Il est remarquable que l’élection présidentielle de 2024 s’est jouée entre deux candidates ; il y a d’ailleurs une proportion élevée de femmes dans des postes clés (la nouvelle présidente, Claudia Sheinbaum, était maire de Mexico, le gouvernement était paritaire, et le Sénat, la Chambre des députés et la Cour suprême étaient présidés par des femmes) et une législation assez progressiste pour les femmes, mais le Mexique reste l’un des pays où le taux de féminicides est le plus élevé.
La participation des femmes à la vie publique est importante ; le Mexique est à la 4ème place dans le classement mondial des femmes dans les parlements nationaux, avec 246 femmes sur 500 au parlement et 65 femmes sur 128 au Sénat. La progression est importante, puisqu’en 1991 les chiffres étaient de 21 députées et 2 sénatrices.
Mais c’est surtout dans les mouvements féministes et les associations que les femmes sont particulièrement actives.
Des avancées législatives pour les droits des femmes
À contre-courant de la situation aux États-Unis et dans de nombreux pays d’Amérique latine, la législation mexicaine reconnaît le droit à l’avortement, de même que le Mexique avait, depuis le début du XXe siècle, adopté une législation assez souple par rapport au divorce. La légalisation de l’avortement est intervenue dès 2007 dans la ville de Mexico, puis en 2019 dans l’État d’Oaxaca et 2021 dans ceux de Veracruz et Hidalgo, mais l’IVG (interruption volontaire de grossesse) restait prohibée dans les autres États, malgré une décision de la Cour suprême de 2021 indiquant que les femmes ayant avorté ne pourraient plus être poursuivies.
Une avancée décisive a été obtenue par le groupe féministe GIRE (Groupe d’information sur la reproduction choisie) qui avait saisi la Cour pour faire retirer l’IVG du code pénal fédéral. La Cour, en septembre 2023, a déclaré à l’unanimité que la pénalisation de l’avortement est « anticonstitutionnelle » et « viole les droits humains des femmes ». Toutefois, la légalisation, et donc la possibilité d’accès à l’IVG dans des centres de soins, n’est pas encore effective dans tous les États du Mexique.
Depuis l’annulation par la Cour suprême des États-Unis du droit constitutionnel d’avorter et les lois restrictives mises en place dans la moitié du pays, de nombreuses femmes états-uniennes se rendent au Mexique pour avorter ou ont recours à des réseaux féministes transfrontaliers pour obtenir clandestinement des pilules abortives.
Une puissante dénonciation des violences faites aux femmes
Le pays compte un nombre très élevé de féminicides (environ 3 000 par an, soit une dizaine chaque jour, pour une population de 127 millions d’habitant·es) ; entre 2018 et 2020, des marches gigantesques ont été organisées dans les capitales des 32 États pour dénoncer ce fléau. Malgré l’impact du Covid, qui a stoppé les manifestations, mais aussi augmenté les violences faites aux femmes, la question a été mise au centre du débat public et a permis des progrès dans la législation (sanctions envers les pères qui ne paient pas la pension alimentaire, reconnaissance de nouveaux délits - violence numérique par exemple).
Mais en pratique, 95 % des violences faites aux femmes restent impunies et les mouvements féministes continuent leur mobilisation et leurs manifestations souvent spectaculaires ; ainsi le 25 novembre 2023 (journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes), des étudiantes ont installé sur la pelouse de l’université de Mexico 3 000 silhouettes, représentant chacune une victime de féminicide.
Et le 8 mars 2023, ce sont des dizaines de milliers de femmes (90 000 selon le gouvernement, mais certaines parlent de 150 000) qui se sont rassemblées pour une marche dans les rues de Mexico, afin de dénoncer les violences.