Les extrêmes droites, mieux les connaître pour mieux les combattre

Aux Philippines, les défenseur·es des droits humains sont victimes d’une hécatombe

, par Basta ! , KNAEBEL Rachel

De juillet 2016 à novembre 2018, au moins 12 journalistes, plusieurs activistes de la société civile, des syndicalistes et au moins 76 militants écologistes et défenseurs des droits à la terre ont été assassinés aux Philippines. C’est le triste constat établi par la Fédération internationale des droits humains (FIDH) en février 2019, dans un rapport qui documente les attaques grandissantes à l’encontre des défenseurs des droits fondamentaux, de l’environnement et des journalistes aux Philippines depuis l’arrivée au pouvoir du président Rodrigo Duterte. Depuis son élection en juin 2016, le président philippin a déclaré une « guerre à la drogue » qui est vite devenue un prétexte à l’impunité de la violence, entre autre exercée à l’encontre des défenseurs des droits fondamentaux.

Rassemblement "Plus jamais la loi martiale aux Philippines" @Joe Catron (CC BY-NC 2.0)

« Les défenseur·es du droit à la terre des populations indigènes sont en première ligne et sont constamment la cible d’attaques de la part de groupes au service des intérêts des entreprises minières », précise la FIDH. Sans compter les nombreuses menaces et intimidations dont les activistes font l’objet. « L’aggravation de la situation des défenseur·es des droits humains a été exacerbée par la violence de Duterte et sa rhétorique de la "guerre contre la drogue", souligne la FIDH. Le 5 août 2016, Duterte a par exemple déclaré : « Je m’en fiche bien des droits humains, croyez-moi ». Le 29 mai 2017, il dit à l’adresse des défenseur·es des droits humains : « Je vais vous tuer avec les toxicomanes. Je vais vous décapiter ». « La rhétorique violente du président Duterte a créé un climat dans lequel les attaques contre les défenseurs des droits humains deviennent acceptables et les auteurs ne sont jamais punis », déplore la FIDH.

Le retour de la loi martiale

La situation est encore plus violente sur l’île de Mindanao, où le président a imposé la loi martiale depuis mai 2017. L’île, située au sud de l’archipel des Philippines, est le foyer d’une rébellion de séparatistes islamistes depuis les années 1960, ainsi que de groupes révolutionnaires d’inspiration maoïste. Mindanao est aussi la région où se trouvent une majorité des défenseurs des droits à la terre et environnementaux. Plus de la moitié des activistes assassinés aux Philippines l’ont été à Mindanao. La loi martiale y est en vigueur jusqu’à fin 2019.

La répression se fait aussi judiciaire. Le ministère de la Justice philippin a porté des accusations criminelles contre plusieurs opposants politiques de Duterte qui défendent les droits fondamentaux. Une sénatrice, Leila de Lima, a par exemple été détenue sans procès pendant plus de deux ans, sous de fausses accusations. Le rapport de la FIDH souligne par ailleurs la misogynie et le sexisme violent dont fait preuve le président. En plus d’attaquer plus particulièrement ses détracteurs féminins, il incite également à la violence contre les femmes. Le 7 février 2018, Duterte a par exemple déclaré que les soldats des forces armées philippines devraient « tirer sur les rebelles de la Nouvelle armée populaire (groupe révolutionnaire communiste présent sur l’île de Mindanao) dans le vagin ».