Agrocarburants, les choix aventureux de l’agrobusiness

Introduction

, par CITIM

“Bio”, mais pas si vivant que ça...

Leurs promoteurs les appellent "biocarburants". Leurs détracteurs, ou ceux qui sont simplement réservés, préfèrent parler d’"agrocarburants" : rien n’est simple, pas même le vocabulaire, pour cette source d’énergie récemment mise sur le devant de la scène.

Sur le plan sémantique, le préfixe « bio » désigne le vivant, et « agro » est tiré du latin ager qui signifie l’espace cultivé. Les termes « agrocarburants » et « biocarburants » ne sont donc pas tout à fait équivalents.

Selon certains auteurs, les "agrocarburants" appartiennent à la famille des "biocarburants", en compagnie des "sylvo", "rudo" et autres "zoo" carburants (issus respectivement de la forêt, des déchets et des graisses animales).

Autrement dit, on pourrait parler d’agrocarburants, de sylvocarburants, de rudocarburants et de zoocarburants selon que la matière première, que l’on désigne aussi sous le terme de biomasse, est d’origine agricole, sylvicole, ou qu’elle provient des déchets ou des graisses animales.
Et c’est l’ensemble de ces classes de carburants qui constituerait les biocarburants.

Dès lors, le problème réside dans le fait que certains messages publicitaires, du genre « un carburant 100 % bio », suggèrent une liaison avec l’agriculture biologique et entretiennent ainsi une confusion, car les biocarburants n’ont aucun rapport avec l’agriculture biologique. Ils sont issus de l’agriculture conventionnelle, industrielle. De ce fait, la notion de biocarburant ne permet pas de traduire la réalité du phénomène. Elle n’intègre pas l’infrastructure industrielle qui la sous-tend, encore moins l’usage des engrais et pesticides qui permettent de produire la matière première ; elle ne rend pas non plus compte des rapports à établir entre l’automobile et la crise alimentaire dans certains pays.

En effet, avec les agrocarburants, un des problèmes posés est celui de l’usage des terres agricoles. Il s’agit de remplacer une agriculture dont la fonction essentielle, depuis la nuit des temps, est de nourrir l’humanité, par une agriculture industrielle vouée à produire de l’énergie destinée principalement à la circulation de véhicules automobiles. Cette substitution, même partielle, peut-elle s’envisager sans prendre en compte les conséquences que ce bouleversement produit déjà à grande échelle en termes de destruction de l’agriculture paysanne, de sécurité alimentaire voire de famine dans les pays dits "du Sud", sans omettre les incidences environnementales et climatiques ? La crainte est que notre société planétaire à deux vitesses oppose de plus en plus violemment "les ventres vides" aux "réservoirs pleins".