Le business caritatif de l’environnement marin

Introduction

, par Pêche et Développement , GIRON Yan

Rapport "Blue Charity Business" : Réforme de la politique européenne de la Commune des Pêches, Premier Panorama -2000-2011- Octobre 2012- 70 pages.

Chalutier à l’abandon en Mauritanie.
Photo de Tidjani

Ce rapport vise à donner plus de transparence sur l’action des fondations au travers des Organisations Non Gouvernementales Environnementales [ONGE] en Europe. Il vise également à décoder l’origine de cette méthode d’intervention, et le parallèle qui peut être fait avec les actions actuellement à l’œuvre aux États-Unis. Il tente d’identifier les premières pistes quant aux motivations d’intervention des fondations, hors de la simple défense de la pureté écologique.

Pourquoi les fondations américaines ont-elles investi plusieurs centaines de millions de dollars US dans les réformes des politiques des pêches, y compris des pêches européennes ?

Éléments de contexte

Le secteur européen des pêches, et plus largement de l’aquaculture et des affaires maritimes, est encadré depuis 1983 par la politique commune des pêches [PCP]. Cette politique, l’une des plus intégrée de l’UE, reste méconnue du grand public. Elle répond pourtant à des enjeux majeurs : la préservation des ressources halieutiques, l’adaptation du secteur professionnel des pêches à l’objectif de durabilité, et la garantie de produits de la mer sains et de qualité pour le consommateur européen. Ses impacts sont environnementaux, économiques, sociaux, territoriaux, sanitaires.

La PCP a abordé en 2011 la 3ème réforme [1], de son histoire, sur la base d’une proposition législative émanant de la Commission Européenne [2]. Elle est en cours de négociation au Conseil des Ministres de la Pêche et au Parlement Européen, et devrait entrer en vigueur en 2013.

En avril 2009, comme pour la précédente réforme, la Commission publie un livre vert. En juillet 2011, la Commission rend publique sa proposition de texte. Suite à la réforme du cadre de gouvernance européen, cette réforme sera aussi la première que le Parlement européen et la Commission européenne négocieront et co-décideront.
Alors que le champ classique d’une révision de cette politique est limité aux questions des accès et de la mer côtière, la Commission a entamé un chantier bien plus vaste, considérant que le cadre actuel issu de la réforme précédente a échoué.

Le texte proposé par la Commissaire européenne aux affaires maritimes et à la pêche, Maria Damanaki, est fondée sur le présupposé d’une surpêche généralisée en Europe et la nécessité de réduire par deux à trois l’effort de pêche. Pour y parvenir, à moindre coût, elle propose de généraliser les Quotas Individuels Transférables [QIT] marchands au secteur de la pêche dit « industriel », soit tous les navires de plus de 12 m et tous ceux qui pratiquent les arts traînants (drague et chalut), quelle que soit la taille du navire.

Cette proposition de la Commission revient à considérer tous les chalutiers et les dragueurs de petites tailles qui travaillent dans la bande côtière dans le respect de la réglementation comme des navires « industriels ». Ce qui par exemple s’appliquerait à toutes les pêcheries artisanales de coquilles Saint Jacques.
La Commission souhaite aussi parvenir au rendement Maximum durable en 2015 [3]pour toutes les pêcheries et interdire les rejets des prises non désirées en mer. Par ailleurs elle propose de renforcer la régionalisation et de promouvoir l’aquaculture.

Cette période a aussi vu une implication sans précédent des Organisations Non Gouvernementales Environnementales [ONGE] qui ont développé un lobbying très intense, et ce dès 2002. Ce lobbying cible les 4 composantes de la société qui interagissent pour voter cette réforme : la société civile, ses représentants élus au Parlement européen, les ministres et la Commission européenne elle-même.
Ces ONGE sont devenues très nombreuses. Qu’elles portent une parole propre ou qu’elles soient organisées en coalitions, elles constituent malgré leurs différences un réseau au maillage dense, complet et complexe. On peut citer notamment, et pour reprendre les plus influentes : Oceana, New Economic Foundation, fishsubsidy.org, Marine Stewardship Council, Marine Conservation Society, Birdlife international, Client Earth, WWF, Greenpeace, Pew environment group, Seafood Choice Alliance, Seaweb, Environmental Defense Fund, Fisheries Secretariat, North Sea Foundation, Bloom Association, OCEAN2012, Fish Fight, Deep Sea Conservation Coalition, Shark Alliance, Seas at Risk, OCEANS5.

Notes

[1La première réforme a eu lieu en 1992. La seconde réforme a eu lieu en 2002.

[3Il ne faut pas confondre la pêche durable et le rendement Maximum durable [RMD]. Ce sujet est présenté en annexe 5.1 du rapport. La pêche durable est obtenue lorsque la pression de pêche est inférieure à celle de l’approche de précaution. Le RMD n’est que la situation maximum en captures de la pêche durable. La surpêche est un terme technique qui désigne la situation où la pression de pêche est supérieure à celle du RMD. Entre le RMD et la situation de précaution, on a donc techniquement à la fois une pêche durable et une surpêche durable. La confusion est entretenue entre surpêche et pêche non durable, en utilisant la mauvaise connotation du terme surpêche.

Commentaires

Retrouvez le rapport détaillé incluant cet extrait sur le site de Pêche et développement : http://www.peche-dev.org/spip.php?article685