L’accaparement des terres, une nouvelle forme de colonisation ?

L’accaparement des terres, quels enjeux ?

, par CIIP

Est-il possible que ce processus d’accaparement conduise à la consolidation durable à l’échelle planétaire d’une nouvelle structure de gouvernance du système capitaliste ?
L’enracinement durable d’une telle gouvernance mondiale par les banques et les multiples fonds d’investissement privatisés ou par les fonds souverains des pays les plus riches dépend de leur capacité à maîtriser l’essentiel des terres cultivables et des ressources naturelles dans le monde entier.

Mais en réalité, le pouvoir financier des capitaux privés est fragile et instable. Son dérèglement incontrôlé a déjà produit des crises sociales et politiques majeures dans le passé et aujourd’hui nous vivons à cause de son fonctionnement anarchique et prédateur une crise sociale et économique sans précédent qui déséquilibre profondément tous les pays et l’ensemble des relations internationales. Le besoin de soumettre les activités financières à des contraintes sociales et politiques de sauvegarde et d’équilibre se fait sentir.

Des résistances se manifestent à travers le monde pour contester ces opérations d’accaparement, bloquer les négociations en cours, et multiplier les expériences alternatives qui démontrent la capacité de l’agriculture paysanne à nourrir la population mondiale en respectant l’environnement et même en développant son potentiel.

D’autre part, le droit international condamne le principe d’accaparement des terres, sans toutefois pouvoir en imposer les modalités d’application.
Bien que souvent violé par les États aussi bien que par les banques et les firmes multinationales, il fournit aux mouvements de résistance des arguments et des références favorables à leurs revendications et peut être invoqué lors des actions en justice.
Rappelons par exemple que le Pacte International relatif aux droits économiques sociaux et culturels adopté le 16 décembre 1966 par l’Assemblée Générale des Nations Unies et entré en vigueur le 3 janvier 1976 stipule dans son article 2 : "En aucun cas un peuple ne pourra être privé de ses propres moyens de subsistance".
Dans le même sens, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones adoptée par l’Assemblée Générale le 13 septembre 2007 garantit leurs droits sur la terre (art.13 à 19), leur droit à ne pas être chassés de force (art.10), à sauvegarder leurs relations spirituelles spécifiques avec leurs territoires (art. 25 & 26) et établit le principe d’un accord "libre, préalable et informé" avant tout déplacement collectif.

Ainsi l’accaparement des terres, loin de se limiter à la question agraire, met en jeu le devenir de notre planète : la sauvegarde de l’environnement, le vivre ensemble des habitants de cette terre, la paix entre les peuples, l’avenir d’une civilisation vraiment humaine.