Idées reçues sur les migrations

, par FASTI , Agenda de la Solidarité Internationale

« Je m’interroge sur l’efficacité des politiques qui depuis vingt ans prétendent gérer et contrôler les migrations (…) Comme si chaque nouveau dispositif de contrôle mis en place n’avait pour utilité que de révéler les failles et les lacunes des précédents, et pour finalité de justifier les suivants. » Claire Rodier, Libération, 1 octobre 2012.

Égyptiens dans un camp de détention à Bengazi, Libye, juin 2012. © Sara Prestianni

« Les politiques anti-migratoires sont efficaces pour ralentir les migrations »

Depuis trente ans, l’Europe a fermé ses frontières et affiche une volonté de contrôler les migrations. Les frontières européennes sont désormais gardées par des drones, des navires de guerre et les pays du sud de la Méditerranée, par le biais d’accords de coopération économiques léonins, ont été obligés d’endosser le rôle de garde-frontière de l’Union européenne. Ainsi, des camps de rétention à ciel ouvert ont poussé dans des pays comme la Libye ou la Tunisie.
L’Union européenne a même créé une agence, Frontex, chargée de la gestion et de la "coopération aux frontières", en fait dotée de moyens similaires à ceux d’une armée pour lutter contre les migrations. Mais ces politiques sont-elles réellement efficaces ? Non ! Malgré toutes les entraves, d’ordre juridique, militaire et politique qui leur sont opposées, notamment des politiques de visas ultra-restrictives, des milliers de personnes tentent leur chance en vertu du droit à circuler librement reconnu dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Leur parcours migratoire est juste devenu plus long, plus cher et surtout de plus en plus dangereux... Ainsi plus de 18 000 personnes ont perdu la vie en traversant la Méditerranée, ces 20 dernières années. Et si elles arrivent en Europe, elles sont nombreuses à être enfermées dans un camp de rétention où elles peuvent rester jusqu’à 18 mois avant d’être renvoyées dans le dernier pays tiers qu’elles ont traversé.
En réalité, l’objectif de ces politiques anti-migratoires n’est pas de stopper les migrations. C’est de créer les conditions administratives et politiques favorables à l’exploitation de celles et ceux qui réussissent à entrer en Europe afin de fournir une main d’œuvre exploitable à des secteurs économiques non délocalisables (la restauration, le bâtiment, les services à la personne). Pour légitimer ces politiques anti-migratoires aux conséquences mortifères, la classe politique européenne, suppléée par les médias dominants, répand un discours xénophobe « diabolisant » les personnes migrantes, les présentant comme des « envahisseurs » menaçant l’équilibre social et culturel des pays d’accueil. C’est d’une toute autre politique - imaginant des solutions constructives et des alternatives - dont notre société a besoin pour relever les "vrais" défis de notre société à savoir le partage des richesses, la révolution écologique, la transition énergétique

« Les Roms sont des migrants illégaux »

Dans les médias, la « question rom » est assimilée à un problème. Il est question de campements insalubres, de délinquance, de fraude aux allocations... Harcelés, stigmatisés, victimes d’une xénophobie d’État assumée, les Roms constituent la minorité la plus marginalisée et la plus discriminée d’Europe. Pourtant les Roms font partie de la société européenne depuis plus de 700 ans et une écrasante majorité d’entre eux ont la nationalité du pays dans lequel ils vivent. Seule une minorité des groupes sont des nomades (5 à 20 %).
Les « Roms migrants » - ceux dont il est question dans le débat public - seraient entre 10 et 15 000 (sur plus de 65 millions d’habitants), un chiffre stable depuis plusieurs années. Et la plupart des migrants roms se déplacent dans le cadre de leur droit à la libre circulation inscrit dans la législation communautaire. Mais, officiellement désignés sous le terme de "catégorie ethnique dangereuse" (circulaire du Ministre de l’Intérieur de l’Outremer et des Collectivités territoriales du 05/08/2010), ils sont présentés comme des illégaux et subissent un racisme flagrant (rapport du Commissaire aux Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe du 27/02/2012). Les restrictions à l’emploi en sont une preuve manifeste : selon les textes régissant le droit au séjour des étrangers, jusqu’au 31 décembre 2013, les Roms migrants, pour avoir le droit de travailler, doivent se voir délivrer une autorisation. Et la liste des métiers qu’ils ont le droit d’exercer est restrictive. Ce sont pourtant des citoyens européens venant de pays membres de l’Union Européenne comme la Roumanie ou la Bulgarie. Dès le 1er janvier 2014, les Roms seront libres d’aller et venir, de s’installer et de travailler où ils le souhaitent dans l’espace Schengen, dans les mêmes conditions que les autres citoyens européens. Les discriminations qu’ils subissent depuis des siècles cesseront-elles pour autant ?

Que peut-on faire ?

- Participer à la campagne internationale Frontexit, qui dénonce les responsabilités de Frontex en matière de violation des droits fondamentaux
www.frontexit.org

- S’informer et soutenir les actions du Collectif Romeurope, pour l’accès aux droits fondamentaux des Roms migrants en France
www.romeurope.org

- Manifester contre l’expulsion des Roms dans sa commune
www.educationsansfrontieres.org