"Non au CETA" et à tous les accords de libre-échange !

Zoom d’actualité

, par CIIP , GRUNWALD Catherine

L’accord de libre-échange entre l’UE et le Canada (le CETA) signé en octobre 2016 revient devant le Parlement européen le 2 février prochain. En effet, pour que le CETA entre formellement en vigueur, il doit être ratifié par le Parlement européen et par les parlements nationaux et régionaux qui en ont la compétence... Mais dans son état actuel, le CETA reste un accord conçu par et pour les plus grandes transnationales du monde.

Le CETA, où en est-on ?

Rappelez-vous, en octobre dernier les négociations autour du CETA avaient fait couler beaucoup d’encre suite au véto du Parlement de la région belge de Wallonie porté par la voix de son président Paul Magnette "devenu en quelques jours une icône de la social-démocratie, de l’opposition au néolibéralisme triomphant et de la démocratie, contre l’opacité et l’arrogance des mécanismes de négociation européens et internationaux".
Pourtant le compte n’y est pas... Le CETA reste bien un traité pour les transnationales et les raisons de s’y opposer sont multiples comme le détaille Attac.
L’une des pierres angulaires de controverse reste le système de règlement des différends investisseur-État avec des tribunaux d’arbitrage qui "confèrent des privilèges extrêmes aux grandes entreprises" comme le confirme Lora Verheecke de Corporate Europe Observatory citée dans "TAFTA/CETA : Les tribunaux d’arbitrage ne sont pas morts"

"Ceta : un traité pour les multinationales !" : Vous en doutez encore ? L’AITEC vous propose de lire les réactions et les commentaires des représentants des plus grosses multinationales et de leur lobbies d’Europe et du Canada au lendemain de la signature du CETA...

"Stop CETA !", action devant le Conseil européen à Berlin (30 juin 2016). Photo CC Uwe Hiksch

L’enterrement du TAFTA, un leurre ?

Annoncé comme une bonne nouvelle en septembre dernier, "l’abandon" du TAFTA [1] ne doit pas faire illusion : "Le TAFTA (a été) sacrifié… pour sauver les traités de libre-échange" et "cacher la volonté de poursuivre la libéralisation des marchés mondiaux et de conclure sans encombre le CETA".
Un point de vue prémonitoire partagé par Mathilde Dupré, chargée de campagne à l’institut Veblen pour qui "la stigmatisation du TTIP vise à donner des gages aux opposants à ce projet pour essayer de sécuriser la ratification du CETA",
D’ailleurs, "les négociations suivent leur cours. Signe que le projet d’accord de commerce et d’investissement transatlantique est aussi et surtout porté par d’autres forces, hors de la sphère publique, qui imposent leur agenda aux gouvernements et aux citoyens". Porte-voix des multinationales pour pousser leurs intérêts et promouvoir l’orthodoxie néolibérale et libre-échangiste, leurs associations professionnelles sont étroitement associées aux négociations. Lire à ce propos l’article d’Olivier Petitjean de l’Observatoire des multinationales "Gros plan sur les lobbys européens derrière le projet d’accord de libre-échange Tafta".

Autre accord sur lequel les lobbyistes pèsent de tout leur poids : le TiSA [2]. Un accord annonciateur de la destruction des services publics dans le monde, comme le décrypte James Wright pour Europe Solidaire Sans Frontières (en anglais).

Les APE, véritable "accords de paupérisation économique" contre les peuples

Dans la longue liste des accords de libre-échange commerciaux signés par l’Union européenne afin de constituer de vastes zones de libre-échange à l’échelle planétaire, n’oublions pas les APE (pour Accord de Partenariat Économique) :
"Depuis 1975 et jusqu’à présent, en vertu des accords de Lomé puis de Cotonou, les pays des zones Afrique Caraïbes Paci­fique (ACP) peuvent exporter sans droits de douane vers l’Union européenne (UE), tout en maintenant des taxes à l’importa­tion pour les marchandises européennes. C’est pour mettre fin à ce traitement jugé préférentiel selon les règles de l’Organisa­tion mondiale du commerce (OMC) que l’UE a lancé les négociations de plusieurs Accords de Partenariat Économique (APE) avec différentes régions africaines". Ces accords imposés aux forceps par l’Union européenne font uniquement le jeu des multinationales comme le démontre l’économiste Jacques Berthelot qui dresse un panorama des négociations en cours et de leurs impacts.

