La Namibie est un pays dont on entend très peu parler en France, si ce n’est en novembre 2014 pour informer d’une grande « première en Afrique » : l’organisation des premières élections législatives et présidentielles par vote électronique.
Quelques mois plus tôt, la carte de la liberté de la presse dans le monde publiée par Reporters sans frontières (RSF) montrait que la Namibie est le seul pays africain à obtenir un score comparable aux pays scandinaves, en étant même mieux notée (19e pays à l’échelle mondiale) que la France (37e) [1].
Ce pays aurait-il réussi, en seulement 25 ans d’indépendance, sa transformation tranquille en une démocratie bienveillante et à l’écoute de son peuple ?
Ainsi le rapport de l’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE) abonde cette analyse en classant la Namibie systématiquement dans le peloton de tête des pays d’Afrique subsaharienne en termes de gouvernance, de respect de l’État de droit, de droits de l’Homme et de liberté de la presse. En plus de la stabilité, de la sécurité et de la lutte contre la corruption, on note aussi l’engagement du pays pour la protection de l’environnement, en inscrivant celle-ci dans la Constitution et en adoptant plusieurs initiatives pour la gestion et la préservation de l’environnement ainsi qu’un plan d’actions contre le changement climatique dès 2011.
Pourtant, le pays n’a pas échappé à l’histoire de la colonisation avec ses conséquences néfastes et son lot de bouleversements des rapports entre les peuples : esclavage, domination, alliance, génocide, spoliation, apartheid.
Il a obtenu son indépendance vis-à-vis de l’Afrique du Sud seulement en 1990 pour fonder une démocratie constitutionnelle pluripartite, même si la SWAPO (South West Africa People’s Organization) domine le paysage politique depuis l’indépendance. Au dernier scrutin, Hage Geingop, ancien Premier ministre, est élu président avec 87 % des voix. La SWAPO, son parti, s’adjuge 78 des 96 sièges de l’Assemblée.
L’économie de la Namibie basée sur l’extraction minière n’assure pas la richesse à l’ensemble de sa population. Ainsi une grande pauvreté rurale pousse sans cesse les populations à l’exode rural. En proie à des conditions climatiques difficiles et héritière d’une gestion agricole largement dominée par les "blancs", le pays connaît régulièrement des difficultés alimentaires. En 2014, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime que 37% de la population est sous-alimentée. Par ailleurs, la Namibie se situe au 6ème rang des pays quant à son taux de personnes infectées par le virus HIV/SIDA.
Le processus de démocratisation n’est donc pas linéaire. Il est le fruit de luttes permanentes entre des attentes hétérogènes et des pressions venant de groupes privés ou institutionnels internationaux.
Dans ce dossier, il s’agit d’apporter des éléments afin de comprendre comment cette société façonnée par un siècle de colonialisme essaye de gommer les traces de cet héritage pour opérer une transition post indépendance au profit des peuples autochtones.