Algérie : le défi d’une nécessaire transition énergétique

La population se mobilise contre l’exploitation du gaz de schiste : une nouvelle ressource à risques

, par CDTM 34

L’exploitation des huiles et gaz de schistes, dits hydrocarbures « non conventionnels » se généralise dans de nombreux pays, car elle présente pour beaucoup d’États une alternative possible au gaz naturel dont les réserves s’épuisent et l’opportunité pour les plus gros importateurs de réduire leur dépendance énergétique, voire de devenir des exportateurs…Mais l’exploitation de ce gaz est très coûteuse et les dégâts qu’elle cause à l’environnement sont considérables. L’exploration des sous-sols nécessite de nombreux forages qui laissent les territoires exploités dévastés.

Mouvement de contestation contre le gaz de schiste à In Salah, Sud de l’Algérie. Sit-In. Photo de Nejma Rondeleux le 24 janvier 2015

Au début des années 2000, les multinationales gazières annoncent que le sous-sol algérien contient la 4ème réserve mondiale de gaz de schiste, après les États-Unis, la Chine et l’Argentine.
Le gouvernement algérien fait voter une loi en 2013 autorisant l’exploration des sous-sols, sans aucun débat à l’Assemblée nationale. En mai 2014, les procédures officielles pour l’exploitation du gaz de schiste sont lancées et en décembre la Sonatrach qui prévoit le forage de 200 puits par an, annonce la réalisation avec succès de son premier puits pilote.
L’ Algérie ne possédant ni la technologie ni les compétences nécessaires doit faire appel à l’expertise de compagnies étrangères ( Halliburton, Shell, Schlumberger, Total…) qui facturent très cher leur savoir-faire.

En Algérie, la perspective d’extraction de ce gaz soulève un grand mouvement de protestation. La technique de la fracturation hydraulique, la seule utilisée à ce jour, nécessite de très grandes quantités d’eau et pollue les nappes phréatiques de façon irréversible. Le coût environnemental et humain de l’exploitation du gaz de schiste pourrait être considérable, dans le sud du pays particulièrement, où il existe des centaines d’oasis, l’eau étant une source rare et vitale pour les habitants et pour l’économie locale. L’agriculture, qui dépend de ces ressources en eau, est la principale source de revenus des habitants. Ces forages représentent un danger mortel pour ces populations.
Fin décembre 2014, le ministre de l’Energie se rend dans le bassin d’Aneth dans la wilaya de Tamanrasset, pour y saluer le succès du premier forage. Sa visite met le feu aux poudres à In-Salah, ville située au Nord de ce bassin ; la quasi-totalité des habitants occupe sans interruption la place baptisée pour l’occasion « Place de la résistance », faisant de cette petite bourgade un symbole de la lutte contre le gaz de schiste en Algérie. Au printemps 2015, des manifestations contre l’exploitation du gaz de schiste sont interdites à Alger. La mobilisation est relayée par les médias et le débat devient national et international.

Ce mouvement de protestation a étonné par son ampleur et sa spontanéité le gouvernement algérien, qui n’a toujours pas réussi à donner des réponses fiables et précises pour calmer les esprits. L’opacité règne concernant ses intentions et le devenir des contrats déjà passés avec les multinationales gazières.