Les droits des femmes sont sans cesse menacés. Dans certains pays de la Méditerranée ils sont quasi inexistants, dans d’autres où on les croyait acquis, ils régressent. Qu’il s’agisse de combattre le harcèlement, de défendre leur droit à disposer de leur corps, de se libérer de la religion, du poids familial et culturel, de revendiquer des salaires égaux… les femmes méditerranéennes, malgré les obstacles, sont des femmes en lutte, des femmes debout.
Pendant un an, nous nous sommes intéressé·es à leur sort, à leur survie et parfois à leur mort. Notre tour d’horizon a commencé à la sortie du confinement. Confinement qui, si sur chaque rive a permis de sauver des vies, pour les femmes victimes de violences conjugales, les a surtout mises en danger encore plus qu’à l’accoutumée. « La violence ne se cantonne pas aux champs de bataille [...] Ensemble, nous pouvons et devons empêcher la violence partout, dans les zones de guerre comme dans les foyers, tandis que nous nous efforçons de vaincre le Covid-19 ». Dans son discours du 6 avril dernier, le président de l’ONU, le portugais Antonio Guterres, exhortait les pays à prendre les mesures nécessaires pour empêcher que les femmes ne se retrouvent prises au piège d’un mari violent en plein confinement. Mais l’ampleur de la tâche est immense, les moyens insuffisants et l’omerta bien présente.
Nous avons ensuite suivi des parcours de femmes sur la route de l’exil. Longtemps, la migration féminine a été perçue comme une migration familiale, ce qui n’est plus vraiment le cas. Les femmes représentent désormais 50 % des personnes migrantes. Elles partent à cause de la misère, de la guerre, des maltraitances qu’elles subissent ou pour sauver leurs filles. Mais le chemin est long et l’arrivée est bien souvent moins idyllique qu’espérée.
Parmi celles qui décident de rester dans leur pays, certaines n’hésitent pas à monter sur les barricades, dans l’espoir fou de faire changer les mentalités et de faire évoluer le statut de la femme. Comme les Algériennes qui ont pris leur place dans la révolution, à travers "le carré féministe". Mais aussi les femmes corses, qui pour la première fois, l’an dernier, sont descendues dans la rue pour briser le silence et oser dénoncer les viols que certaines ont subi. Les Maltaises, elles, se battent, pour défendre leurs droits à disposer de leur corps, l’avortement étant puni d’emprisonnement dans leur pays. Alors qu’en Egypte, musulmanes et chrétiennes orthodoxes tentent d’éradiquer des pratiques d’un autre âge comme l’excision. Car même si la loi l’interdit, 80 % des filles excisées le sont par des personnes ayant le titre de médecin, dans des cliniques privées ou petits hôpitaux de campagne. Les Marocaines, elles, voudraient voir disparaître les mariages contraints dès le plus jeune âge. En Tunisie, comme dans les pays du Maghreb où les codes de la famille régissent les lois, en matière d’héritage, les femmes se battent aussi pour réclamer leur part.
Où qu’elles vivent, les femmes doivent aussi se défendre contre le harcèlement de rue, celui qu’elles subissent au travail, les inégalités salariales, le sexisme. La trêve n’est pas encore pour demain…
Nous nous sommes aussi intéressé·es à ces Méditerranéennes marginalisées. Qu’elles soient homosexuelles, obligées de se cacher pour vivre leurs amours et qui n’ont pour issue que de rentrer dans le rang ou de fuir. Qu’elles soient femmes bédouines subissant la double peine, celle de faire partie d’une minorité sans droits et d’une communauté dominée par les hommes. Qu’elles soient femmes détenues, souvent abandonnées par leurs familles, dans un milieu carcéral qui n’est pas pensé pour elles.
Enfin, notre série s’est achevée à Marseille, porte de la Méditerranée, d’où nous écrivons, avec des portraits de femmes en résilience qui viennent s’ajouter aux parcours de toutes ces Méditerranéennes combatives et courageuses que nous avons croisé tout au long de l’année.