidarité et contribuer à déraciner un système patriarcal encore très ancré. Comme l’explique Safia, qui vend des sous-vêtements : « Avec ce projet, c’est la première fois que je peux exercer une activité professionnelle par moi-même. J’ai enfin l’opportunité de sortir de la maison, rencontrer d’autres femmes. Nous sommes devenues comme une famille de sœurs ! ».