La mobilisation historique des jeunes Roumains contre la corruption

Une initiative de la jeunesse

, par Agenda de la Solidarité Internationale

Manifestation contre la corruption, Bucarest, Roumanie, 1er février 2017.
Crédits : Paul Arne Wagner cc by-nc-nd

Début 2017, les dix ans de l’entrée de la Roumanie dans l’Union européenne ont été célébrés d’une façon inattendue : 250 000 personnes sont descendues dans la rue pour dénoncer la corruption du gouvernement et réaffirmer leur attachement aux valeurs démocratiques. Ces manifestations de grande ampleur, comparées à la révolution de 1989 qui fit tomber Ceaușescu, ont mobilisé en masse des jeunes Roumains. Plutôt urbains et qualifiés, ils veulent rester optimistes quant à l’avenir de leur pays, en le nettoyant de sa corruption. « J’aurais eu la possibilité de quitter le pays, mais je n’ai jamais pensé que j’aurais une vie meilleure ailleurs », explique Vlad, 39 ans, qui travaille à la faculté de cinéma de Bucarest [1]. Cette lutte contre une corruption endémique a déjà obtenu des résultats : créée en 2013, une Direction nationale anti-corruption a renvoyé 1250 personnes devant la justice pour faits de corruption pour la seule année 2015, dont l’ancien premier ministre, Victor Ponta, cinq ministres, seize députés et cinq sénateurs. Mais malgré ces progrès de la justice, les abus de pouvoir et les détournements d’argent continuent de gangrener la vie des citoyens, souvent obligés de payer des pots-de-vin pour obtenir un service public.

L’événement déclencheur des manifestations massives de début 2017 est lié à l’adoption d’un décret, en catimini, qui vise à dépénaliser les délits de corruption inférieurs à 44 000 euros. Aux cris de « voleurs » et « démission », les centaines de milliers de jeunes Roumains qui ont manifesté dans un froid glacial pendant plus d’une semaine dans tout le pays, obtiennent gain de cause début février. Le ministre de la Justice démissionne et le Premier ministre roumain retire le décret. Mais, craignant un nouveau projet de loi pour légaliser le vol et la corruption, les jeunes Roumains continuent de manifester. En mai 2017, le Sénat confirme que les pots-de-vin et autres conflits d’intérêts ne peuvent pas faire l’objet de grâce et la Cour constitutionnelle valide un texte qui interdit aux personnes condamnées de devenir membres du gouvernement. Les initiatives anticorruption se multiplient, à l’image de l’ « Académie anti-corruption » lancée par les fonctionnaires, pour endiguer ce fléau à leur échelle.

La lutte contre la corruption continue… sous l’œil vigilant d’une population prête à redescendre dans les rues.