Déclaration de Margarita sur le Changement Climatique

Changeons le système, pas le climat

Traduction de l’espagnol au français par Clémence Tavernier, Jonathan Rock, et Marie-Joe Martin, traducteurs bénévoles pour Ritimo.

Déclaration issue de la réunion préparatoire à la Pré COP Sociale sur le Changement Climatique, réalisée du 15 au 18 juillet 2014 sur l’Ile de Magarita, Vénézuela.

En quoi consiste la Pré-COP Sociale ?
Il s’agit de la première consultation publique mondiale qui proposera un dialogue entre les gouvernements et mouvements et organisations sociales du monde entier, afin d’établir les bases d’une alliance entre les peuples et les gouvernements face à la menace que représente le changement climatique pour l’ensemble de l’humanité. Elle se tiendra du 4 au 7 novembre 2014, au Venezuela. La présente déclaration rassemble les éléments fondamentaux que la société civile souhaite porter dans le cadre des négociations climatiques d’ici à la COP 20, qui aura lieu à Lima, en décembre 2014.


Nous, femmes et hommes représentants des organisations et mouvements sociaux réunis sur l’île de Margarita du 15 au 18 juillet 2014, engagés en faveur du buen vivir ("bien vivre", en français), du vivre en harmonie avec les écosystèmes de la planète comme voie pour faire face à l’actuelle crise environnementale et au changement climatique (qui en est l’une de ses illustrations les plus flagrantes) ; préoccupé-e-s par la dimension sociale trop longtemps ignorée de cette crise mais remplis d’espoir et de foi quant à la puissance créatrice des peuples, moteur indispensable au changement du système ; nous saluons et souhaitons la bienvenue aux processus sociaux qui se vivent et se construisent au sein de différents pays, communautés et modèles de société.

Puisqu’il existe une dimension sociale au changement climatique et un droit inaliénable des peuples à être les protagonistes de la construction de leurs propres destins ;

Puisque chaque pays vit dans un contexte historique particulier au sein d’un monde complexe, composé d’expériences et de visions diverses à partir desquelles naissent des initiatives transformatrices ;

Puisque la crise climatique est le résultat de systèmes de développement insoutenables et incompatibles avec le bonheur des peuples ;

Puisque le thème de l’environnement est un sujet politique et qu’il est du devoir des gouvernements et de la communauté internationale d’écouter les voix des peuples ;

Puisque ce sont les peuples qui subissent les conséquences du changement climatique, qui vivent et comprennent ses dimensions sociales. Puisque ce sont aussi eux qui ont la force morale et la capacité créatrice nécessaire pour changer de cap et aller vers des systèmes justes et soutenables qui rendent possible un bonheur durable respectueux des cycles de la nature ;

Puisque les pays en voie de développement sont confrontés à différents types de problèmes et souffrent davantage des conséquences liées au changement climatique que les pays développés ;

Nous déclarons,

Égalité intergénérationnelle et droits des générations futures

« Allons vers l’avenir, ramenons-le à nous et commençons à le semer ici »
Hugo Chavez

1. "L’homme et la femme se sont transformés en de monstrueux consommateurs, qui sont en train de consommer toutes les ressources que la terre nous a données". Carmona Genesis, 11 ans, représentante élue des Mouvements écologistes des enfants du Venezuela.

2. Nous devons partager nos expériences à travers le monde pour comprendre et construire de véritables solutions. Etre solidaires avec nos camarades d’autres parties du monde, c’est comprendre leur contexte, leur lutte pour la vie, la souveraineté et l’identité.

3. Le changement dépend de la capacité de notre génération à produire une contre-culture, afin de transformer le modèle de consommation en celui du bien vivre, celui de sociétés coopératives globales. Nous devons générer une contre-culture révolutionnaire. Le rôle des jeunes est d’ouvrir le chemin et de créer des brèches dans un système qui n’est pas durable.

4. La jeunesse doit être politisée et participer aux décisions. Le plus important est que la jeunesse ait la volonté et la capacité de transformer les choses. Nous devons changer le système et commencer à mobiliser nos meilleures forces. Il ne s’agit pas uniquement d’un sujet environnemental ; il s’agit d’un sujet profondément social, éthique, politique et culturel.

5. Nous devons changer notre perception du pouvoir et encourager des espaces divers et participatifs, ouverts à la pensée interculturelle. Nous devons passer du discours à l’action transformatrice.

6. Le monde a besoin de corrections avant que les dommages soient irréversibles. Nous dénonçons le manque de volonté politique des pays les plus riches.

7. L’éducation doit ressembler à la société dont nous rêvons. Elle doit être révolutionnaire, elle doit transformer la réalité. Si elle n’est pas capable de la transformer, elle ne sert à rien. La pierre angulaire des transformations est l’éducation et la communication.

8. Le thème de l’environnement doit être un pilier du parcours de l’étudiant. Il faut repenser la manière dont l’environnement et le changement climatique sont enseignés. Nous devons ouvrir de nouveaux espaces où il est possible de discuter des causes profondes de la crise environnementale. Les jeunes doivent encourager ces changements. Le système hégémonique craint d’avoir une population éduquée parce que cela remettrait en question les structures du pouvoir.

9. Le colonialisme continue à opérer. Le changement climatique intervient dans un contexte historique où un groupe de pays a fondé son développement sur des pratiques qui ont généré la crise environnementale actuelle, y compris le changement climatique, alors que d’autres souffrent des pires conséquences de cette crise. Les pays développés, responsables du changement climatique, tentent de faire dévier le débat vers des solutions technologiques ou de marché, se soustrayant à leurs responsabilités historiques.

10. Les luttes du Sud doivent être soutenues par les pays du Nord. Les pays riches doivent s’engager à chercher une solution au changement climatique, la jeunesse du Nord doit faire pression sur ses gouvernements. Il ne reste pas beaucoup de temps, alors le Nord dans son ensemble doit assumer sa responsabilité historique et les jeunes doivent faire pression pour que le changement se produise.

11. Nous avons besoin de revendiquer la notion de solidarité et de comprendre les différences entre les pays, leurs différents contextes historiques, le droit au bien vivre ainsi que les responsabilités qu’implique le développement. La transition ne peut se limiter à la réduction des émissions ; il faut que ce soit une transition équitable qui assure que les peuples du Sud ne seront pas affectés.

12. Nous devons créer nos propres rêves, oublier le rêve pervers du développementalisme, et trouver en nous l’inspiration. Nous devons partager une nouvelle histoire à partir de nos expériences.

Lire l’intégralité de la déclaration en français, en pdf, ci-dessous.

La déclaration est également disponible en anglais et en espagnol sur le site de la Pré-COP Sociale