Les fournisseurs d’accès à internet (FAI) aux États-Unis auront désormais l’autorisation de transporter des contenus issus d’un service différemment de celui d’un autre. Concrètement, ça veut dire que l’utilisateur pourrait payer son service d’abonnement plus cher pour pouvoir accéder à l’ensemble des contenus du web. Mais la neutralité du net c’est aussi ce qui garantit que certains contenus ne soient pas bloqués par le FAI. Alors qu’est-ce que la neutralité du net et en quoi doit-on veiller à ce qu’elle soit préservée sur nos territoires ?
La neutralité du net, un concept récent mais un principe fondateur de l’internet.
La neutralité du net s’explique par la nature même du net : c’est un réseau
de transport commun de contenus, créé sur un mode horizontal et
décentralisé. Ce réseau fonctionne de la même façon quels que soient la
source, le destinataire et le contenu, le transport est assuré sans discrimination.
Mettre un terme à la neutralité, c’est un peu comme si le service de la poste
décidait de ne pas acheminer certains courriers en fonction de leur contenu ou de leur destinataire.
Au départ, la neutralité du net était implicite mais depuis les années 2000, certains comportements que ce soit de la part des entreprises FAI (offres donnant accès en zero rating à des bouquets de sites internet) ou de gouvernements (censure) ont conduit à conceptualiser ce principe soit pour le critiquer soit pour le protéger. En Europe, le principe a été reconnu et consacré dans les règlements dits « Paquet Télécom » en 2015. La reconnaissance de ce principe permet de préserver la mission démocratique d’un internet ouvert qui fait le même traitement du payant et du gratuit, de l’officiel et du dissident. Cependant c’est un principe dont le respect est fragilisé par les contours flous de sa définition et par la prérogative de censure exercée par les États.
Concrètement, les fournisseurs d’accès internet, soutenus en cela par les industries culturelles créatrices de contenus, font pression sur la neutralité du net pour deux raisons principales, une technique et une économique. Les FAI invoquent la demande croissante en bande passante de la part de certains services, en particulier ceux proposant de la vidéo à la demande pour argumenter en faveur d’offres différenciées. L’idée serait surtout de développer un nouveau modèle économique, où certains seraient gagnants et d’autres perdants. En effet, le pouvoir de discriminer les services donnerait naissance à un internet à plusieurs vitesses qui privilégierait les services et applications les plus offrants.
La fin de la neutralité du net, qu’est-ce que ça peut vouloir dire pour les associations ?
Le double enjeu économique et politique permet de comprendre les conséquences potentiellement délétères de l’abrogation du principe de neutralité pour les associations. En effet, leurs moyens limités ne permettront pas forcément de pouvoir assurer leur visibilité sur internet dans le cas où elles devraient payer pour que les contenus accessibles via les sites web puissent utiliser la bande passante. Une alternative serait alors de se rendre visible et de publier via des plateformes commerciales (comme Facebook) qui pourraient décider d’autoriser la publication de certains contenus et à l’inverse d’en censurer d’autres.
La reconnaissance du principe de la neutralité du net ne suffit pourtant pas pour garantir la portée démocratique d’internet. Par exemple au Brésil où a été votée en 2014 la loi Marco Civil da Internet : ces derniers temps, la censure d’état a été relayée par des groupes de conservateurs qui s’insurgent contre certaines formes d’expression artistique et intellectuelle et utilisent internet pour ça. Au sein de l’association Intervozes par exemple, le défi est de protéger la loi Marco Civil qui risque d’être mise en cause par les conservateurs mais aussi, en parallèle, d’éduquer les citoyens à la maîtrise de l’outil informatique.
Au-delà de la neutralité
Ici à Globenet, on pense qu’il est de la plus haute importance de garantir la neutralité du net pour assurer à chacun un accès indifférencié aux connaissances et la possibilité d’exprimer toute forme d’opinions. On profite du débat sur la neutralité pour rappeler que la maîtrise des outils techniques est un enjeu majeur. Au-delà des luttes pour le contrôle du réseau côté FAI marchands ou états, les enjeux politiques liés à l’utilisation du net se trouvent aussi dans la protection des données personnelles et dans l’indépendance technique vis-à-vis de grandes entreprises numériques par l’utilisation du logiciel libre.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Neutralité_du_réseau
https://www.ritimo.org/Neutralite-d-Internet-Ou-Internet-comme-bien-commun
https://www.laquadrature.net/fr/nextinpact-le-bresil-sacralise-la-neutralite-du-net