L’Albanie face à son passé

Introduction

, par Forum Réfugiés

Depuis la chute du communisme en 1991, l’Albanie peine à établir un fonctionnement démocratique apaisé. De 1945 à 1985, le pays a été dirigé d’une main de fer par Enver Hoxha, dictateur communiste. L’Albanie était ainsi considérée en 1991 comme le pays le plus pauvre, le plus sous-développé et le plus isolé du continent européen, conséquence d’une politique de fermeture pratiquée depuis des décennies. Les transitions économiques et démocratiques commencèrent en 1991 notamment par l’ouverture du pays à la diplomatie internationale, encore en vigueur aujourd’hui. Cette ouverture est notamment marquée par la volonté de rejoindre les principales organisations internationales et un rapprochement avec l’Union européenne (UE), à la faveur de la signature de plusieurs accords assortis de leurs outils financiers, permettant un accompagnement dans la mise en place des réformes nécessaires pour se prévaloir du statut de candidat à l’entrée dans l’UE. Parallèlement, les dirigeants successifs se sont efforcés à démontrer l’identité européenne de l’Albanie. Le 27 juin 2014, le Conseil européen a officiellement accordé au pays le statut de candidat à l’adhésion à l’UE.

Les albanais
Musée national historique, Tirana. Mozaïque représentant « L’élan du peuple albanais vers son indépendance et son identité ». Photo Rob Hogeslag, le 14 août 2009

Malgré cela, l’Albanie reste en proie à ses vieux démons : la corruption et la criminalité organisée continuent de gangrener le pays et entravent les institutions dans leur fonctionnement, ralentissant la mise en place des réformes, du développement économique et de la démocratisation. Le système judiciaire est particulièrement touché. La lutte contre les discriminations envers les minorités sexuelles et ethniques (Roms et Égyptiens) [1] n’est pas suffisamment appuyée et soutenue pour une réelle amélioration de la situation. Et, si la chute de l’État communiste a permis le multipartisme et l’ouverture à l’extérieur, elle a aussi causé un vide institutionnel dont les traces sont encore visibles : sans État stable ni système juridique fiable, les Albanais·es se sont tournés vers le code coutumier de Lekë Dugajini (le Kanun), qui régit une grande partie de la vie sociale. Transmis de génération en génération, ce code a toutefois été dévoyé dans sa mise en œuvre depuis les années 1990, et les vendettas ont causé la mort de dizaines de milliers de personnes depuis 1991 (voir le chapitre "Les défis de la lutte contre la criminalité et la corruption en Albanie").

Les Albanais sont nombreux à quitter le pays en quête d’une vie meilleure dans d’autres pays d’Europe. Certain·es fuient des persécutions qui, si elles sont reconnues par les instances de l’asile, leur permettent d’obtenir une protection internationale. Mais, pour la majorité, cette recherche d’une vie meilleure s’accompagne surtout de nombreuses difficultés à obtenir le droit de s’installer dans un pays d’accueil.

Notes

[1Les Egyptiens sont une minorité ethnique. Musulmans, albanophones et jadis nomades, considérés par les ethnologues comme des Roms albanisés, mais eux-mêmes ne se reconnaissent pas comme Roms.

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Image du logo : Mozaïque qui raconte l’histoire de la lutte des Albanais contre l’invasion et l’occupation au cours des siècles. Photo Marcel Oosterwijk (CC BY-SA 2.0)