Chili : la société civile contre le néolibéralisme et le conservatisme

Focus sur la situation Mapuche

, par CIIP

Drapeau Mapuche, Huhsunqu / Domaine public

Le peuple mapuche fut l’un des seuls peuples amérindiens à résister victorieusement - au moins partiellement - aux colons espagnols. Mais il fut, à partir de l’indépendance du Chili (1818), continûment persécuté, chassé de ses terres et massacré par l’État chilien, excepté durant la très brève période de l’Unité populaire de Salvador Allende (1970-1973).

Rencontrer des Mapuche dans les rues chiliennes n’est pas aisé. Une situation qui peut sembler logique car cette population, réprimée depuis des siècles, tend à se méfier de l’étranger. La majorité des Chilien·nes ne reconnaissent pas leurs origines autochtones et c’est une part minime de la société qui cherche à défendre leurs droits.
Exclu·es de la vie sociale, acculé·es dans des quartiers pauvres ou dans le Sud du pays, les Mapuche sont doublement victimes des effets du néolibéralisme, qui détruit leur mode de vie, et de la répression d’État qui, ayant repris de plus belle sous Pinochet, ne s’est pas pour autant arrêtée avec le retour de la démocratie.

Les Mapuche sont les grand·es oublié·es de la société chilienne qui, si elle est déjà extrêmement inégalitaire, fait presque figure de ségrégationniste lorsque l’on parle de la population mapuche : 30 ans après la fin de la dictature, il·elles sont encore sous le coup de la loi antiterroriste appliquée à l’époque des répressions politiques de la junte militaire. Leurs revendications concernant les terres qui leur ont été volées depuis la conquête espagnole leur valent d’être considéré·es par l’État comme des terroristes lorsqu’il·elles manifestent ou occupent des terrains ; il·elles peuvent donc être à tout moment arrêté·es et mis·es en prison de façon « préventive » (c’est-à-dire pour une période indéterminée) en attendant un jugement au cours duquel il·elles seront traité·es comme des terroristes qui mettent en danger la stabilité de l’État chilien. Les cas d’abus des forces de l’ordre, de mauvais traitements (pour ne pas dire de tortures) ou d’avortements forcés des prisonnier·es mapuche se multiplient avec le silence complice des médias et de l’opinion publique. La seule image véhiculée par les médias est celle d’Indiens au mode de vie dépassé, alcooliques et dangereux du fait de leur fâcheuse tendance à brûler des terres et des récoltes dans le Sud du pays. Peu de personnes parlent de leur impuissance face aux multinationales qui envahissent leurs terres, assèchent leurs régions, exploitent les populations et les forcent à se regrouper dans de petits territoires qui sont chaque jour un peu plus menacés.

Ultime recours pacifique devant tant d’injustice : les grèves de la faim, qui sont devenues le fer de lance d’une population qu’on opprime légalement dans l’ignorance générale la plus totale.