Initialement, la dette écologique est un outil politique développé par les pays du Sud afin de contester la légitimité de la dette extérieure réclamée par les pays du Nord et les institutions financières. Si aujourd’hui, la réalité de ce que sous-tend ce concept est peu contestée, sa formulation, en revanche, fait débat.
Outre les références données par Aurora Donoso d’Acción ecológica [1], Martinez-Alier, Simms & Rijnhout ou l’Université de Gand (Belgique) [2], le CADTM propose la définition suivante : « La dette écologique est la dette contractée par les pays industrialisés envers les autres pays à cause des spoliations passées et présentes de leurs ressources naturelles, auxquelles s’ajoutent la délocalisation des dégradations et la libre disposition de la planète afin d’y déposer les déchets de l’industrialisation [3] ».
Wikipédia précise que la dette écologique revêt 5 formes sous lesquelles elle continue de s’accroître, à savoir la dette carbone, le passif environnemental, la dette alimentaire,
la biopiraterie et le transport de déchets dangereux.
La notion de dette écologique relève ainsi de la Justice sociale et environnementale et participe de la réflexion sur les Biens Communs et leur récupération [4].
Définition développée
La dette écologique contemple la question des dommages écologiques et de l’accès aux ressources naturelles dans un contexte de finitude. Elle s’inscrit également dans la réflexion sur l’endettement et la domination exercée par les pays industrialisés à l’égard du Sud [5] et constitue dés lors, un enjeu de Gouvernance mondiale.
Si la notion de développement durable renvoie à la préservation pour le futur, celle de dette écologique réintroduit la question de l’éthique du passé. Pourtant, dans le contexte de « crise financière » affectant aujourd’hui l’Occident, il est délicat de mettre en balance la dette extérieure des pays pauvres avec la dette écologique des pays industrialisés [6], notamment du fait du caractère non immuable des frontières entre le Nord et le Sud. Ainsi, selon Esperanza Martinez (Acción ecológica), il serait plus judicieux de parler d’une dette du système capitaliste à l’égard de la nature [7].
Sous l’effet de l’institutionnalisation, cette idée de dette écologique a été transposée dans le langage ONUsien via l’expression de « Responsabilité commune et différenciée » (introduite comme telle au sein du protocole de Kyoto). Or, si l’on conçoit cette responsabilité comme globale, intergénérationnelle et intersectorielle, ceci pose un problème philosophique du point de vue de la théorie de la justice, d’un éventuel arbitrage entre une responsabilité collective des peuples et une responsabilité individuelle de dignitaires. De même, la question de la responsabilité ne s’envisage pas de la même manière pour les acteurs privés que pour les acteurs publics.
Ainsi, d’aucuns [8] regrettent l’usage trop métaphorique qui est fait de ce concept et lui reproche son manque d’opérationnalité ou son absence de contenu en droit positif international. Ces derniers sont ainsi gênés par le vocable de « dette » qui renvoie à la dimension de contrat, impliquant des réparations, des sanctions ou des compensations. Dés lors que se profile une exigence de justiciabilité et d’évaluation du préjudice écologique, se pose la question de la constitution d’un cadre normatif multilatéral et celle de la monétarisation de la dette écologique.
Or, si le fait de donner un prix à la nature n’est pas une chose évidente, elle n’est pas non plus jugée souhaitable pour ceux qui déplorent dans cette approche de la dette écologique, une perte de son contenu politique, voire de sa capacité subversive.
Historique de la définition et de sa diffusion
Comme dit précédemment, la notion de dette écologique a été introduite à l’initiative des mouvements de contestation de la dette extérieure réclamée au pays du sud, et notamment par l’Institut d’Écologie Politique du Chili [9] lors du Sommet de la Terre de Río en 1992.
Dans le langage ONUsien, la dette écologique se substitue au principe de la responsabilité commune partagée mais différenciée, en ce qui concerne les problèmes environnementaux globaux. Ce principe a été a été reconnu dans le Protocole de Kyoto, en impliquant la notion de compensation.
Lors de la conférence sur le climat de Copenhague en 2009, il a été question de Dette climatique, conçue avant tout comme « une arme subversive pour construire l’égalité à l’échelle internationale », selon Maxime Combes [10]
Utilisations et citations
« Les pays riches ne devraient pas oublier les énormes dettes écologiques qu’ils sont en train d’accumuler par leur consommation excessive, notamment les changements climatiques, conséquences de politiques énergétiques irresponsables », Michal Gorbatchev Ex-président de l’URSS.
« Lorsque tombera le dernier arbre, quand mourra le dernier poisson, quand la dernière rivière sera contaminée, vous comprendrez que l’argent ne se mange pas »
Les deux citations sont extraites du rapport « Dette écologique, qui doit à qui ? » [11].