Accords de partenariat économique (APE), Traité de libre-échange tripartite (TFTA) [3], Accord de libre échange complet et approfondi (ALECA)... Quelques exemples : au Camerounla France est le principal bénéficiaire de cet accord, en Tunisie, et au Maroc où le séminaire organisé par ATTAC CADTM Maroc début octobre 2016 "Les accords de libre-échange, des accords coloniaux contre les peuples" a rencontré un vif succès et s’est conclu par une déclaration des représentant.e.s des organisations venu.e.s du Maghreb, d’Afrique subsaharienne, d’Europe et de Palestine.

Derrière cette multitude d’acronymes mystérieux se cachent des accords de libre-échange et d’investissement négociés dans le plus grand secret, où au final, chaque fois le peuple est perdant...

"Consultons les peuples", journée mondiale contre les accords de libre-échange à Paris (18 avril 2015). Photo CC : Tétard Olivier

La société civile se mobilise

Des deux côtés de l’Atlantique, provenant entre autres des milieux syndicaux, agricoles, environnementaux, de défense des consommateurs, de la santé publique, des droits sur Internet, un large éventail d’organisations sociales ainsi que des petites et moyennes entreprises (PME) s’opposent à l’accord.

Les collectivités territoriales ne sont pas en reste. "2000 collectivités territoriales Hors TAFTA et CETA en Europe". Leur point commun : la signature de la Déclaration de Barcelone des Autorités Locales sur les Traités de Libre-échange de Nouvelle Génération. Constitués en réseau, elles représentent "plus de 75 millions de citoyens européens vivant désormais dans une zone hors TAFTA et/ou CETA" (texte en espagnol). La mobilisation des élus locaux se poursuit avec la 2e Rencontre européenne des collectivités hors TAFTA & CETA les 17 et 18 février 2017 à Grenoble.

Depuis plusieurs années, les citoyens et citoyennes se mobilisent avec un réel impact : information et sensibilisation du grand public sur la menace que représentent ces traités sur nos droits, notre santé, notre environnement et notre démocratie, alors qu’aucun débat public sur ces négociations n’était à l’ordre du jour. Une mobilisation qui commence à porter ses fruits : "Accord UE/Maroc : Le droit des peuples l’emporte à la Cour de Justice de l’UE". Elle doit se poursuivre !
Une journée européenne d’action est programmée le 21 janvier prochain.
D’autres campagnes sont en cours partout dans le monde :

"Stop aux Accords de libre-échange". Photo CC Jacky Hénin

Car, au-delà des traités transatlantiques, il s’agit de rejeter l’ensemble des accords de libre-échange bilatéraux et multilatéraux qui vont à l’encontre des intérêts des peuples et de la démocratie, comme le souligne la Via Campesina dans son communiqué "Le TTIP coule, l’OMC et les ALE doivent aussi s’écrouler". Contre l’agenda néolibéral de l’OMC axé sur l’accroissement du pouvoir des multinationales sur l’humanité, imposons un "changement de paradigme vers une politique commerciale transparente et inclusive fondée sur les besoins des peuples et de la planète" !

Notes

[1Le TAFTA (TransAtlantic Free Trade Area) ou TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership) : Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement

[2Accord sur le commerce des services (ACS, ou TiSA)

[3résultat d’un regroupement de trois régions économiques, le Comesa, le Marché commun des Etats d’Afrique australe et de l’Est, l’EAC (Communauté d’Afrique de l’Est) et la SADC (Communauté de développement d’Afrique australe), la zone de libre-échange s’étend du Cap, en Afrique du Sud, au Caire, en Égypte.