Nicaragua : un « sandinisme » de compromis

La vie politique depuis 2007 : les deux mandats de Daniel Ortega

, par CDATM

Fin 2006, le pays est dans une situation désastreuse. Daniel Ortega, est de nouveau élu et il suscite bien des espoirs dans le pays ; mais des interrogations s’expriment rapidement sur ce que les sandinistes « rénovateurs », les anciens compagnons, « combattants historiques », considèrent comme des dérives autoritaires préjudiciables au pays. Sans majorité au parlement, lié par le « pacte libéral-sandiniste » à d’anciens adversaires politiques de droite, Ortega doit en effet faire face à un courant sandiniste de « rénovation » très critique à son égard.

Le programme « Sortir le pays de la pauvreté » est mis en œuvre en janvier 2007. La privatisation des services publics avait creusé les inégalités. Les premières mesures du nouveau gouvernement concernent l’éducation et la santé : gratuité de l’école (primaire et secondaire) et des soins dans les hôpitaux. Cuba, réputée en médecine, envoie des médecins et les milieux défavorisés peuvent avoir accès à des soins gratuits.

En 2011, la période pré-électorale est très tendue : violences verbales et affrontements musclés (quatre morts et des blessés). La campagne du Front sandiniste utilise abondamment plusieurs chaînes de télévision et cherche à rassembler avec le slogan « Chrétien, socialiste, solidaire ». L’opposition s’exprime librement, et de manière très virulente, en particulier dans la presse écrite (La Prensa, El Nuevo Diaro…), reprochant au Président ses méthodes autoritaires, son clientélisme et ses alliances (Cuba, Iran) ; elle peut en outre profiter des fonds collectés par les Nicaraguayens conservateurs aux Etats-Unis pour alimenter la campagne anti-Ortega.

Les observateurs internationaux notent des « irrégularités et des difficultés techniques » dans les opérations de vote, mais ils n’ont pas jugé qu’elles pouvaient mettre en cause le résultat : Daniel Ortega obtient 62 % des suffrages. Le secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA) considère que le processus électoral participe au progrès de la démocratie en Amérique latine et le Conseil des experts électoraux latino-américains souligne la forte participation des femmes et des jeunes, dans ce pays où le vote n’est pas obligatoire. En revanche, l’administration des Etats-Unis manifeste une sérieuse inquiétude et menace de revoir son aide.

L’ancien guérillero entame un troisième mandat en janvier 2012. Et, pour la première fois, il dispose d’une majorité des députés. Pour résumer l’apport du quinquennat de Daniel Ortega, le journaliste nicaraguayen W. Grigsby Verdara, qui a soutenu le Front sandiniste, déclare alors : « la majorité des Nicaraguayens savent qu’aujourd’hui ils vivent beaucoup mieux qu’il y a cinq ans » ; ce qu’explicite Maurice Lemoine dans le Monde diplomatique « nul, bien sûr, ne s’aventurerait à parler de socialisme ». Le Président poursuit son double objectif : sa politique étrangère vise à assurer l’indépendance du pays et, à l’intérieur, il cherche à « sortir le pays de la pauvreté ».