Deux idées reçues sur les droits des femmes

, par Agenda de la Solidarité Internationale

« Les droits des femmes ne sont pas une province (reculée ?) des droits humains, ils sont au cœur de leur dispositif, car un droit qui n’est pas universel n’est pas un droit mais un privilège. »
Marie-France Labrecque, Féminicides et impunité, le cas de Ciudad Juárez

Idée n°1 : C’est seulement dans les pays du Sud que les droits des femmes sont menacés

L’héritage de rapports hiérarchiques inégaux entre hommes et femmes est une constante universelle et persistante qui continue à entraver l’égalité réelle au Sud comme au Nord. Le patriarcat n’est pas un système de domination isolé mais combiné à d’autres rapports sociaux racistes, colonialistes, capitalistes, il prend des formes différentes en fonction des contextes nationaux, économiques et sociaux. Partout dans le monde, les droits des femmes sont remis en cause, voire inexistants.

Peinture issue d’un atelier avec des femmes de l’Association de Solidarité avec Tou-te-s les Immigré-e-s de Valence. © FASTI

L’idée que la lutte des femmes pour l’égalité concernerait uniquement les pays du Sud résulte des discours ethnocentrés et universalisant développés par les classes dominantes du Nord et leurs médias. De l’idée de « l’égalité déjà là » au rejet du sexisme chez les autres (habitants des quartiers populaires, immigrés), ces analyses tendent à rendre invisible la perpétuation de la domination patriarcale dans les pays du Nord et ses effets délétères pour la construction d’une égalité réelle.

Or, au Nord aussi les droits des femmes sont sans cesse remis en question, le sexisme reste prégnant et l’égalité loin d’être acquise tant dans la sphère publique que privée. Les récents débats sur le droit à l’avortement, sur le voile, la longueur des jupes sont exemplaires de la remise en cause des droits des femmes à disposer de leur corps. Les inégalités persistent dans l’emploi : 30 %1 des femmes sont à temps partiel contre 7 % des hommes, les femmes ont des salaires en moyenne inférieurs de 20 % à ceux des hommes, leur taux d’activité chute en fonction du nombre d’enfants alors que celui des hommes augmente. Les tâches domestiques restent très inégalitairement réparties au sein du couple2. Le travail domestique continue de ne pas être considéré comme un travail et les femmes à avoir une double, voire une triple journée de travail.
Au Nord comme au Sud, les femmes doivent continuer à lutter pour conquérir leurs droits.

Idée n°2 : Dans un contexte de crise mondiale, lutter pour les droits des femmes n’est pas la priorité

Crise économique et sociale, crise écologique, crise alimentaire, conflits, ces crises sont la conséquence des politiques néolibérales, de la marchandisation de pans entiers de l’activité humaine (santé, éducation, brevetage du vivant), du pillage des matières premières. Dans ce contexte, les inégalités ne cessent de se creuser au détriment des classes les plus paupérisées et les plus dominées, renforçant ainsi toujours plus un ordre social inégalitaire.

Les femmes en tant que groupe sont les premières touchées par ces crises. Les effets dévastateurs prennent des formes spécifiques en raison de leur sexe/genre : violences sexuelles, dépendance, paupérisation… Conséquences des politiques néolibérales, les crises accentuent les inégalités entre les femmes et les hommes et la persistance universelle du système patriarcal.

Les femmes assument encore majoritairement et partout la responsabilité du rôle traditionnel qui leur est assigné en tant que femmes : les soins de la famille, des enfants, des parents âgés. Aussi, elles sont les premières à payer le prix de la marchandisation des services publics.
Elles sont également les premières touchées par le dérèglement du marché du travail dans lequel elles occupent majoritairement les emplois précaires, les emplois à temps partiel.

Les femmes sont les premières touchées par les violences et les guerres que cela soit en tant que victimes indirectes ou que le viol soit utilisé comme arme de guerre.
Si la lutte pour l’égalité passe inévitablement par la lutte contre ce système néolibéral, qui crée toujours plus de concurrence entre les opprimé-e-s en divisant celles et ceux qui devraient être uni-e-s, elle ne peut se faire sans la remise en question des autres systèmes de domination sur lesquels il s’appuie et se renforce : le racisme et le patriarcat. Lutter pour les droits des femmes c’est lutter pour l’égalité de toutes et tous.

Que peut-on faire ?

 Suivre les combats d’organisations féministes du monde entier, telles que l’Association for Women’s Rights in Development, le Collectif national pour les droits des femmes ou ONU Femmes
www.collectifdroitsdesfemmes.org
www.onufemmes.fr
www.awid.org

 Dénoncer tout comportement sexiste, dans la sphère publique ou privée

 Dans le milieu professionnel, demander toutes les informations remises aux organisations syndicales ou comité d’entreprise pour veiller à ce que les articles du code du travail relatifs à l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes soient appliqués.

 Contacter le Défenseur des droits pour signaler des discriminations à l’endroit des femmes
www.defenseurdesdroits.fr