Les enfants au travail

Introduction

Une réalité mondiale inquiétante

, par CIDES

Depuis l’Antiquité, il existe diverses formes d’exploitation des enfants, notamment par le travail. Ces dernières années, de nouvelles mobilisations ont été mises en place pour lutter contre un fléau qui ne touche pas uniquement les pays les plus pauvres ou en guerre. Des millions d’enfants travaillent également au Nord dans des conditions dangereuses, aliénantes ou proches de l’exploitation.

Il est difficile d’évaluer le nombre d’enfants au travail, tant certaines activités s’effectuent loin des regards, notamment dans la sphère domestique.

Selon les dernières estimations de l’Organisation internationale du travail (OIT) et du Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF), plus de 160 millions d’enfants (dont la moitié ayant entre 5 et 11 ans) seraient astreint·es au travail, soit près d’un enfant sur 10 à l’échelle mondiale, dont la moitié effectuant des travaux dangereux [1]. Le nombre d’enfants de 5 à 17 ans qui effectuent des travaux dangereux – définis comme un travail susceptible de nuire à leur santé, leur sécurité ou leur développement moral – a augmenté de 6,5 millions depuis 2016 pour atteindre 79 millions en 2020. Dans une économie mondialisée, qui incite les entreprises à entrer dans la course aux plus bas prix, l’enfant est devenu·e un maillon essentiel dans la chaîne productive, prisé par les employeurs. De l’autre côté, la pauvreté contraint certaines familles à faire travailler leurs enfants pour compléter les revenus du foyer, au détriment de leur scolarité.

Enfants brandissant une affiche écrite en rouge et en espagnol "Plus de respect enfants adolescents travaillant".
Marche pour la défense des droits des enfants et des jeunes travailleurs

Grâce à des législations renforcées, des mobilisations sans précédent de la part des organisations internationales, des médias et des citoyen·nes, le travail des enfants avait connu un recul certain depuis 2000 (baisse de 94 millions entre 1999 et 2016). Mais les dernières études montrent une augmentation depuis 2016, ainsi que l’apparition de nouvelles formes d’asservissement ; la pandémie de Covid 19 a notamment entraîné une aggravation de la situation dans de nombreux pays : l’UNICEF estimait en 2021 que 9 millions d’enfants supplémentaires risquaient d’être poussé·es vers le travail en raison de la pandémie [2].

Comment apporter des réponses à ce problème des enfants au travail, tout en tenant compte des réalités socio-économiques ? Bon nombre d’organisations entendent aujourd’hui la cause des mouvements de jeunes travailleur·ses. Ces derniers s’élèvent contre l’interdiction totale du travail des enfants tout en approuvant la volonté des États et des grandes organisations internationales de mettre fin à leur exploitation… pour leur conférer enfin une vie digne.

Le travail des enfants : de quoi parle-t-on ?

Adopter une définition universelle du mot « enfant » est impossible car toutes les sociétés humaines n’ont pas la même perception de l’enfant. À l’intérieur même des pays, cette perception a évolué au cours de l’histoire ; les lois changent et conduisent à confier à l’enfant un statut à part entière.
L’origine de ce mot latin infans est : « celui ou celle qui ne parle pas ». En effet, l’enfant a longtemps été considéré·e comme un individu doté de devoirs (celui d’obéir et de se taire) et non de droits et ne doit leur reconnaissance qu’aux différentes lois qui ont jalonné la construction des droits humains.

En France, le cadre législatif ne précise pas quand l’enfance débute ou se termine mais institue la notion de droits de l’enfant, qui apparaît dès la Révolution française et le principe de la protection de l’enfant au début du XXe siècle.

Tous les jeunes du monde ne deviennent pas majeur·es au même âge : dans certaines régions du monde, on considère que l’on quitte l’enfance lorsqu’on se marie, parfois à l’âge de 13 ou 14 ans. Ailleurs, les enfants deviennent des adultes lorsqu’iels atteignent la majorité, un âge où on les juge capables d’être libres et responsables de leurs actes. En France, l’âge de la majorité est de 18 ans : c’est aussi le critère qu’a retenu l’OIT pour distinguer l’adulte de l’enfant.
Malgré des réalités différentes selon les cultures et les pays, la définition du mot enfant converge sur l’idée d’une phase de vie de savoirs et d’apprentissages, où le développement physique et psychologique est intense et où l’individu doit être protégé.

Le travail est défini comme une activité économique, qu’elle soit payée ou non, ce qui permet d’y inclure l’économie informelle ou le travail domestique.
Le travail infantile est limité dans la plupart des pays par l’obligation scolaire jusqu’à 14, 15 ou 16 ans. Les enfants ne sont donc pas censé·es travailler avant cet âge.

Le travail des enfants s’effectue dans des environnements très différents et l’on peut distinguer des formes de travaux « acceptables », alors que d’autres sont jugées intolérables. Les petits travaux d’appoint, les « jobs » pour se faire de l’argent de poche en dehors des heures de cours, les travaux saisonniers ou certains travaux familiaux sont « acceptables », dans la mesure où ils n’entravent pas le développement physique et psychologique de l’enfant et où ils sont compatibles avec une scolarisation.

D’autres formes de travaux, regroupés dans la notion de « child labour [3] », sont plus problématiques puisqu’il s’agit d’activités à temps plein, dans les champs, dans les mines, à l’usine ou dans les rues. Ils concernent des enfants issu·es de familles pauvres, contraint·es de rapporter un salaire au sein de leur foyer. C’est dans cette catégorie que l’on trouve parfois des formes de travail proches de l’exploitation. À l’intérieur ou à l’extérieur de la famille, les conditions de vie de ces enfants sont parfois intolérables : horaires à rallonge avec une rémunération insignifiante, travail nuisible pour la santé, efforts physiques éprouvants, intimidations, violences qui affectent la santé et le psychisme de l’enfant…
Dans ces tâches inacceptables se trouvent le travail forcé, l’esclavage, l’enrôlement dans les conflits armés, le trafic, la prostitution et la pornographie… où la vie de l’enfant n’a plus aucune valeur.