Angola : l’oligarchie autoritaire face à la faiblesse des contre-pouvoirs

Chronologie et histoire récente de l’Angola

, par Forum Réfugiés

Les éléments chronologiques concernant le Cabinda sont repérés en italiques.

Des royaumes africains à la guerre d’indépendance contre le colonisateur portugais

XIII°s-XVII°s : Le royaume Kongo a pour capitale Mbanza-Congo (actuelle province angolaise du Zaïre).

Au XVème siècle, le Cabinda est constitué de trois principautés.

XVI°-XIX° : Royaumes Matamba, Ovimbundu, Lunda, Solongo. Vers 1500, la province congolaise de Ndongo devient indépendante : ses rois portent le titre de Ngola, d’où dérive le futur nom de l’Angola.

XVIIème siècle : Rivalités entre les puissances européennes (France, Portugal, Pays-Bas) pour le contrôle de la zone.

1786 : Les droits du Portugal sur le Cabinda sont reconnus en échange de la liberté de commerce et de trafic des esclaves des autres puissances européennes.

Colonisation portugaise 1885-1975

1885 : Conférence de Berlin : le Cabinda devient protectorat portugais. Le Traité de Simulambuco signé entre le Portugal et le roi du Cabinda place le territoire sous protectorat portugais.

Années 1950  : Fondation des groupes indépendantistes : le Mouvement populaire de Libération de l’Angola (MPLA), mouvement politico-militaire soutenu par l’URSS et présidé par Mario de Andrade, et le Front national de libération de l’Angola (FNLA), fondé en 1957 par Holden Roberto et soutenu par le camp occidental.

1956 : Début de l’exploitation pétrolière à Cabinda (concessions de recherche délivrées par le Portugal à la compagnie nord-américaine Gulf Oil).

1957 : L’Angola et le Cabinda sont placés sous l’autorité d’un administrateur unique.

1961 : Février-mars : Déclenchement de l’insurrection, le MLIC (Mouvement de Lutte pour l’Indépendance de Cabinda) entre en conflit avec l’armée portugaise à Cabinda.

1963 : Naissance du FLEC (Front de Libération de l’Enclave de Cabinda) issu de la fusion du MLEC (Mouvement de libération de l’enclave de Cabinda) avec d’autres tendances, avec à sa tête Ranque Franque.

1964 : L’Organisation de l’Unité Africaine (UA) publie une liste de pays à décoloniser qui distingue le Cabinda de l’Angola.

1966 : Scission du FNLA, dont est issue l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (UNITA), présidée par Jonas Malheiro Savimbi, qui établit son maquis au sud-est du pays.

1967 : Formation en République démocratique du Congo d’un gouvernement cabindais en exil.

Années 70-80  : Les compagnies occidentales (Elf-Aquitaine, Chevron-Texaco qui remplace Gulf Oil) soutiennent les mouvements indépendantistes et veulent contrôler la zone.

1974 :
Avril  : Le régime de Salazar est renversé au Portugal.
Septembre  : Le MPLA (Mouvement Populaire de Libération de l’Angola) annonce l’annexion du Cabinda par l’Angola.
Novembre  : Avec l’accord du nouveau gouvernement portugais, les troupes du MPLA envahissent le Cabinda et écartent tout mouvement indépendantiste.

1974  : Avril : La Révolution des œillets marque la fin de la dictature de Salazar au Portugal et ouvre la voie à l’indépendance.

1975
Janvier  : L’accord d’Alvor marque le rattachement du Cabinda à l’Angola. Divisé, le FLEC échoue militairement et politiquement et se scinde en plusieurs factions.
Novembre  : Proclamation de l’indépendance de l’Angola.

L’Angola indépendant et les guerres civiles

1975  : 11 novembre  : Le MPLA proclame l’indépendance, Agostinho Neto chef du MPLA devient président de la République populaire d’Angola.
Octobre  : Guerre civile entre le MPLA, soutenu par les Cubains, l’UNITA et le FNLA (soutenus par l’Afrique du Sud).

1977  : Le MPLA devient Parti du Travail. Répression d’une tentative de coup d’Etat.
Mars : l’Angola appuie la tentative de renversement de Mobutu par les gendarmes katangais.

1979 : José Eduardo dos Santos est désigné par le MPLA pour succéder à Agostinho Neto à la mort de ce dernier.

Années 80 : Quatre groupes armés indépendantistes s’opposent et affrontent les troupes angolaises.

Début années 90 : Les négociations entre gouvernement et indépendantistes cabindais n’aboutissent pas.

1991  : Instauration du multipartisme. Accords de Bicesse (Portugal) : fin (théorique) de la guerre civile.

