Transcription
Ils sont pas fous les immigrés de s’installer ici : les soins sont gratuits, ils touchent les alloc’ et les aides au logement et j’en passe... Moi je comprends que le Français qui travaille dur et qui arrive pas à joindre les deux bouts, quand il voit ça, il vrille...
C’est un préjugé très répandu : les personnes migrantes viendraient en France pour profiter du système. Or, justement, la plupart d’entre elles et eux ne bénéficient pas de ces aides, parce qu’elles sont conditionnées, parce qu’ils ne savent pas qu’ils y ont droit ou par découragement face à la complexité des démarches.
La réalité des aides sociales en France
Depuis les années 2000, environ 10 % des bénéficiaires des prestations sociales en France sont des étranger·ères (que ce soit le RSA, les APL, la prime d’activité, ou les allocations familiales...).
Pour que les étranger·ères fraudent et profitent du système social français, il faudrait déjà qu’iels puissent y accéder.
Pour bénéficier du Revenu de solidarité active (RSA), un·e étranger·ère doit avoir un titre de séjour et une carte de travail depuis au moins 5 ans. Pour toucher le minimum vieillesse, iel doit être en France depuis au moins 10 ans. Pour les étranger·ères en situation irrégulière c’est encore plus compliqué. La majorité des sans-papiers qui travaillent payent des impôts et des cotisations sociales mais ne bénéficient d’aucune prestation sociale. Iels n’ont pas l’assurance retraite, pas droit aux allocations chômage et ne peuvent pas faire de demande de logement social.
Les demandeur·ses d’asile ne sont pas éligibles aux aides sociales et doivent se contenter d’une aide de l’État de 200 à 425 € mensuels. L’hébergement en CADA n’est pas non plus un « droit » puisqu’il n’y a que 25 000 places pour 80 000 demandes d’asile.
Si le système social en France est menacé, ce n’est pas à cause des immigré·es mais plutôt des politiques néolibérales qui réduisent le budget des services publics !
Les enfants, ça coûte énormément !
L’idée que les migrant·es feraient beaucoup d’enfants pour vivre des allocations ne tient pas non plus la route. Tout d’abord, la fécondité des femmes immigrées (2,3 enfants par femme) n’est que légèrement supérieur à celle des non-immigrées (1,7 enfant par femme).
Ensuite, toutes les familles immigrées n’ont pas droit aux allocations familiales : il faut que les enfants soient né·es en France ou qu’iels soient venu·es dans le cadre du regroupement familial, et avoir au moins un·e parent·e qui a un titre de séjour.
Au delà de tout, quand on compare le montant des aides sociales et les dépenses familiales, il est évident qu’élever des enfants coûte bien plus que cela ne "rapporte" entre guillemet !!
Dans nos HLM
L’extrême droite dénonce une supposée préférence pour les étranger·ères dans l’accès au logement social. Selon les derniers chiffres, un logement social sur cinq accueille une famille immigrée et seulement 12% des locataires immigré·es sont de nationalité étrangère.
Concrètement, les étranger·ères sont discriminé·es pour entrer en HLM. Une étude de la Fondation Abbé Pierre en 2023, a montré que seulement 24% des guichets d’enregistrement de la demande de logement social répondent de manière similaire aux candidatures présumées françaises et aux candidatures d’origine présumée d’Afrique de l’Ouest.
Se soigner, c’est pas gagné !
La plupart des étranger·ères qui vivent en France travaillent et cotisent pour la sécurité sociale. Pourtant, il est compliqué pour elleux d’accéder aux soins quand iels tombent malades. Par exemple, pour bénéficier de l’Aide médicale d’Etat (AME), il faut attendre trois mois après son arrivée en France avant de pouvoir déposer une demande. Dans la pratique, les caisses d’assurance maladie exigent des relevés d’identité bancaire, des justificatifs de domicile, des preuves d’arrivée... Par conséquent, de nombreuses personnes ne font jamais les démarches pour en bénéficier, soit parce qu’elles ont d’autres priorités (se loger et s’alimenter, par exemple), soit par découragement face aux démarches administratives complexes. Selon Médecins du monde, 87 % des étranger·ères rencontré·es dans leurs centres ne sont pas bénéficiaires de l’Aide médicale d’Etat.
Dans la pratique, les patients AME sont également discriminé·es. Par exemple, selon une étude de l’Institut des politiques publiques, lorsqu’iels appellent un médecin généraliste ou un ophtalmologue, iels ont 25 % de chances en moins d’obtenir un rendez-vous qu’un autre.
Certaines personnes très malades, qui n’ont pas accès aux soins dans leur pays, obtiennent la permission de venir se soigner en France. Depuis 1998, il existe un droit à un titre de séjour spécifique, mais il est accordé à de moins en moins de personnes, à peine 4000 personnes par an. C’est moins de 2 % des titres de séjour accordés.
Ca coûte ou ça rapporte ? Les bons comptes de l’immigration
Est-il réellement possible de mesurer l’impact budgétaire de l’immigration pour un État ? Aucune estimation ne fait l’unanimité. En 2021, des universitaires lillois affirment que le solde est négatif en moyenne : soit l’immigration ne coûte rien à la France, soit elle coûte 10 milliards d’euros maximum. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) affirme de son côté que l’immigration rapporte plus qu’elle ne coûte et qu’elle a permis à la France de gagner au moins 10 milliards d’euros chaque année en moyenne, du fait des d’impôts et de cotisations que payent les immigré·es. A peu de choses près, donc, l’impact de l’immigration est globalement neutre.
Ce qui est certain en revanche, c’est que les politiques répressives de nos gouvernements en matière d’immigration coûtent très cher au contribuable européen. Les pays de l’Union européenne ont fait exploser les budgets consacrés à l’éloignement des personnes en situation irrégulière, à la fermeture et la militarisation des frontières (avec la construction de murs, de clôtures, de barbelés et de miradors, le déploiement de dispositifs policiers et militaires, etc.).
En France, la Cour des comptes estime le coût direct de la politique de lutte contre l’immigration irrégulière à 1,8 milliard d’euros par an - autant d’argent qui ne va pas à l’éducation nationale ou à la santé publique.
Contrairement à ce que l’on entend souvent, les immigré·es ne coûtent pas cher à la France. Ils et elles bénéficient peu des aides sociales et contribuent au contraire au budget en payant des impôts et des cotisations, quand on les autorise à travailler. Les arguments économiques contre l’immigration ne tiennent donc pas la route, et cachent mal la xénophobie irrationnelle qui les sous-tend.