Son origine
L’accroissement de la dette des pays du Sud à partir des années 1970 a pour origine la situation économique des pays du Nord d’une part, et la conjoncture économique et politique des pays du Sud d’autre part.
A partir de 1973, les pays du Nord sont frappés par une crise économique sans précédent depuis la crise de 1929, qui marque la fin des Trente Glorieuses. L’éclatement du système monétaire international mis en place par l’accord de Bretton Woods en 1945, a été accéléré par l’incapacité du gouvernement des États-unis à assumer la convertibilité entre le dollar et l’or. Le déficit structurel de la balance des paiements américaine a permis aux banques européennes de disposer de masses énormes de dollars (eurodollars) à la recherche d’un placement rentable. Parallèlement, le premier choc pétrolier de 1973 a mis à la disposition des pays producteurs de pétrole une colossale liquidité en dollars recyclée dans le système financier européen (pétrodollars). Or, la crise économique en Occident limite les perspectives d’une demande forte de financement interne pour valoriser ces masses de liquidités.
Dans les années 1960/70, les pays du Sud, jeunes États indépendants, ont, eux, un fort besoin en liquidités afin de réaliser leurs projets d’industrialisation et des grandes infrastructures indispensables pour leur développement économique. Ils empruntent pour se "développer", construire, bâtir, moderniser. Les créanciers, à la recherche de nouveaux placements rentables, proposent des taux d’intérêt réel faibles mais variables, une échéance étalée sur une très longue durée et une période de non paiement de plusieurs années. Ils poussent les pays du Sud à mettre en place des projets coûteux et souvent inadaptés à leurs besoins. De plus, les ressources financières sont bien souvent gaspillées par certains dirigeants corrompus. Tous ces éléments expliquent l’explosion de leurs dettes au cours de la décennie 1970. Inférieure à 70 Mds $ à la fin des années 1960, elle dépasse la somme de 500 Mds $ au début des années 1980.
La crise de la dette des années 1980
La crise de la dette au début des années 1980 a des causes multiples : le changement de la politique économique aux États-unis, une évolution de la conjoncture économique dans les pays du Sud et enfin, les caractéristiques des emprunts contractés par les pays du Sud.
Durant le mandat de Carter (1976-1980), le renforcement du développement industriel était le principal objectif de la politique économique américaine. Pour atteindre cet objectif les États-unis favorisaient le maintien d’un taux d’intérêt et d’un taux de change faibles, favorables aux investissements et aux exportations. Mais avec l’aggravation du déficit de la balance des paiements, cette politique monétaire devient intenable.
Pour lutter contre l’inflation et augmenter la valeur du dollar, en 1979 le directeur de la FED relève le taux d’intérêt et le taux de change. Ainsi entre 1978 et 1982, le taux nominal d’intérêt à long terme passe de 7 à 12.5% et le taux de change du dollar augmente de 120% entre 1980 et 1985. Ce changement de politique monétaire américaine pénalise fortement les pays débiteurs car la plupart de leurs crédits ont été contractés à un taux variable et remboursables en dollars américains. De plus, la réduction des importations et la baisse de l’inflation dans les pays du Nord entravent fortement la capacité de remboursement des pays débiteurs.
Le changement de politique monétaire en 1979 a été le détonateur de la crise de la dette. Mais la structure économique et commerciale des pays du Sud a aussi joué un rôle non négligeable dans l’aggravation de cette crise. La plupart de ces pays étaient exportateurs de matières premières agricoles et minières dont la demande et le prix étaient fortement touchés par la crise économique des pays du Nord dans les années 1970. La conjonction de tous ces facteurs a mis en cause la capacité de remboursement et a déclenché la crise de la dette. Ainsi en 1982 le Mexique annonce son incapacité à assumer le service de sa dette extérieure. En un laps de temps très court, cette crise touche plusieurs dizaines de grands pays débiteurs (l’Argentine, le Brésil, le Chili, d’autres pays des continents américains, africains et asiatiques) et met en péril le système financier international.