Refonder des politiques d’intégration, vers des politiques inclusives ?

, par Rédaction

La parution du rapport "La grande nation, pour une société inclusive" commandé par le Premier Ministre, Jean-Marc Ayrault, détonne dans l’approche que propose Thierry Tuot, conseiller d’Etat et ancien directeur général du Fond d’action sociale pour les travailleurs immigrés et leurs familles (FAS), auteur du rapport.

Paru le 1er février 2013, ce rapport remet en cause la politique d’intégration des 30 dernières années en France, qui s’est davantage approchée d’une politique d’assimilation, source de discrimination et de ségrégation. « La politique d’intégration est celle des défauts : défaut de doctrine ; défaut d’instruments ; défaut de crédit ; défaut d’acteurs ; défaut d’institutions ». C’est l’une des raisons pour laquelle, Thierry Tuot propose de parler d’une société inclusive [1]. (Retrouvez le rapport dans son intégralité sur le site de France Terre d’Asile).

Cette approche positive vise à contrer les idées fausses, fortement soutenues par les médias et les politiques. Le rapport n’hésite pas à poser des questions qui démontrent que certaines idées ne sont pas recevables. « L’immigration commence à être plutôt asiatique, pourquoi demeurer obsédés par l’islam et les maghrébins ? Les vieux sont une urgence sociale, pourquoi tout focaliser sur les jeunes délinquants ? Il y a une forte présence des publics que nous visons en milieu rural, pourquoi ne parler que des quartiers ? La fécondité et la pratique religieuse décroissent, pourquoi redouter un choc démographique musulman ? » toutes ces questions prouvent la révision nécessaire des politiques publiques.

Pour s’outiller d’arguments recevables pour lutter contre les idées reçues, Ritimo vient de sortir le Guide de survie pour répondre aux préjugés sur les migration.

Le rapport se fonde sur des propositions qui concernent des politiques sociales autour de l’éducation, de l’accès aux logements, de la mémoire collective et non pas à partir des politiques de chiffres liés aux expulsions, aux délits, etc.

Le rapport préconise une régularisation des sans papiers en invitant l’Etat à reconnaître que la « majorité des sans-papiers sont inexpulsables ». Il énonce des propositions de court et moyen terme. Par exemple, donner la nationalité sur simple déclaration aux étrangers ayant suivi une scolarité complète en France et aux ascendants de Français séjournant en France depuis vingt-ans ou plus. Vous trouverez l’énumération de plusieurs propositions qui a amené la Ligue des Droits de l’Homme (LDH) à se féliciter des propositions recommandées dans le rapport.

Cette proposition de régularisation des sans papiers ne fait pas exception dans d’autres pays puisqu’aux Etats-Unis, huit sénateurs ont proposé un projet de réforme, le 28 janvier dernier. Ce projet réunit autant les démocrates que les républicains, en mettant en avant le potentiel économique et électoral que les sans-papiers représentent. Cela n’empêche pas des divergences partisanes sur le contenu de la réforme. Vous pouvez lire Barack Obama s’attaque au chantier de l’immigration.

Au regard des mesures actuelles du gouvernement français, telles que l’expulsion des Rroms, la criminalisation des étrangers ou l’annonce faite par Manuels Valls de ne pas procéder à des régularisations massives, la mise en œuvre des propositions du rapport est minée d’obstacles importants. Pour autant, ce rapport est une source d’information précieuse pour pouvoir parfaire la vision de politiques inclusives.

Notes

[1"Construire une société inclusive est un effort partagé par tous ceux qui résident ici ; c’est un horizon commun d’effacement des divisions, non un effort asymétrique où certains ont les droits et d’autres les devoirs ; c’est une politique publique et un mouvement de transformation sociale, non une prestation qu’on condescend à verser à certains aux dépens d’autres ; c’est une élévation collective – de nos richesses et de nos conditions de vie, non une aide accordée à des tiers." Rapport, Une grande nation, pour une société inclusive-p.14.