1992  : La République populaire de l’Angola devient République de l’Angola. L’UNITA perd les élections législatives et reprend les armes jusqu’en 1994.

1994  : Protocole de paix signé à Lusaka (Zambie).

1995  : Savimbi accepte le résultat des élections de 1992.

1997  : Premier gouvernement d’unité nationale. L’ONU crée la Mission des Nations Unies en Angola (MONUA) et sanctionne l’Unita pour non-respect des accords de paix.

1998  : Violents affrontements entre l’UNITA et l’armée gouvernementale dans la province de Lunda Norte. Appui de l’Angola et du Zimbabwe au régime de Kinshasa attaqué par le Rwanda et l’Ouganda.

1999  : Fin de la mission de maintien de la paix de l’ONU.

Fin des années 90 : Les défaites de Mobutu (Zaïre) et Lissouba (Congo-Brazzaville) privent le mouvement cabindais de ses alliances. Les indépendantistes enlèvent des expatriés pour s’assurer une couverture médiatique. La pression de l’armée angolaise est forte, les violations des droits de l’Homme sont fréquentes et la presse est censurée.

Début des années 2000 : Les organisations indépendantistes restent actives mais désunies. Après la mort de Savimbi (UNITA) en février 2002, l’armée angolaise est plus que jamais déterminée à résoudre la situation par les armes.

2000 : Vastes offensives de l’UNITA.
Novembre  : Amnistie.
Mai 2000, puis mars 2001 : Deux factions du Front de libération de l’enclave de Cabinda (FLEC) prennent des Portugais en otage.
2001 : Les élections générales sont reportées.

L’après-Savimbi ou la prise en main de José Eduardo Dos Santos

2002-2003  : Grandes offensives de l’armée gouvernementale contre le FLEC, entrainant de lourdes pertes et des déplacements massifs de population.

2002
Février : Savimbi est tué par les Forces Armées Angolaises (FAA).
Avril  : Un mémorandum d’accord entre l’armée gouvernementale et l’UNITA met fin au conflit. Mandat de 6 mois de la MINUA pour consolider la paix.
Décembre  : Fernando da Piedade, dit "Nando", est nommé 1er ministre. Gouvernement d’unité et de réconciliation, accord sur une nouvelle Constitution. L’ONU lève les dernières sanctions contre l’UNITA.

2004  : Accords d’Helvoirt (Pays-Bas) entre les différentes factions indépendantistes et création du Forum Cabindais pour le Dialogue (FCD).

2005  : Août : L’Assemblée Nationale entérine une nouvelle loi électorale, une Commission nationale des élections (CNE) est mise en place. Le président Dos Santos a installé une véritable oligarchie. Le gouvernement lance en 2005 une campagne « exaltation du patriotisme » dans la perspective d’élections fin 2006.

2006  : Août : Mémorandum d’entente de Namibe entre le gouvernement et des représentants du Cabinda (dont Beto Bembe ancien chef du FLEC). Cet accord, inspiré de celui conclu quelques années plus tôt avec l’Unita, repose sur la renonciation à toute revendication indépendantiste (donc la fin de la lutte armée) et sur l’intégration dans les structures gouvernementales des responsables du FLEC. Le protocole ne sera suivi d’aucun effet, Beto Bembe étant très vite délégitimé au sein du mouvement indépendantiste.

Novembre  : Début du recensement électoral. L’Angola entre à l’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs et Producteurs de Pétrole).

Décembre  : Annonce du report des élections nationales en 2008.

2007 : Juillet  : Progression du recensement électoral (4 millions d’électeurs enregistrés).
Boom économique du pays (production de 1.5 millions de barils par jour début 2007) mais la population reste dans une situation de grande fragilité.
Le gouvernement angolais proscrit Mpalabanda (seule organisation de défense des droits de l’Homme dans l’enclave) qu’il accuse de s’immiscer dans la vie politique en ayant refusé de reconnaître le protocole d’entente signé le 1er août 2006.
Novembre  : Suite aux accords de Namibe, le gouvernement angolais et les partisans de Beto Bembe tentent d’intégrer « par la force » des combattants provoquant des incidents aux frontières avec la RDC et le Congo.

2008  : Septembre : Les élections législatives sont largement remportées par le MPLA, parti au pouvoir, face à l’UNITA, avec 81,64% des voix. Les observateurs de l’Union européenne dénoncent des irrégularités dans le scrutin (principalement dans la province de Cabinda) sans toutefois le déclarer nul.
Condamnation à 12 ans de prison de Fernando Lelo correspondant de Voice of America à Cabinda pour atteinte à la sécurité de l’Etat. Il avait critiqué l’accord de Namibe.

