La CCAS a sollicité le réseau ritimo qui a fait appel aux membres de la commission DESI-R pour la co-animation et permettre ainsi une double entrée, valorisant ainsi la complémentarité entre la « tête de réseau » et les « membres ». Le binôme ainsi constitué a ainsi permis de faire le lien entre le projet ritimo et une expertise de terrain.
Bien que les stagiaires aient été trop peu nombreux·ses (4 sur les 6 prévus au départ), cette journée a été d’une grande richesse au niveau des discussions, a prouvé la nécessité de ces temps de réflexion collective ainsi que le besoin d’outils pour faire émerger nos représentations, donner des clés de compréhension pour espérer pouvoir changer les choses.
Cette journée nous a aussi permis de mesurer la pertinence des outils créés par ritimo et la nécessité de les valoriser dans ces espaces de formation et d’échanges (référence au site portail ritimo.org, expositions sur les migrations, brochures « décrypter l’information », « préjugés sur les migrations »...).
Pour présenter le déroulé de la journée, nous nous sommes appuyées sur les chartes ritimo : la politique éditoriale et la charte d’intervention en éducation au développement. L’énigme des « neuf points » a été utilisée pour faire émerger la nécessité de se décentrer, de jouer, de se confronter à des points de vue multiples pour permettre de mieux se positionner ici entant qu’acteur·rice et citoyen·ne.
- Par une séquence de photolangage, en s’appuyant sur les dessins de Claire Robert, les stagiaires ont observé des préjugés et discriminations dont ils et elles avaient parfois fait les frais. Questionnements autour de la double culture : discriminations ici et là-bas (« Au Maroc, je suis un Français, avec l’image d’un eldorado, avec l’idée que les personnes issues de l’immigration roulent sur l’or. En France, je suis un Arabe et moi je suis les 2 mais en fait, je veux juste être un être humain. » Nourredine). Question autour de la mixité sociale : comment se fait-elle ? Par le nom ? Par l’origine ? Comment s’arme t-on individuellement et collectivement par rapport aux préjugés ? Les participant·es ont également abordé le rôle des médias dans la propagation des préjugés en parlant de « désinformation ».
- Par la technique de la « boule de neige », les participant·es ont dû répondre individuellement, puis collectivement à cette problématique : « La mixité garantie-t-elle l’absence de préjugés ? ». Les réflexions qui ont émergé de ce temps ont conclu à une réponse nuancée, qui distingue les niveaux individuels et l’action de l’institution. Pour que la mixité abaisse les préjugés, nécessité de faire un travail sur soi individuel, de se déconstruire soi, mais aussi des actions plus fortes du côté des institutions et un accompagnement et des pré-requis nécessaires pour avoir l’envie, les moyens et les outils pour « vivre ensemble ».
Cf. tableau ci-dessous, récapitulatif des échanges.
- Par le jeu d’Abigael, qui consiste à classer les personnages sur une échelle de valeurs entre bien et mal, cette séquence permet de faire émerger des représentations, des jugements et des interprétations : alors même que l’histoire ne comporte aucun élément de contexte, les participant·es ont tou·tes des jugements et interprétations sur le déroulé de l’histoire et les valeurs portées par les personnages.
- La réunion du conseil municipal que propose le jeu Zigani Drom a amené les participant·es à débattre sur l’implantation d’une aire d’accueil pour les gens du voyage sur la commune. Les protagonistes ont eu des avis divergents, de par la fiche rôle qui lui avait été attribuée et selon leurs positionnements dans la vie de la ville, qu’ils ou elles soient représentant·e des commerçant·es du village, représentant· de la communauté Rrom, propriétaire de vignes, militant·e associative, propriétaire dans une zone pavillonnaire… Ils et elles ont dû développer des argumentaires tout en se forçant de rester à l’écoute des autres pour régler les conflits d’intérêts et répondre à la commande du Maire qui animait la séance et avait pour objectif de mettre en œuvre la loi (la construction d’une aire de stationnement pour accueillir les gens du voyage pour toutes les communes de plus de 5000 habitant·es).
Les échanges ont beaucoup tourné autour des liens/enjeux économiques. Les participant·es se sont accordé·es pour mettre l’aire de stationnement sur le terrain des vignes (en dehors du centre-ville) mais rien n’a été résolu en termes de climat social (nous sommes d’accord de suivre les obligations légales dès lors que l’aire est construite « loin » de chez moi). Les antagonismes entre la peur de l’autre et les préjugés qui en découlent (« ils et elles vont nous voler notre travail », « ils et elles vont nous cambrioler », « ils et elles vont faire baisser la côte de nos propriétés », etc.) et l’envie de mixité sociale et culturelle en les rapprochant du centre-ville pour réellement cohabiter ensemble, n’ont pas été résolus. Besoin d’autres temps d’échange, où la parole de chacun·e serait prise en compte. La consultation démocratique est un premier pas mais doit s’accompagner d’une culture du débat si on veut espérer changer les mentalités.
- L’arpentage : à partir de la lecture et l’analyse collective de deux « enquêtes » signées Le Figaro (« Migrants, ce qu’on vous cache ») et L’Express (« La France des communautarismes, la fin du vivre-ensemble »), les participant·es ont dû réfléchir à la manière dont certains sujets sont abordés dans les médias - quelles représentations ils véhiculent et leurs conséquences pour la société. Il n’y a pas eu assez de temps pour cette séquence, les participant·es ont dit avoir appris beaucoup de choses dans ces deux enquêtes et certain·es se sont dits « choqué·es », « atterré·es » de voir qu’on en était arrivé là.
Discussion collective autour de la fabrication de l’information : qui parle ? De quel point de vue ? Quelle ligne éditoriale du média ? Est-il indépendant économiquement ? Quel profil des personnes interviewées ? Forme journalistique de l’enquête (le journaliste débarque t-il en terrain inconnu, vierge de tout préjugé ou a t-il toutes ses réponses avant même d’enquêter et reste juste dans une logique de chercher les « bon·nes client·es » pour confirmer ses intentions ?)
+ discussion sur le rôle de l’éducation aux médias qui doit renforcer notre capacité critique dans nos usages quotidiens de l’information.
- La journée s’est clôturée par un temps d’évaluation à chaud avec la méthode « une pépite », « un râteau »