Octobre  : Début du procès de l’Angolagate (affaire de trafic d’armes entre la France et l’Angola impliquant plusieurs personnalités politiques françaises).

2009  : Suite à la large victoire du MPLA aux législatives, les élections présidentielles sont reportées.
Février  : Les Etats-Unis et l’Angola signent un accord cadre de coopération sur les secteurs d’investissement et de commerce.
Avril  : La RDC souhaite s’en remettre à la convention des Nations unies sur les droits de la mer pour confirmer notamment ses frontières maritimes avec l’Angola, objet de litiges entre les deux pays, en particulier sur l’exploitation des hydrocarbures.

2010
21 juin : Adoption d’une nouvelle Constitution modifiant le mode de désignation du président. Est élu président la tête de liste du parti vainqueur aux élections législatives.
Janvier  : L’équipe nationale de football du Togo est prise dans une embuscade alors qu’elle voyage à travers l’enclave cabindaise pour aller participer à la Coupe d’Afrique des Nations ; l’incident fait trois morts. Le FLEC revendique l’attaque.

Arrestations et intimidations, le gouvernement face à l’agitation naissante de la société civile

2011
Février  : Un personnage anonyme, se présentant sous le pseudonyme d’Agostinho Jonas Roberto Dos Santos, appelle à manifester le 7 mars contre la « dictature » du régime de Dos Santos. Le manifeste, qui circule sur Internet, encourage à « une nouvelle révolution du peuple angolais », avec pour slogan « L’Angola dit basta à 32 ans de tyrannie et de mauvaise gouvernance ».

5 mars : Après avoir mis en garde que toute participation à une telle manifestation sera condamnée, le MPLA organise une « Marche pour la Paix », réunissant entre 1 et 3 millions de personnes à Luanda.
7 mars : Suite à la campagne d’intimidation menée par le gouvernement, la manifestation prévue ne regroupera que quelques personnes. Dix-sept jeunes ayant répondu à l’appel sont arrêtés, ainsi que 3 journalistes de Novo Jornal venus couvrir l’événement.
2 avril : Plusieurs centaines de personnes manifestent sur la place de l’Indépendance à Luanda. Si aucun incident n’est à déclarer, plusieurs manifestants déclarent avoir reçu des menaces de morts anonymes.
2 mai : Une manifestation est dispersée, plusieurs manifestants sont arrêtés.
3 septembre : Une nouvelle manifestation est violemment dispersée par les forces de police, mais également par des groupes non identifiés de civils. Plusieurs manifestants et journalistes sont blessés. Des arrestations de manifestants mènent à des peines de prisons de 45 à 30 jours, sans que ces personnes aient eu accès à un avocat ou à leurs familles.
8 septembre : Une manifestation de soutien aux prisonniers est organisée. 17 jeunes sont de nouveaux arrêtés puis relâchés.

2012 :
10 mars : 3 manifestants sont gravement blessés par les forces de polices. Un rassemblement était organisé afin de protester contre le non-paiement des pensions de l’Unité de Garde Présidentielle (UGP) et des anciens combattants. Un organisateur, un défenseur des droits de l’Homme et un passant sont arrêtés et condamnés à 45 jours de prison pour insubordination et agression à l’égard de forces de police.
27 et 29 mai : Isaias Cassule et Antonio Alves Kamulingue, organisateurs des rassemblements des anciens de l’UGP et des anciens combattants, sont tour à tour portés disparus après le rassemblement du 27 mai. Aucune enquête n’est ouverte.
14 juillet : Deux rassemblements anti- et pro-Dos Santos sont organisés à Luanda. 11 manifestants anti-Dos Santos et deux journalistes sont arrêtés, alors que le deuxième rassemblement se déroule sans encombre. Des témoins évoquent des mauvais traitements de la part des forces de police.
Août : Les élections législatives voient le MPLA arriver une nouvelle fois en tête avec 71,84%, permettant au président Dos Santos de conserver son poste. Cette apparente large victoire peut cependant être relativisée par une faible participation (63% de participation, contre 87% en 2008).

2013
31 mai : Une manifestation dénonçant la disparition d’Isaias Cassule et Antonio Alves Kamulingue est de nouveau réprimée.
Août  : Rafael Marques, journaliste défendant la liberté d’expression, fait toujours l’objet de poursuites pour diffamation.
22 novembre : HRW fait état de l’existence d’un document prouvant l’implication des forces de police dans la disparition et le meurtre d’Isaias Cassule et Antonio Alves Kamulingue.
26 novembre : Après une journée de manifestation, Manuel de Carvalho, connu pour ses activités dénonçant le gouvernement, est tué par les forces de police alors qu’il procède à l’affichage de tracts contre Dos Santos.